L’ancien président de la République Michel Aoun a réitéré jeudi la position hostile de son parti, le Courant patriotique libre (CPL), à la participation de son allié, le Hezbollah, à la guerre contre Israël et l’ouverture d’un « front de soutien à Gaza » au Liban-Sud depuis octobre 2023. Dans une interview accordée au journal pro-Hezbollah al-Akhbar, la première depuis sa sortie du palais de Baabda en octobre 2022, Michel Aoun a estimé que « le Liban est le plus petit pays de la région, et aucun accord économique ou sécuritaire ne le lie à Gaza ». Pour lui, « les Américains ne veulent pas de cette guerre » et « il ne fallait pas donner de prétexte aux Israéliens ». « Je crains la défaite face à Israël et j’ai peur pour l’avenir du Liban », a-t-il insisté, relevant de nombreuses différences avec la guerre de 2006.
L’ancien commandant en chef de l’armée a cependant qualifié la prestation militaire du Hezbollah de « mesurée et intelligente », mais se dit inquiet de « la perspective d’une invasion terrestre israélienne pour créer une zone tampon au sud du Litani ». Sa relation avec le Hezbollah, son allié depuis 18 ans, il la qualifie de « calme », estimant qu’il ne faut pas que les différends politiques se transforment en différends confessionnels. « Ils ne m’ont pas soutenu, durant ma présidence, dans des questions qui me tenaient à cœur comme l’audit financier (de la Banque centrale, ndlr), et j’ai fait connaître ma position, mais cela n’a rien à voir avec notre position stratégique », a-t-il ajouté.
Sur le dossier de la vacance présidentielle, l’ancien chef de l’Etat, à qui personne n’a succédé au palais de Baabda depuis la fin de son mandat en octobre 2022, a estimé que « l’affaire est désormais mondialisée », disant craindre que « des parties étrangères n’aient planifié cette vacance ». Il ne s’est pas privé de lancer une pique à l’actuel commandant en chef de l’armée, le général Joseph Aoun, l'un des candidats potentiels à la présidence, qui fait partie des opposants à son courant. « La Constitution est foulée du pied, sinon qu’est-ce qui explique qu’on ait prorogé le mandat du commandant en chef de l’armée (en janvier, quand le général Aoun devait partir à la retraite, ndlr) alors qu’il y a 20 officiers qui sont mieux que lui ? », s’est-il demandé.
« Gebran Bassil n’est pas un dictateur »
Interrogé sur ce qui se passe au sein du parti qu’il a fondé, le CPL, et que préside son beau-fils Gebran Bassil, après le limogeage ou la démission de quatre de ses éminentes figures, Michel Aoun a affirmé que « ces quatre députés ont commis des erreurs, et il s’est avéré qu’ils ont de nouvelles tendances politiques, et ont même effectué des déplacements à l’étranger sans concertation (avec le parti) ». Il a insisté sur le fait que « Gebran Bassil n’est pas un dictateur, c’est un homme de décision qui assume la responsabilité de faire respecter le règlement intérieur, et ils ne veulent pas ça ».
Ces dernières semaines, quatre députés ont quitté les rangs du parti, Elias Bou Saab et Alain Aoun par limogeage, et Simon Abi Ramia et Ibrahim Kanaan par démission. Michel Aoun a particulièrement accusé Ibrahim Kanaan, qui est également président de la commission des finances au Parlement, d’avoir omis de voter des réformes comme le texte sur le contrôle des capitaux, « ce qui a coûté cher au CPL sur un plan populaire ». Le Liban est secoué depuis 2019 par une crise économique et financière sans précédent, et les déposants n’ont pas accès à leur argent bloqué dans les banques.
Le fondateur du CPL s’est pour autant dit confiant que le parti dépasserait cette période sans problème, et qu’il « était nécessaire de remettre les choses en ordre ».
La réponse d’Ibrahim Kanaan à l’interview de Michel Aoun ainsi qu’à d’autres déclarations du CPL qui l’ont pris à partie depuis sa démission mercredi, ne s’est pas fait attendre. Il a déclaré répondre « à des commentaires coordonnés et programmés, aux objectifs bien connus ». Sur la question de son rôle dans le retard du vote de la loi sur le contrôle des capitaux, soulevé dans l'entretien au Akhbar, il a rappelé, dans un communiqué, que sa commission « avait préparé une proposition de loi le 20 mai 2020, mais c’est le gouvernement de Hassane Diab qui ne l’a pas adoptée, et les preuves abondent autant dans les procès-verbaux des réunions que dans la presse ». Et c’est cela, selon lui, qui a contribué à favoriser la fuite des capitaux des plus nantis. Citant la presse de l’époque, il a souligné que c’est le ministre des Finances Ghazi Wazni qui a retiré le texte de l’ordre du jour, et quand Hassane Diab s’en est étonné, il lui a rétorqué qu’il fait l’objet de nombreux commentaires. Or selon M. Kanaan, la commission des Finances a adopté une version du texte amendée suivant les remarques du Fonds monétaire international (FMI) le 21 juin 2021, ce qui dément toute allégation que la commission et son chef n’ont rien fait dans ce domaine.
Nous le remercions pour sa clairvoyance lui qui nous a vendu aux barbus et à l'Iran pour s'assoir dans un beau fauteuil confortable.
10 h 49, le 31 août 2024