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Trois mois après les émeutes, la crise perdure en Nouvelle-Calédonie

Trois mois après les émeutes, la crise perdure en Nouvelle-Calédonie

Des personnes font la queue pour acheter des provisions dans un supermarché le long d'une rue bloquée par des débris et des objets brûlés suite aux troubles de la nuit dans le quartier de Magenta à Nouméa, territoire français de Nouvelle-Calédonie dans le Pacifique, le 18 mai 2024. Photo AFP/DELPHINE MAYEUR

Trois mois après de violentes émeutes liées à une réforme électorale, la sécurité n'est pas encore totalement rétablie en Nouvelle-Calédonie, archipel français du Pacifique sud toujours soumis à un couvre-feu et asphyxié sur le plan économique.

Des affrontements qui continuent

C'est dans la nuit du 13 au 14 mai qu'éclatent les premières émeutes, au moment où l'Assemblée nationale examine à Paris une réforme modifiant le collège électoral de l'archipel, colonisé par la France au milieu du XIXe siècle et dont les Kanak sont le peuple autochtone.

Des véhicules sont incendiés, des commerces pillés et des barrages routiers mis en place, principalement dans l'agglomération de la capitale Nouméa. Des jeunes masqués affrontent les forces de l'ordre lors de violences inédites sur ce territoire depuis près de quarante ans.

Le 14, le couvre-feu est décrété à Nouméa avant que le président Emmanuel Macron, à l'origine de la réforme contestée, n'instaure l'état d'urgence le lendemain sur l'ensemble du territoire. Au total, dix personnes seront tuées au cours des émeutes, dont deux gendarmes.

Si la tension est nettement redescendue depuis mi-juillet, le sud de la Grande Terre - l'île principale de l'archipel - est toujours inaccessible par la route. En cause, l'insécurité qui règne au niveau de la tribu de Saint-Louis, fief indépendantiste et passage obligé à une dizaine de kilomètres de Nouméa.

Ailleurs sur l'île, des barrages n'ont pas été levés et rendent la circulation très difficile. Une situation toujours suffisamment tendue pour justifier, aux  yeux des autorités, le maintien d'un couvre-feu de 22H00 à 05H00, l'interdiction du port d'armes et de la vente d'alcool.

Plus de 2 milliards d'euros de dégâts

Selon les chiffres du gouvernement local, les destructions, pillages et incendies ont causé au moins 2,2 milliards d'euros de dégâts. Quelque 700 entreprises ont été touchées, dont 66% à Nouméa, et les autorités dénombrent 26 établissements scolaires affectés par les émeutes, dont un collège et un lycée totalement détruits. 

Conséquence: l'économie est à genoux. Près d'un salarié sur cinq est au chômage total ou partiel. L'État a débloqué 300 millions d'euros, mais cette somme ne couvre pas les besoins des collectivités locales au-delà de septembre, ont-elles estimé. 

Une aide supplémentaire doit être décidée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, selon le haut-commissariat, représentant de l'Etat dans l'archipel.

Le corps électoral pose toujours problème

Revendication de longue date des non-indépendantistes, la réforme qui a mis le feu au poudre prévoyait de "dégeler" le corps électoral en ouvrant, pour les élections provinciales, le droit de vote aux habitants installés plus récemment sur l'archipel.  

L'examen de la loi au Parlement, sans accord local, avait été vu comme un "passage en force" par les indépendantistes kanak, déclenchant leur mobilisation.

Face à l'embrasement du territoire, Emmanuel Macron avait annoncé fin mai, lors d'une visite éclair à Nouméa, que le texte était "suspendu". Un terme jugé ambigu par les indépendantistes, qui souhaitent que le président de la République annonce son retrait pur et simple et jurent de continuer la mobilisation jusque-là.  

Les non-indépendantistes radicaux estiment eux que la réforme n’est pas enterrée. Le sujet doit être évoqué en septembre à Paris, lors d'une réunion proposée par Emmanuel Macron aux groupes politiques calédoniens.

Septembre à haut risque

Les violences qui durent depuis trois mois ont radicalisé les positions et annihilé tout dialogue entre indépendantistes et non-indépendantistes.

La présidente loyaliste de la province Sud, l'ex-secrétaire d'État Sonia Backès, a même proposé en juillet une partition de l'île, disant constater que "le monde kanak et le monde occidental ont (...) des antagonismes encore indépassables". Un projet unanimement rejeté par les loyalistes modérés et les indépendantistes.

Le transfert en métropole de sept militants de la CCAT (Cellule de coordination des actions de terrain), groupe indépendantiste accusé par le gouvernement d'avoir orchestré les émeutes, où ils sont placés en détention provisoire, a lui aussi choqué. Depuis, deux ont été placés sous contrôle judiciaire mais doivent rester dans l'Hexagone.

Le dialogue pourrait toutefois reprendre en septembre notamment si les différents mouvements indépendantistes arrivent se mettre d'accord sur les revendications à porter à Paris.

Mais une date est redoutée: le 24 septembre, qui marque la prise de possession de la Nouvelle-Calédonie par la France en 1853. Baptisée depuis 2003 par les autorités "Fête de la citoyenneté", cette date était considérée par les indépendantistes comme "jour de deuil du peuple kanak" et pourrait être marquée par un regain de violence.



Trois mois après de violentes émeutes liées à une réforme électorale, la sécurité n'est pas encore totalement rétablie en Nouvelle-Calédonie, archipel français du Pacifique sud toujours soumis à un couvre-feu et asphyxié sur le plan économique.Des affrontements qui continuent

C'est dans la nuit du 13 au 14 mai qu'éclatent les premières...