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Culture - En galerie cette semaine

Le peintre et la sculptrice chez Saleh Barakat

Les sculptures blanches de Nicole Bouldoukian ; la lumière intérieure des toiles d’Oussama Baalbaki. Voilà deux expositions solos à voir d’un coup. Et pour cause, elles sont logées à la même enseigne.

Le peintre et la sculptrice chez Saleh Barakat

« Where to ? », l’une des plus grandes toiles (200 x 300 cm ; 2023) de l’exposition « An Inner Light » d’Oussama Baalbaki chez Saleh Barakat. Avec l’aimable autorisation de l’artiste

Voilà deux artistes qui ont nettement choisi leur camp. Incontestablement celui de la sculpture pour Nicole Bouldoukian. Et définitivement celui de la peinture pour Oussama Baalbaki. La première, une « ancienne de la galerie Épreuve d’artiste », nouvelle recrue de l’écurie d’artistes de Saleh Barakat, a posé ses œuvres abstraites à l’étage supérieur de la galerie beyrouthine, rue Justinien. Tandis que le second, artiste historique de la maison, a pris d’assaut l’intégralité des cimaises de la vaste salle du bas. Tour d’horizon.

La « blanche métamorphose » de Nicole Bouldoukian

Rassemblées sous l’intitulé White Metamorphosis (Blanche métamorphose), les 18 sculptures abstraites totalement blanches de Nicole Bouldoukian sont présentées dans une scénographie immaculée à la Upper Gallery. Une radicalité qui s’harmonise avec celle du geste de cette sculptrice qui a entamé un virage à 180 degrés dans sa pratique ces dernières années.

L'artiste Nicole Bouldoukian devant deux de ses pièces à la Upper Gallery de la galerie Saleh Barakat. DR

Car elle a longtemps façonné des personnages en terre cuite ou en grès (souvent fondus en bronze) sur des thèmes aussi divers que les chevaux, le cirque, la mère et l’enfant, la danse ou encore la lecture… Des silhouettes aux lignes élégantes mais jamais très éloignées d’une certaine figuration classique.

Une sculpture de la série blanche de Nicole Bouldoukian. Avec l’aimable autorisation de l’artiste

Et puis « l’innomable », comme elle dit, a eu lieu un certain 4 août 2020. Cette double déflagration au port de Beyrouth qui a tout fait sauter en éclats, meurtrissant la ville comme les êtres, a fortement ébranlé la douceur de vivre et de créer de Nicole Berjon Bouldoukian. Figée dans la douleur et l’incompréhension, l’artiste française (née en 1945, installée au Liban depuis son mariage en 1969) a d’abord été incapable de reprendre sa pratique sculpturale. Puis celle qui est devenue libanaise a fait comme ses compatriotes : elle a rassemblé ses forces, a repris le chemin de son atelier et s’est attelée au travail. Mais cette fois, ce qui en sort se révélera totalement différent de son registre habituel. Les œuvres abstraites qui naissent de manière presque impulsive sous ses doigts sont faites de compressions, de torsions, de triturations de boîtes en carton… qui donnent, au fil de ses expérimentations, une variété de formes saillantes et dynamiques traduisant de manière inconsciente l’effet de cette « destruction, violente, rapide et dévastatrice » qui s’est abattue sur la capitale libanaise. Élaborées à partir d’un mélange de matériaux inédit chez Bouldoukian : carton, papier, pâte à papier, enduit, cire et huiles, ces pièces, qui offrent sous leurs différents angles une séduction légère et apaisante, tordent le cou à une idée reçue qui voudrait que l’art issu du désastre soit forcément sombre. À découvrir, jusqu’au 22 juin.

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Lumière intérieure sur grand format chez Oussama Baalbaki

« Voilà un artiste qui s’attelle à une toile avec le seul objectif de satisfaire son bonheur intrinsèque de peindre. Il représente tout ce qui peut l’être, sans arrière-pensée, sans chercher à suivre une thématique donnée, avec pour seule ambition d’exprimer au plus près de la vérité sa perception des choses et des êtres qui attirent son attention ou son intérêt », dit à son sujet Saleh Barakat qui l’expose depuis ses débuts dans les années 1990.

Aux antipodes des artistes conceptuels, ce peintre, « ce vrai peintre », balade ainsi son pinceau – aux touches foisonnantes facilement identifiables – au gré de son quotidien et au fil des saisons. Celle de la vie, la sienne comme celle de ses proches, qu’il portraiture épisodiquement… Mais aussi et surtout au fil des panoramas que lui offre ce pays du Cèdre qu’il sillonne depuis des années, inlassablement, constamment en quête de sa lumière.

« A Critical Night », une acrylique sur toile d’Oussama Baalbaki (200 x 200 cm ; 2023). Avec l’aimable autorisation de l’artiste

À commencer par la capitale qu’il « portraiture » à coups de pinceau serrés, avec un réalisme relevé  d’expressionnisme et d’un soupçon d'impressionnisme. Ce Beyrouth dont il capture les lumières, espacées et fragiles, de ville vacillante plongée dans le noir, à travers ses vues en survol, quasi panoramiques, d’immeubles fantomatiques, silhouettes de béton se détachant sur un ciel sombre nimbé de nuages bleutés…

Une toile d’Oussama Baalbaki exposée à la galerie Saleh Barakat. Avec l’aimable autorisation de l’artiste

Mais aussi les lumières, le plus souvent diurnes, celles de l’aube ou du coucher, qui jaillissent des divers autres paysages côtiers ou montagneux qu’Oussama Baalbaki aime surtout reproduire dans des vues à perte d’horizon. Des paysages le plus souvent isolés, vides de toute présence humaine et cependant imprégnés des traces de son existence : autoroutes fendant un bord de mer ; vues d’un tunnel creusé dans le roc ou d’une route serpentant dans la nature…

Mis à part la nouveauté de quelques très grands formats (atteignant les 200 x 300 cm) qui en imposent au regard - notemment un immense portrait de famille, pièce muséale par excellence- , ceux qui connaissent le travail de cet artiste retrouveront dans ces compositions récentes sa patte habituelle, faite d’une prédilection pour les vues en perspective, d'une palette dominée par toutes les nuances de bleu et d'un subtil jeu de lumière qui éclaire de l’intérieur (comme l’indique le titre de cette exposition « An Inner Light ») les divers paysages qu’il donne à voir sur les cimaises de la grande salle d’exposition de la galerie Saleh Barakat, jusqu’au 20 juillet.

Voilà deux artistes qui ont nettement choisi leur camp. Incontestablement celui de la sculpture pour Nicole Bouldoukian. Et définitivement celui de la peinture pour Oussama Baalbaki. La première, une « ancienne de la galerie Épreuve d’artiste », nouvelle recrue de l’écurie d’artistes de Saleh Barakat, a posé ses œuvres abstraites à l’étage supérieur de la galerie beyrouthine, rue Justinien. Tandis que le second, artiste historique de la maison, a pris d’assaut l’intégralité des cimaises de la vaste salle du bas. Tour d’horizon. La « blanche métamorphose » de Nicole Bouldoukian Rassemblées sous l’intitulé White Metamorphosis (Blanche métamorphose), les 18 sculptures abstraites totalement blanches de Nicole Bouldoukian sont présentées dans une scénographie immaculée à la Upper Gallery. Une...
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