L'UE approuve la fusion des activités espagnoles de Orange et MasMovil

La consolidation du marché européen des télécoms marque un point: Bruxelles a autorisé mardi la fusion des activités espagnoles des opérateurs Orange et MasMovil, après avoir obtenu qu'ils cèdent une partie de leur réseau mobile à leur concurrent Digi.

Les conditions imposées aux deux opérateurs « répondent pleinement aux problèmes de concurrence » qui avaient été identifiés et « préserveront un marché des télécommunications concurrentiel en Espagne, tant en termes de prix que de qualité, ainsi qu'en termes de déploiement du réseau 5G, dans l'intérêt des consommateurs », a indiqué la Commission européenne.

Orange et MasMovil avaient annoncé en juillet 2022 leur intention de fusionner leurs activités en Espagne dans une coentreprise détenue à parts égales, alors qu'ils sont respectivement deuxième et quatrième opérateurs parmi les plus importants sur ce marché.

Mais la Commission européenne avait ouvert une enquête approfondie sur cette opération en avril 2023, craignant des effets négatifs « considérables » pour la concurrence si elle aboutissait à réduire de quatre à trois le nombre d'opérateurs dans le pays, avec notamment de possibles « hausses de prix substantielles ».

Pour répondre aux préoccupations de la Commission, gendarme de la Concurrence dans l'UE, le groupe français Orange et l'espagnol MasMovil se sont engagés à céder certaines fréquences à Digi, un opérateur virtuel concurrent qui sera ainsi en mesure de construire son propre réseau mobile.

Par ailleurs, Digi pourra bénéficier d'un accord d'itinérance lui permettant d'utiliser en complément le réseau de Orange/MasMovil, une clause essentielle dans la mesure où le sien devrait s'avérer insuffisant pour couvrir la totalité du territoire espagnol.

Cet accord reste néanmoins facultatif, Digi conservant la possibilité de rester avec son fournisseur actuel, Telefonica, ou de choisir l'autre grand opérateur présent en Espagne, Vodafone.

« Ce feu vert de la Commission européenne représente une avancée majeure pour le développement du groupe en Europe », a salué la directrice générale d'Orange, Christel Heydemann. « L'union des forces d'Orange et MasMovil nous permettra d'atteindre la taille critique pour innover et d'investir pour l'avenir », a-t-elle affirmé.

Échec d'Iliad en Italie

Orange et MasMovil prévoient de finaliser la transaction d'ici à la fin du premier trimestre 2024.

L'entité combinée, dont l'excédent brut d'exploitation après loyers (principal indicateur de rentabilité du secteur) est estimé à plus de 2,3 milliards d'euros et le chiffre d'affaires à plus de 7,4 milliards d'euros, comptera plus de 30 millions de clients du mobile, selon les deux entreprises.

Si ce feu vert de Bruxelles est « une bonne nouvelle » pour Orange et MasMovil, « on est loin d'une révolution », souligne auprès de l'AFP Sylvain Chevallier, spécialiste en télécoms et associé du cabinet de conseil Bearing Point.

« C'est un peu du +en même temps+: il y a une porte ouverte pour une certaine consolidation au niveau des pays, mais il y a un souhait réaffirmé de maintenir une assez forte intensité concurrentielle nationale » au bénéfice du consommateur, ajoute-t-il.

L'opération s'inscrit dans un contexte où plusieurs responsables d'opérateurs européens ont appelé à la consolidation du marché sur le continent pour réduire la concurrence et accroître leur rentabilité, à l'heure où ils investissent lourdement dans le déploiement de la 5G et la fibre optique.

En Italie, autre marché européen fragmenté, Iliad, propriété de l'homme d'affaires français Xavier Niel, a fait une nouvelle offre de rachat de son concurrent Vodafone Italia en décembre. Une proposition rejetée fin janvier, après une première approche repoussée en février 2022.

La maison mère de l'opérateur Free avait alors offert de racheter Vodafone Italia (deux fois plus gros qu'Iliad Italia) pour 11,25 milliards d'euros, mais le groupe britannique avait refusé.

« Nous avons interrompu les discussions avec Iliad, tandis que les pourparlers avec d'autres parties se poursuivent », a indiqué Vodafone dans un communiqué fin janvier.

Selon la presse, l'opérateur suisse Swisscom serait sur les rangs, alors que les tarifs d'abonnements en Italie, où quatre acteurs majeurs sont présents, affichent les niveaux les plus bas des grands marchés occidentaux.

Le forfait mobile à 100 Go minimum le plus compétitif des opérateurs italiens est à 13 euros par mois, selon une étude du cabinet Arthur D. Little. A titre de comparaison, en Espagne, où il y a une myriade d'opérateurs, il est à 20 euros par mois, contre 40 euros en Allemagne.