Rechercher
Rechercher

Culture - Design

Le clan des quatre des Éditions (mobilières) Levantine

Ils conjuguent travail et amitié dans des créations à la fantaisie assumée. Quatre talents produisent au Liban un nouveau label mobilier à découvrir.

Le clan des quatre des Éditions (mobilières) Levantine

Les quatre designers d'Éditions Levantine, de gauche à droite : Guilaine Élias, Suzanne Anhoury, Dalia Husseini et César el-Hayeck. DR

Ils sont quatre. Trois filles et un garçon : Guilaine Élias, Dalia Husseini, Suzanne Anhoury et César el-Hayeck. Ils se sont rencontrés en fac d’architecture intérieure à l’ALBA, sont devenus amis, en sont sortis diplômés en 2009. Et, après leurs spécialisations dans différentes branches du design suivies d’expériences professionnelles à l’étranger, ils se sont retrouvés autour d’une même envie de travailler ensemble et de créer, à partir du Liban, leur propre label d’objets et meubles design.

Ils pourraient aisément s’approprier la devise des trois mousquetaires « Tous pour un et un pour tous », ces quatre designers trentenaires qui ont mis en commun leur créativité et leurs compétences dans un projet de production mobilière placée sous le signe de la fantaisie, de la qualité et de la célébration d’une identité levantine contemporaine.

De la série des Bulbul, lignes épurées et rondeurs et couleurs douces. Photo DR

Car ce qui les anime, c’est de défricher de nouvelles voies, d’imaginer des façons différentes d’aborder le design mobilier. Et trouver les figures, les formes, les combinaisons de matières et de couleurs dans lesquelles ils exprimeront le mieux ce qui caractérise le patrimoine levantin, duquel ils se réclament.

Le syndrome de l’expatrié

C’est dans le sillon de la tragédie du 4 août 2020 qu’est née leur aventure commune il y a deux ans. Avant cette date fatidique, Suzanne (titulaire d’un master en design for social impact du Paris College of Art) et César (qui s’était spécialisé, lui, en set design à l’Université de Toronto) partageaient un petit espace de travail à Mar Mikhaël. « C’était notre studio à tous les deux, à partir duquel chacun de nous menait ses propres projets », indique la jeune femme. L’explosion au port de Beyrouth va détruire le studio. Ébranlée émotionnellement, Suzanne quitte le pays avec son mari pour s’installer en France, tandis que César, qui travaillait déjà sur des scénographies de théâtre et de cinéma au Canada, décide d’y rester de manière permanente.

Mais, à l’étranger, « le syndrome de l’expatrié » les rattrape. « En fait, c’est quand on s’éloigne de notre terre natale qu’on commence à se poser des questions sur nos racines, notre identité… D’autant qu’on se rend compte que les gens ont du mal à nous définir quand on parle du Liban. On plonge alors dans la lecture d’Amin Maalouf. On essaie de déterminer notre spécificité, cette multiculturalité qui nous rend ni tout à fait orientaux ni par ailleurs occidentaux. Et on arrive finalement à la déduction que nous sommes des Levantins, les habitants d’une région à la croisée des deux mondes », relate à L’OLJ Suzanne qui s’exprime au nom du groupe.

Lire aussi

Le retour du design au Beirut Art Center

Cette nostalgie identitaire, couplée à l’indomptable esprit entrepreneurial libanais, va faire naître justement chez cette dernière l’envie d’élaborer un design autour des thématiques issues de ce patrimoine proche-oriental dit levantin. Une production mobilière qui se ferait à partir du Liban et contribuerait ainsi à la reprise de la création artisanale locale fortement impactée par la crise.

Depuis Paris, Suzanne Anhoury bat le rappel de son clan d’amis d’université pour relancer l’activité de son studio à Mar Mikhaël. Une fois restauré, elle y installera l’enseigne d’objets et mobiliers design qu’elle produit, depuis fin 2022, en collaboration avec César el-Hayeck (qui, comme elle, fait de fréquents retours au Liban), Guilaine Élias (titulaire d’un master en design de produits de luxe à l’ECAL, en Suisse), et Dalia Husseini sous le label Éditions Levantine.

Avec cette fine équipe, « composée de personnes issues d'horizons divers (deux vivant à l’étranger et deux à Beyrouth) qui apportent chacune son expérience, ses références, ses idées et ses croquis », une première sélection de produits prend forme, à partir essentiellement d’un travail de marqueterie de bois appliqué.

Ce qui peut sembler une variation sur une tendance déjà largement exploitée par les designers libanais – et dont Nada Debs est la cheffe de file – prend chez ces quatre talents une tournure différente. Assez inédite. Car, plutôt que de favoriser les traditionnelles incrustations de nacre et de cuivre, les 4 compères vont privilégier dans leurs créations des applications de bois coloré. Découpée (au laser) en motifs libres dans une palette de couleurs claires et toniques, cette marqueterie d’une rafraîchissante fantaisie s’accorde parfaitement aux formes d’une grande originalité qu’ils donnent à leurs conceptions de pièces mobilières. À l’instar de cette petite table d’appoint, baptisée Kan, à la silhouette assemblant diverses formes en bois sculptées et marquetées, celle-ci faisant référence aussi bien aux colonnades des civilisations antiques qu’aux configurations d’une modernité totale…

Table basse Kan, en bois naturel incrusté au laser de pépites de bois colorées. Photo DR

Ces Bulbul, Safar, Chams et autres produits…

En moins de deux ans, naîtront ainsi chez Éditions Levantine diverses séries, toutes issues d’une interprétation nouvelle des éléments qui forment le paysage naturel et mental spécifique au Levant. À commencer par ce fameux Bulbul, oiseau chanteur typique de la région, devenu l’un des éléments phares de ce label. Une sculpture – à l’usage de cale-livres ? – épurée, élégante et dispensatrice de bonne humeur, reprenant la silhouette d’un oiseau en bois clair posé sur un globe en bois teinté, disponible dans une variété de tonalités claires et lumineuses… Comme le ciel du Levant.

Suivront ensuite des lignes baptisées Safar, Shams, Matar, Daliah ou encore Hyam (qui est une variation du mot amour). Autant de thèmes qui naissent le plus souvent par un dessin paysager aux tracés retranscrits, par la suite dans des matières nobles, avec une prédilection pour le bois, avec parfois des combinaisons de marbre, bois, cuivre, laiton, miroir et feuille d’or…

Un coin de la table Shams dont le motif représente la dualité du soleil se couchant sur la mer et se levant des montagnes. Photo DR

Tables à motif graphique hautes ou basses, consoles organiques ou chaises dénuées de tout angle droit, mais aussi bibelots et éléments d’art de la table : plateau de service, sous-plat et sous-verre d’une luxueuse fantaisie… Les conceptions des quatre créatifs sont « toujours réalisées par des artisans locaux parfaitement qualifiés, dans des techniques traditionnelles auxquelles nous insufflons une pertinence contemporaine », précisent ces trentenaires doués qui partagent ainsi, à travers leurs beaux objets du quotidien, leur vision d’une « levanité »/« libanité » moderne, heureuse, résiliente et revendiquée…

Ils sont quatre. Trois filles et un garçon : Guilaine Élias, Dalia Husseini, Suzanne Anhoury et César el-Hayeck. Ils se sont rencontrés en fac d’architecture intérieure à l’ALBA, sont devenus amis, en sont sortis diplômés en 2009. Et, après leurs spécialisations dans différentes branches du design suivies d’expériences professionnelles à l’étranger, ils se sont retrouvés...

commentaires (1)

Vive le Levant libre

Koïnè

12 h 40, le 06 février 2024

Tous les commentaires

Commentaires (1)

  • Vive le Levant libre

    Koïnè

    12 h 40, le 06 février 2024

Retour en haut