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Sport - Basket

La saison reprend, au Liban, comme si de rien n’était… du moins en apparence

L’influence de la guerre aux portes du Liban se ressent différemment en fonction des terrains, alors que des menaces proférées à l’encontre des joueurs de Riyadi ont contraint à l'annulation d’un match amical contre Beirut Club à Zouk la semaine dernière.

La saison reprend, au Liban, comme si de rien n’était… du moins en apparence

Les joueurs de Sagesse écoutant l'hymne du club entonné par leurs supporters en amont de la première rencontre de championnat de basket libanais le 26 octobre. Photo G.B.

« Pour l’instant, on continue comme d’habitude en espérant que la situation n’empire pas. De toute façon, qu’est-ce qu’on peut faire d’autre ? ». C’est avec un certain fatalisme que Charbel Rizk s’étend sur la reprise de la saison régulière de basket. Après cinq longs mois d’attente, comblés fort heureusement par le parcours de l’équipe nationale sur les terrains de la Coupe du Monde, la Lebanese basketball League reprend ses droits non sans l’impression d’effectuer un saut dans l’inconnu, alors que la guerre est aux portes du Liban en raison du conflit en cours entre Israël et le Hamas et au regain de tensions à la frontière libano-israélienne.

« Il était inconcevable de reporter la saison ou de prendre des mesures préventives, reprend le secrétaire général de la Fédération. Toutes les équipes sont prêtes à jouer. Comment voulez-vous demander à des centaines de joueurs et d’entraîneurs de rester chez eux alors que, jusqu’à maintenant, rien ne nous empêche de jouer au basket », avance-t-il.

Tel est le mot d’ordre passé aux dix équipes au départ de ce nouvel exercice par l’état-major du basket libanais. Pour marquer le coup, ce dernier s’est réuni en fin de semaine dernière à Ghazir afin d’assister au coup d’envoi officiel de la saison entre Sagesse et Antounieh, dans un stade Antoine Choueiri toujours aussi bien garni. « C’est une belle affluence pour un premier match, assure Dany, qui tient la billetterie. On sent que les gens sont vraiment heureux d’être de retour ici ».

Victime collatérale

« Je pense que cette année, ce sera la bonne, affirme Fouad, un supporter de longue date venu avec Walid, son fils de huit ans, tout de vert vêtu. L’élimination en demi-finale la saison passée (contre Riyadi, ndlr) a été très frustrante. Et cela va faire 20 ans que nous attendons de voir Sagesse soulever à nouveau le titre ! », rabâche-t-il.

Sauf que derrière cette apparente normalité se cache un tracas que nombreux partagent au sortir du stade : combien de temps tout cela pourra-t-il durer ? « Il y a beaucoup d’enthousiasme (hamas, en arabe) parmi le public, et on espère que l’autre Hamas ne va pas nous priver de notre passion et nous conduire dans une nouvelle guerre », plaisante Georges après avoir célébré la nette victoire des hommes de Jad el-Hajj (84-60), le sélectionneur national qui vient de rejoindre le banc de Hekmeh quelques semaines plus tôt.

Jad el-Hajj lors de sa première en tant qu'entraîneur de Sagesse. Photo G.B.

« Quand on regarde Sagesse jouer, on oublie tout le reste. C’est notre échappatoire, notre respiration au milieu de tous ces problèmes qui plombent le pays », abonde Joanna qui espère ne pas revivre une nouvelle saison blanche comme en 2019-2020. Une trêve forcée par les événements qui se sont abattus sur le Liban à l’époque, de la révolution (Thawra) à l’explosion du 4 août en passant par la pandémie de Covid-19 : « Dès le premier jour de la thawra, le 17 octobre, nous avions dû annoncer la suspension du championnat, se remémore Charbel Rizk. Ce jour-là, il y avait un match entre Riyadi et el-Mouttahed (le club de Tripoli, ndlr) à Manara, et les joueurs avaient mis plus de quatre heures pour remonter jusqu’à Tripoli. Toutes les routes étaient bloquées autour de Beyrouth et les conditions de sécurité n’étaient plus réunies pour permettre de jouer au basket dans de bonnes conditions », détaille-t-il.

Victime collatérale des troubles sécuritaires du pays du Cèdre, le monde du basket et l’ensemble du sport libanais se retrouvent à nouveau suspendus à la tournure que prendront les événements, alors que le leader du Hezbollah, Hassan Nasrallah, prendra la parole vendredi pour la première fois depuis le début de ce conflit.

« Voice » menaçant

Ainsi, depuis le 7 octobre, le conflit s’invite chaque jour un peu plus sur le sol libanais. À tel point qu’un match amical entre Riyadi et Beirut Club, qui devait avoir lieu mercredi dernier sur le terrain du stade Nouhad Naufal de Zouk Mikael, a dû être annulé par mesure de précaution.

La faute à un message vocal envoyé sur une boucle WhatsApp par quelqu’un se présentant comme un « mokhtar » de cette localité. Dans ce voice, l’auteur profère notamment des menaces contre les joueurs de Riyadi et leurs supporters en insistant sur le fait qu’il valait mieux que ces derniers « ne viennent pas chez nous ». Ce message d’avertissement aurait été motivé par la volonté supposée de certains supporters du club de Manara de se rendre sur place munis de drapeaux palestiniens.

Les joueurs et l'entraîneur de Riyadi arborant des keffiehs palestiniens en guise de solidarité avec les victimes des bombardements à Gaza. Source : Compte Instagram de Riyadi

« On voulait jouer ce match malgré tout, affirme Mazen Tabbara, président de Riyadi. Mais la Fédération et les services de renseignement avaient apparemment des données sur l’existence d’un risque sécuritaire autour du match. On nous a assuré qu’une enquête sera ouverte pour identifier l’auteur de ce voice », précise-t-il, avant d’ajouter que le club continuera à rendre hommage aux victimes à sa manière. « Tout ce qu’on voulait, c’était avoir une pensée pour les gens à Gaza. On est là pour le sport, pas pour mettre de l’huile sur le feu, même s’il est vrai que l’on doit faire très attention à tout ce qu’on dit dans une telle situation », martèle-t-il. « Je regrette qu’on ne puisse pas faire un simple geste de solidarité et véhiculer un message de paix comme cela se fait dans plein d’autres stades dans le monde », conclut-il.

En attendant qu’une enquête soit ouverte, chose que la Fédération n’a pas souhaité commenter, Riyadi a retrouvé à son tour le chemin des terrains ce lundi à Mayrouba, où les champions en titre se sont imposés sans trembler sur le score de 94-57. La saison est bel et bien lancée et espère suivre son cours autant que faire se peut : « Nous allons continuer normalement tant qu’on le peut, affirme Charbel Rizk. Si nous devons prendre des mesures exceptionnelles, alors nous les prendrons, comme nous l’avons toujours fait ».

« Pour l’instant, on continue comme d’habitude en espérant que la situation n’empire pas. De toute façon, qu’est-ce qu’on peut faire d’autre ? ». C’est avec un certain fatalisme que Charbel Rizk s’étend sur la reprise de la saison régulière de basket. Après cinq longs mois d’attente, comblés fort heureusement par le parcours de l’équipe nationale sur les terrains...

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