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Idées - Turquie

En Syrie, casse-tête en vue pour Ankara

En Syrie, casse-tête en vue pour Ankara

Des manifestants syriens se rassemblent pour protester contre le groupe jihadiste Hay’at Tahrir al-Sham (HTS) dans la ville frontalière d’Azaz, dans le nord de la province d’Alep tenu par les rebelles, le 21 octobre 2022. Omar Haj Kadour/AFP

Les élections générales en Turquie sont maintenant terminées, ce qui devrait apporter plus de clarté quant à la manière dont Ankara traitera la situation en Syrie dans les mois à venir. Alors que certains ont suggéré que la réélection du président Recep Tayyip Erdogan pourrait signifier un maintien du statu quo dans sa politique étrangère, la relation de la Turquie avec les acteurs non étatiques dans le nord de la Syrie apparaît comme une variable susceptible d’évoluer.

Cela s’explique notamment par les revirements de politique étrangère quelque peu déconcertants auxquels la Turquie s’est livrée au cours des deux dernières décennies. L’approche turque a connu des évolutions répétées, depuis sa politique « Zéro problème avec les voisins » jusqu’à l’implication active, à partir de 2011, dans le soutien aux soulèvements arabes, notamment en Syrie. En outre, ce que beaucoup assimilaient à une forme de néo-ottomanisme – l’expansion économique, culturelle et politique de la Turquie dans les anciennes terres ottomanes – a été remplacé aujourd’hui par une politique étrangère plus opportuniste et pragmatique. Ces derniers mois, l’administration d’Erdogan a cherché à normaliser les relations avec l’Égypte, la Syrie, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, après des années d’antagonisme. Cette tendance va probablement se poursuivre, notamment en Syrie. Mais c’est aussi là que les difficultés du président turc risquent de s’accroître.

Manœuvrer prudemment

En effet, Erdogan pourrait bien se retrouver coincé entre l’humeur de l’électorat turc et celle de la population syrienne hostile au régime Assad dans les régions du nord du pays non contrôlées par Damas. Le fait qu’il ait dû passer par deux tours de scrutin pour être réélu suggère que de nombreux électeurs turcs souhaitaient un changement de politique à l’égard de la Syrie, en particulier en ce qui concerne les réfugiés, et il est donc peu probable qu’Erdogan revienne sur ses efforts de normalisation avec Damas – surtout dans le contexte économique morose actuel. En outre, ce pragmatisme n’est que renforcé par les intentions d’Ankara de poursuivre son rôle d’équilibre dans la région à travers ses relations avec la Russie et les États-Unis d’une part, et l’Iran et l’Arabie saoudite d’autre part.

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En ce qui concerne la Syrie, tout rapprochement avec Damas obligera Erdogan à manœuvrer prudemment entre le régime Assad et l’opposition syrienne. Tout au long du mois dernier, Hay’at Tahrir al-Sham (HTS), l’ancien front al-Nosra, et l’Armée nationale syrienne (ANS), une coalition de groupes d’opposition armés étroitement liée à la Turquie, ont rejeté la normalisation des relations entre la Ligue arabe et le régime d’Assad. Le chef de HTS, Abou Mohammad al-Jolani, a suggéré que l’approche militaire était la seule option viable pour résoudre le conflit syrien, tandis que la direction de l’ANS a qualifié le processus de normalisation de « criminel » pour l’opposition et le peuple syriens. L’opposition du gouvernorat d’Idleb et d’autres régions de Syrie où la Turquie est présente s’inquiète du rapprochement de la Turquie avec Assad, car Ankara la soutient depuis longtemps dans son combat.

Tensions accrues

Cependant, les répercussions de cette inquiétude vont au-delà et pourraient affecter le contrôle final d’Idleb. La situation dans les gouvernorats du nord de la Syrie est critique, car les tensions se sont accrues entre l’ANS et HTS pour la direction de l’opposition anti-Assad à Idleb. Les acteurs non étatiques, armés par Ankara ou Téhéran, sont devenus des acteurs majeurs du conflit syrien qui ont construit leurs identités et leurs croyances idéologiques respectives. Par exemple, dans le cas de HTS, beaucoup ont remarqué que Jolani a cherché à se présenter comme un leader flexible, et non comme un extrémiste jihadiste, malgré les antécédents de son organisation en tant que branche d’el-Qaëda. Son objectif semble être d’affirmer que HTS peut gouverner Idleb, tout en projetant l’image d’un dirigeant qui est un véritable acteur dans le conflit syrien et quelqu’un de fréquentable pour les États occidentaux.

Parallèlement, les tensions se sont accrues au sein de l’ANS. En raison d’une fragmentation constante, la force est devenue peu fiable et faible face à HTS, ou même aux Forces démocratiques syriennes dominées par les Kurdes. HTS a exploité ce désarroi en imposant sa volonté et sa structure administrative à la population d’Idleb. Ainsi, tout processus de normalisation entre Ankara et Damas devra prendre en compte ces acteurs non étatiques, dont la présence constitue un obstacle à l’intégrité territoriale de la Syrie.

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Cela a donné l’occasion à Jolani de rallier des soutiens à son propre groupe et de lancer des attaques contre tous ceux qui s’opposent à lui, dans le but de prendre le contrôle de la région et de devenir un interlocuteur majeur dans tout dialogue futur sur le conflit syrien. Du point de vue d’Ankara, il y a quelque chose de positif dans le fait que de nombreux habitants d’Idleb – les notables locaux, les chefs tribaux et la population dans son ensemble – rejettent Jolani et HTS, les considérant au mieux comme un moindre mal. Cette réaction contribuera à créer un équilibre dans le Nord, car les opposants de HTS ont appelé l’opposition à s’unir autour d’un programme commun de mise en œuvre de la résolution 2254 du Conseil de sécurité, qui exclut les organisations telles que l’ancien front al-Nosra et l’EI de tout processus politique et appelle à une transition en Syrie sous la supervision des Nations unies.

Cette situation peut créer des complications pour Erdogan s’il continue à normaliser avec Damas. Türkiye devrait non seulement traiter avec le régime d’Assad, mais aussi avec HTS et ses propres alliés présumés à l’intérieur de la Syrie.

Par Kevork YACOUBIAN

Assistant chercheur au Malcolm H. Kerr Carnegie Middle East Center.

Les élections générales en Turquie sont maintenant terminées, ce qui devrait apporter plus de clarté quant à la manière dont Ankara traitera la situation en Syrie dans les mois à venir. Alors que certains ont suggéré que la réélection du président Recep Tayyip Erdogan pourrait signifier un maintien du statu quo dans sa politique étrangère, la relation de la Turquie avec les acteurs...
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VOTRE PHOTO : CETTE PIÈCE D’ÉTOFFE juste à côté DU DRAPEAU TURC ? IL est là, accroché, pour remplacer les COULEURS DE DAESH ? IL A ÉTÉ MENTIONNE il y a quelques jours que DAESH faisait une nouvelle apparition surtout du côté de RAQQA , NORD SYRIE OU INÉVITABLEMENT SE TROUVE UNE PRÉSENCE ILLÉGALE AMÉRICAINE ! Nouvelle tactique : Changement de couleur ???

aliosha

12 h 29, le 03 juin 2023

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Commentaires (1)

  • VOTRE PHOTO : CETTE PIÈCE D’ÉTOFFE juste à côté DU DRAPEAU TURC ? IL est là, accroché, pour remplacer les COULEURS DE DAESH ? IL A ÉTÉ MENTIONNE il y a quelques jours que DAESH faisait une nouvelle apparition surtout du côté de RAQQA , NORD SYRIE OU INÉVITABLEMENT SE TROUVE UNE PRÉSENCE ILLÉGALE AMÉRICAINE ! Nouvelle tactique : Changement de couleur ???

    aliosha

    12 h 29, le 03 juin 2023

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