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Lifestyle - Rencontre

Raya Abirached : explorer le grand écran par le petit

Cinéphile dans l’âme, Raya Abirached est, depuis près de 25 ans, la madame cinéma de la chaîne panarabe MBC. L’ascension de cette journaliste libanaise a d’abord intrigué, avant d’être saluée. Pour « L’Orient-Le Jour », l’animatrice retrace sa carrière jalonnée de rencontres et étaye sa vision de la célébrité et l’impact qu’elle peut avoir dans la région.

Raya Abirached : explorer le grand écran par le petit

Raya Abirached, figure incontournable de la MBC. Photo Vogue Arabia/DR

En mai 1997, Raya Abirached a tout juste 20 ans et tente d’oublier le chaos de Beyrouth le temps d’absorber quelques rayons de soleil azuréen. À la veille du nouveau millénaire, le Festival de Cannes fête ses 50 ans. Un demi-siècle de glamour, de cinéma et d’excès célébré en grande pompe sur une Croisette beaucoup moins sage qu’aujourd’hui. Entre la présence houleuse de Michael Jackson, les paillettes dispersées au vent par le couple Demi Moore-Bruce Willis et toutes les autres extravagances qui caractérisent cette manifestation culturelle légendaire, une jeune Beyrouthine essaie de se frayer un chemin dans cet univers qui lui paraissait alors inaccessible. « Je montais les marches tous les soirs pour voir les stars, pour les admirer de loin », se remémore Raya Abirached, journaliste débutante faisant alors ses preuves entre la MTV et Radio Mont-Liban (RML). Ces tapis rouges seront les premiers d’une longue série pour celle qui réussit à créer un style de divertissement inédit à la télévision arabe. Pour en arriver là, elle a dû affronter critiques et scepticisme : « certaines personnes pensaient que mes interviews étaient fabriquées de toutes pièces, chez moi, dans ma chambre… Je ne suis pas une assez bonne monteuse pour ça ! » À 46 ans, Raya Abirached, qui n’a plus rien à prouver à ce sujet, en a vu défiler des icônes, sur des plateaux de télévision comme dans les coulisses d’une vie qu’elle s’est créée au prix d’un exil pas toujours facile.

Raya Abirached en compagnie de Will Smith. Photo DR

L’ambition avant tout

Dans les salles de cinéma de Beyrouth, qui n’ont pas fermé pendant la guerre civile, Raya Abirached, comme tant d’autres enfants de la même génération, tente de s’échapper de la réalité du pays. « Quand la situation le permettait, je courais au centre Sofil pour regarder les films à l’affiche. Le cinéma a été mon évasion, ma bulle. Là où je me sentais le mieux », explique-t-elle. « Je suis toujours affectée par les traumatismes nés de ce conflit sanglant et attristée par la situation du Liban », dont elle admet s’être éloignée sans pour autant le renier. « Le déni est quelque chose de commun chez nous. Il ne faut pas oublier d’où l’on vient, mais il faut aussi accepter le fait que le Liban nous fait autant de mal que de bien. Je n’ai pas honte de le dire. » En 1999, Raya Abirached quitte Beyrouth et pose ses valises à Londres pour poursuivre ses études en journalisme. Un an plus tard, elle intègre les locaux de la MBC, chaîne de télévision saoudienne basée au centre de la capitale britannique, et ne les quittera plus.

Pour mémoire

Raya Abirached : Je n’échangerai pour rien au monde ma place de présentatrice TV

La jeune femme ne cache pas ses ambitions et représente aux yeux des dirigeants du grand média comme des téléspectateurs une nouvelle génération d’animateurs moins raides, plus chaleureux et spontanés. « J’ai toujours été à l’aise avec les caméras. Ce qui me plaît, c’est le fait de ne pas jouer un rôle. Devant les projecteurs, je ne peux être que moi-même », confie, sans prétention, l’animatrice qui peut désormais se vanter d’une longévité rare sur le petit écran. Avant de devenir un visage presque familier de la région, Raya Abirached enchaînait déjà les avant-premières et les cérémonies de récompenses internationales. Elle se souvient avec émotion du moment où, pour la première fois, elle sent le succès l’effleurer. « Mon premier grand tapis rouge en tant qu’intervieweuse était aux Oscars en 2001. J’étais devant tous ces acteurs, je réalisais mon rêve », raconte-t-elle. Sa maman, qui suit la cérémonie depuis son salon d’Achrafieh, lui lance un petit commentaire digne de toutes les matriarches du pays : « Elle a critiqué mon bandeau alors que j’étais à Los Angeles, à Hollywood parmi les plus grands ! » Difficile pour Raya Abirached, comme beaucoup de passionnés d’art et de cinéma dans la région, de faire accepter et comprendre sa profession à ses parents. « Ils ont pris du temps à être fiers de moi car je ne faisais pas quelque chose de traditionnel », rapporte-t-elle, tout en insistant sur l’amour inconditionnel et le regard protecteur avec lesquels elle a grandi.

Avec Tom Cruise. Photo DR

Transmission de passions

Dans les années 2000, Raya Abirached se fait connaître au travers d’une émission qui bouscule les émissions télévisées sur le cinéma dans le monde arabe. Avec Scoop with Raya, la journaliste va à la rencontre d’acteurs, scénaristes et cinéastes aux quatre coins du monde. Avec des invités stars comme Brad Pitt, Beyoncé, George Clooney ou encore Clint Eastwood, pour n’en citer qu’une poignée. Témoin privilégiée de l’évolution d’Hollywood et de ses mœurs, elle regrette aujourd’hui cette vision nouvelle autour de la notion de célébrité. « La dernière génération de vraies stars est en train de disparaître. Maintenant, on est plus sur du people », juge-t-elle en revenant sur ce phénomène de la soif de gloire, introduit par les réseaux sociaux. « Depuis quelque temps, on ne veut plus voir une star, on veut en devenir une. Tout le monde pense que la célébrité est accessible », déplore-t-elle. Sans jamais écorner son image appréciée de girl next door, Raya Abirached évoque la fascination souvent malsaine qu’a le monde arabe vis-à-vis de ces stars, tout en saluant la transformation du milieu cinématographique au Moyen-Orient, en pleine expansion et enfin reconnu. « Il y a un souffle nouveau dans la région, un soutien aux jeunes cinéastes qui n’existaient pas il y a encore quelques années. Le Liban a eu deux nominations consécutives aux Oscars récemment, c’était quelque chose d’impensable à mes débuts ! »

Raya Abirached, experte en cinéma et tapis rouges. Photo DR

Le fond avant la forme

Alors que le pays se questionne et se fissure sur la question des réfugiés, Raya Abirached revendique ses engagements. Nommée ambassadrice de l’UNHCR, l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, elle reste, malgré le glamour qu’elle consomme quasi quotidiennement, une philanthrope qui s’affiche. « Interviewer Julia Roberts, c’est génial, mais j’ai tout autant de respect pour des Souad et des Sahar, des bénévoles venant en aide aux réfugiés et aux personnes en difficulté au Liban. » Entre deux réflexions sur l’importance de la représentation sur les écrans, Lola, 7 ans, sa fille unique, vient interrompre l’entretien un court instant. « J’ai toujours su que je voulais un seul enfant. Ma carrière, qui est finalement mon second bébé, est très importante, et je souhaite garder cette balance », souligne-t-elle, se confiant sur cet instinct maternel et le lien fusionnel qu’elle cultive avec Lola. « Je lui donne plus que je n’avais. » La petite Raya a trouvé un moyen de se rendre heureuse. Enfin.

En mai 1997, Raya Abirached a tout juste 20 ans et tente d’oublier le chaos de Beyrouth le temps d’absorber quelques rayons de soleil azuréen. À la veille du nouveau millénaire, le Festival de Cannes fête ses 50 ans. Un demi-siècle de glamour, de cinéma et d’excès célébré en grande pompe sur une Croisette beaucoup moins sage qu’aujourd’hui. Entre la présence...

commentaires (1)

Bravo Raya Super parcourt!

MOBIUS

03 h 10, le 02 juin 2023

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Commentaires (1)

  • Bravo Raya Super parcourt!

    MOBIUS

    03 h 10, le 02 juin 2023

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