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Moyen-Orient - PORTRAIT/JORDANIE

Hussein ben Abdallah, prince réformateur ?

Les festivités s’annoncent grandioses pour le mariage de Hussein ben Abdallah avec la Saoudienne Rajwa al-Saïf. Le dauphin est perçu comme un réformateur, mais loin d’être un révolutionnaire.

Hussein ben Abdallah, prince réformateur ?

Le prince héritier jordanien Hussein ben Abdallah et Rajwa al-Saïf au Palais Zahran. Photo AFP

Ce jeudi 1er juin, un grand nombre de Jordaniens pourraient avoir les yeux rivés sur ce qu’on annonce comme la plus grande célébration royale de l’année dans la région : le mariage du prince héritier Hussein ben Abdallah. La Jordanie n’avait pas connu d’union royale de cette ampleur depuis 30 ans, avec celle du roi Abdallah II avec la reine Rania en 1993. Comme son père et son grand-père avant lui, c’est au Palais de Zahran à Amman que le prince Hussein épousera Rajwa al-Saïf liée par sa mère à la famille régnante saoudienne.

De nombreux invités de marque sont attendus, à commencer par des têtes couronnées d’Europe, du Japon ou encore la Première dame américaine Jill Biden. Plusieurs célébrations ont déjà eu lieu et vont continuer à ponctuer cette semaine festive dans le pays : concert à Amman, spectacle de drones dans le ciel, cérémonie du henné pour la mariée, ou encore banquet organisé par le roi Abdallah II. Les décorations dans la ville, la retransmission de l'événement en direct à la télévision, le jour du mariage déclaré férié… Tout est prévu pour qu’aucun Jordanien ne rate une minute de cette célébration. Les rues de la capitale seront même en partie bloquées jeudi et verront défiler les jeunes mariés, escortés par un cortège de jeeps rouges.

Un enfant brandit une affiche du prince héritier jordanien Hussein ben Abdallah et de sa fiancée Rajwa Al-Saif, au cours d'un concert gratuit en l'honneur du couple royal au stade international de Amman, le 29 mai 2023. Khalil Mazraawi/AFP

Cette cérémonie tient également à montrer la stabilité, malgré quelques écueils ces dernières années pour le royaume hachémite, établi en 1946. Une continuité dans laquelle semble s’inscrire celui qu’on décrit comme humble, joyeux et charmant. « Un modèle positif pour les jeunes Jordaniens », selon Abdelaziz Kilani, écrivain et chercheur spécialiste du Moyen-Orient. Qui est vraiment ce jeune prince de 28 ans qui régnera un jour sur le royaume hachémite ?

Nommé prince héritier à quinze ans

Il aurait pu ne jamais être prince héritier. Hussein ben Abdallah n’a en effet pas toujours été dans la lignée directe de succession au trône. Son grand-père, le roi Hussein ben Talal, à la tête de la monarchie de 1952 à 1999, avait d’abord désigné son frère Hassan comme successeur, avant de changer d’avis 13 jours avant sa mort et donner le statut de successeur au trône à son fils Abdallah, père du prince Hussein. Le roi écarte quant à lui en 2004 son demi-frère Hamza de la succession, rompant une promesse faite à leur père. Le prince Hamza renoncera lui-même formellement à son titre l’an dernier, dans une affaire entourée de soupçons de coercition.

Après quelques années de vacance, Hussein ben Abdallah est ainsi nommé, à 15 ans, prince héritier du royaume jordanien en 2009. Le futur roi s’envole ensuite pour la prestigieuse Université de Georgetown à Washington pour étudier l’histoire. Il suit ensuite les traces de son père et de son grand-père en rejoignant l’académie royale militaire de Sandhurst en Angleterre.

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Selon la Constitution jordanienne, il n'y a pas de véritable rôle assigné au prince héritier du royaume. Les pouvoirs principaux, tels que la désignation du Premier ministre, la ratification des lois et le rôle de chef des armées reviennent au roi.

En tant que dauphin, Hussein opère les fonctions de régent lorsque son père est absent et représente le royaume à l’étranger. « Il n'a pas de devoir particulier à part celui d'être capitaine dans l'armée royale jordanienne. Cependant, le roi Abdallah l'a chargé de représenter la Jordanie lors de certaines réunions de l'ONU et d'autres forums internationaux », affirme Gregory Aftandilian, professeur à l’Université américaine et chercheur non résident à l'Arab Center, à Washington. En 2015, il a 20 ans quand il devient le plus jeune représentant à siéger à une session du Conseil de sécurité de l’ONU. Ses apparitions sur la scène internationale se multiplient, comme en 2017 à l’Assemblée générale de l’ONU où il prononce un discours critiquant l’accent mis sur la militarisation au Moyen-Orient, plutôt que sur le développement des ressources, ou en juillet 2021 lorsqu’il rencontre, avec son père, Joe Biden à la Maison-Blanche.

Hussein ben Abdallah, prononçant un discours devant l'Assemblée générale des Nations unies, le 22 septembre 2017. Jewel Samad/AFP

Une visibilité croissante « impulsée et soutenue par son père », affirme Abdelaziz Kilani. Si le prince héritier accompagne son père à des performances militaires, dans ses activités politiques, il tient également à mener ses propres activités, en particulier avec les jeunes du royaume, dans un pays où 50 % de la population a moins de 25 ans. Lancée en 2015, sa fondation The Crown Prince Foundation vise notamment à promouvoir l’innovation et la créativité au sein de la jeunesse jordanienne. Le roi tient en effet à laisser à son fils son « propre espace » , décrypte Amer al-Sabaileh, universitaire et analyste géopolitique jordanien, confirmant que le prince a réussi à « émerger à l’intérieur du pays comme une figure montante ».

Un prince qui doit encore faire ses preuves

Si Hussein aime se poser en représentant des jeunes, et compte notamment quatre millions d’abonnés sur Instagram, sa vision et ses convictions pour le pays aux onze millions d’habitants restent encore floues. « On ne connaît pas ses tendances politiques ou même sa vision de la Jordanie », affirme Amer al-Sabaileh. Même si pour Gregory Aftandilian, « il est susceptible d'être un réformateur conforme aux aspirations des Jordaniens de sa génération ».

En 2018, alors que des manifestations de masse protestant contre la situation économique dans le pays entraînent la démission du Premier ministre Hani al-Melki, le prince Hussein descend dans la rue et échange avec des manifestants. « Le plus important est de protéger les citoyens et de les laisser exprimer leurs opinions », l’entend-on même dire face à des policiers, dans une vidéo partagée sur les réseaux sociaux à l’époque. De quoi renforcer son image de réformateur, tenant à être au fait des tendances de la jeunesse.

Mais difficile d’imaginer un jour Hussein devenir un révolutionnaire, prêt à ébranler les codes monarchiques du pays. « Il a été formé pour diriger et préserver les institutions de la monarchie hachémite », rappelle Gregory Aftandilian.

Abdallah II de Jordanie, la reine Rania et leur fils, le prince héritier Hussein. Khalil Mazraawi/AFP

S’il reste difficile d’évaluer l’opinion publique dans une monarchie absolue, « la plupart des Jordaniens, à l’exception d’une frange radicale, continuent de soutenir la famille royale jordanienne », fait valoir Gregory Aftandilian. Toutefois, face à la rareté de l’emploi en Jordanie, au taux de chômage touchant près d’un jeune sur deux, et à la corruption dans le pays, la famille royale n’échappe pas aux critiques, et à quelques « grognements de la part de la jeunesse urbaine et éduquée du royaume », nuance-t-il. Des défis face auxquels le jeune prince devra faire ses preuves, et « qui décideront du succès et de l’image du prince héritier », selon Amer al-Sabaileh.

Pour Anas*, Jordanien résidant dans le Golfe, la jeunesse jordanienne attend beaucoup du prince Hussein. « Il est encore jeune et a un grand avenir pour pallier les manques et les difficultés de la Jordanie ». Avant d’ajouter : « Nous espérons que le prince pourra un jour devenir aussi important que Mohammad ben Salmane », se prenant parfois à rêver d’un prince à l’influence internationale.

* Le prénom a été modifié.

Ce jeudi 1er juin, un grand nombre de Jordaniens pourraient avoir les yeux rivés sur ce qu’on annonce comme la plus grande célébration royale de l’année dans la région : le mariage du prince héritier Hussein ben Abdallah. La Jordanie n’avait pas connu d’union royale de cette ampleur depuis 30 ans, avec celle du roi Abdallah II avec la reine Rania en 1993. Comme son père et son...

commentaires (2)

Une question technique, quand vous modifiez un simple prenom, c’est pour quelle raison? Peur de represailles? Ca fait plusieurs fois je me demande…

Bee S

19 h 48, le 31 mai 2023

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Commentaires (2)

  • Une question technique, quand vous modifiez un simple prenom, c’est pour quelle raison? Peur de represailles? Ca fait plusieurs fois je me demande…

    Bee S

    19 h 48, le 31 mai 2023

  • Bonne chance et félicitations

    Eleni Caridopoulou

    19 h 45, le 31 mai 2023

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