Pour la première fois, un film yéménite présenté à la Berlinale

Avec "The Burdened" (les accablés), premier film yéménite à être présenté au Festival de Berlin, le cinéaste Amr Gamal a dit vouloir "ouvrir une fenêtre" sur sa patrie, dans un entretien vendredi à l'AFP.

Dans ce long métrage tourné à Aden, ville dont Amr Gamal est originaire, Isra'a et Ahmed, parents de trois enfants, luttent au quotidien contre la pauvreté qui ravage leur pays. Quand Isra'a apprend qu'elle est enceinte, le couple marié se décide pour un avortement: ils n'ont pas les moyens d'élever un quatrième enfant. Mais la procédure s'avère compliquée dans ce pays de la péninsule arabique profondément religieux et conservateur.

Agé de 39 ans, Amr Gamal, qui a réalisé en 2018 "Dix jours avant le mariage", l'un des rares longs métrages yéménites de ces dernières années, a dit à l'AFP avoir voulu faire ce film pour montrer sa ville au monde.

"J'aime tellement ma ville et je sens qu'elle a besoin d'être montrée --son héritage, ses bâtiments, ses rues, la culture, les vêtements, la nourriture". Son film dévoile les paysages urbains d'Aden avec en arrière plan les montagnes et l'océan, ainsi que des scènes de rues avec d'authentiques habitants.

Dans ce pays dévasté depuis plus de huit ans par un conflit sanglant opposant les combattants pro-gouvernement aux rebelles Houthis, Aden, ville du sud contrôlée par le gouvernement, est devenue sa capitale temporaire après la prise de Sanaa par les Houthis en 2014. Pour réaliser "The Burdened", Gamal a confié avoir été inspiré par un couple qu'il connaissait. "J'étais proche de mon ami et de sa femme. L'idée a germé en moi en les voyant devoir franchir toutes ces étapes", a-t-il dit.

Dans le film, que la Berlinale, premier grand festival européen de cinéma de l'année, présente dans sa sélection "Panorama", le couple a choisi l'avortement, mais la femme a davantage de doutes que son époux. "Peut-être que s'il n'y avait pas eu la guerre, le chaos économique et s'ils n'avaient pas perdu leur travail, leur quatrième enfant jouerait maintenant avec ses frères et soeurs", a dit Amr Gamal.

Son film a été apprécié par la critique à la Berlinale qui prend fin samedi: "un drame intense... qui aborde l'avortement de façon terre à terre avec en toile de fond les pressions sociales et religieuses dans un pays musulman en proie à de très grandes difficultés", a ainsi commenté le site britannique consacré au cinéma, Screen Daily.