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Monde - Géopolitique

En 10 ans, Xi a refaçonné l’armée chinoise, mais aussi la région

Pékin cherche à remodeler l’ordre international « pour mieux l’aligner sur son système autoritaire et ses intérêts nationaux », selon un rapport du Pentagone de 2021.

En 10 ans, Xi a refaçonné l’armée chinoise, mais aussi la région

Des chasseurs J-15 stationnés sur un porte-avions chinois. Photo AFP

En une décennie de règne de Xi Jinping, la Chine a bâti la première marine au monde, restructuré la plus grande armée de métier de la planète, et développé un arsenal nucléaire et balistique capable d’inquiéter ses ennemis.

Les pays voisins de la Chine s’efforçant de suivre la cadence, le troisième mandat de cinq ans de Xi Jinping a toutes les chances de s’accompagner d’une accélération de la course aux armements dans la région Asie-Pacifique.

De la Corée du Sud, qui développe sa force maritime de haute mer, à l’Australie, qui acquiert des sous-marins nucléaires, les achats d’armes ont bondi.

Selon l’Institut international d’études stratégiques basé à Londres, les dépenses en matière de défense ont dépassé l’an dernier le milliard de dollars en Asie-Pacifique.

Au cours de la dernière décennie, la Chine, les Philippines et le Vietnam ont doublé le montant de leurs dépenses militaires. La Corée du Sud, l’Inde et le Pakistan ne sont pas loin derrière.

Même le Japon a présenté cette année un budget record en matière de défense, mettant fin à sa réserve en invoquant un environnement sécuritaire « de plus en plus violent ».

« Tous les acteurs-clés de la région indo-Pacifique réagissent aussi vite que possible à la modernisation de l’armée chinoise », explique Malcolm Davis, un ex-responsable de la Défense australienne, désormais à l’Institut de stratégie politique.

Obsolète et inefficace

Pendant des années, l’Armée populaire de libération (APL) a été considérée comme obsolète et inefficace, un historien la qualifiant même de « plus grand musée militaire du monde ». Elle était dotée d’équipements militaires vieillissants issus de l’ex-URSS, rongée par la corruption, et reposait principalement sur une infanterie aux résultats peu glorieux sur les théâtres étrangers.

Pendant la guerre de Corée, l’APL, intervenue aux côtés de la Corée du Nord, avait perdu 400 000 hommes, selon les Occidentaux, 180 000, selon Pékin. Elle avait affronté en 1979 le Vietnam lors d’une guerre brève mais sanglante.

Quand Xi Jinping est devenu en 2013 commandant en chef des armées, des réformes étaient déjà en cours. Elles avaient débuté dans les années 90, sous la présidence d’un Jiang Zemin impressionné par les prouesses militaires américaines lors de la guerre du Golfe et de la troisième crise du détroit de Taïwan.

Mais « ce n’est vraiment qu’avec l’arrivée de Xi Jinping que ces efforts ont commencé à se traduire en capacités », explique le consultant stratégique Alexander Neill.

L’APL venait de mettre en service son premier porte-avions, venu d’Ukraine, et ses chasseurs-bombardiers J-15 – dérivés du modèle soviétique Sukhoi.

Le budget militaire chinois est en constante augmentation depuis 27 ans, selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm.

« Énorme faveur » de Xi

La Chine dispose désormais de deux porte-avions en activité, de centaines de missiles balistiques à portée longue et intermédiaire, de milliers d’avions de chasse et de la plus grande marine du monde, devant les États-Unis. « Ils ont une très grande marine, et s’ils veulent intimider et positionner des navires autour de Taïwan, ils peuvent très bien le faire », a déclaré aux médias américains Karl Thomas, commandant de la VIIe flotte.

Dans le même temps, l’arsenal nucléaire de la Chine augmente de manière exponentielle et, selon le Pentagone, il serait en mesure d’être lancé depuis la terre, la mer et les airs. Selon la revue Bulletin of the Atomic Scientists, la Chine possède aujourd’hui environ 350 ogives nucléaires, soit le double de la quantité détenue pendant la guerre froide. Et les services de renseignements américains estiment que ce stock pourrait encore doubler pour atteindre 700 têtes d’ici à 2027. De nouveaux silos à missiles nucléaires sont en cours de construction dans le nord-ouest du pays.

La Chine « est le seul adversaire capable de combiner sa puissance économique, diplomatique, militaire et technologique pour constituer un défi prolongé pour un système international stable et ouvert », selon un rapport du Pentagone de 2021. « Pékin cherche à remodeler l’ordre international pour mieux l’aligner sur son système autoritaire et ses intérêts nationaux », selon la même source.

Cette perspective effraie, et, dans la région, de nombreux projets ont clairement pour objectif de renforcer la capacité de dissuasion. La Corée du Sud souhaite développer une puissance navale capable d’opérer au large de son littoral, et l’Australie prévoit d’acquérir huit sous-marins nucléaires avec l’aide des Britanniques et des Américains en vertu de l’accord Aukus.

Il est également question à Canberra d’acquérir des armes hypersoniques, des missiles balistiques à plus longue portée et même des bombardiers furtifs capables de frapper n’importe où dans le monde sans être détectés.

Pour Malcolm Davis, ces projets traduisent une prise de conscience que la Chine a de plus en plus le pouvoir de façonner la région à sa guise. « L’époque où la marine américaine dominait les mers dans le Pacifique occidental touche à sa fin, a-t-il déclaré. Nous n’aurions pas eu Aukus si Xi Jinping n’avait pas été là. D’une certaine manière, il nous a fait une énorme faveur. »

Andrew BEATTY/AFP

En une décennie de règne de Xi Jinping, la Chine a bâti la première marine au monde, restructuré la plus grande armée de métier de la planète, et développé un arsenal nucléaire et balistique capable d’inquiéter ses ennemis.Les pays voisins de la Chine s’efforçant de suivre la cadence, le troisième mandat de cinq ans de Xi Jinping a toutes les chances de s’accompagner d’une...

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