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Sport - Légende

Michael Jordan, le maillot qui valait 10 millions

Basketteur à la célébrité démesurée, Michael Jordan est devenu le nom qui figurera derrière le maillot le plus cher du monde. Vendue pour plus de 10 millions de dollars, la tunique a dépassé la précédente détentrice du record, celle du footballeur Diego Maradona.

Michael Jordan, le maillot qui valait 10 millions

Le maillot de Michael Jordan, porté lors de son dernier titre victorieux en NBA, en 1998, exposé chez Sotheby’s à New York, le 6 septembre courant. Angela Weiss/AFP

On savait que le vintage était revenu à la mode, mais peut-être pas à ce prix-là. Dans la bataille des ventes aux enchères d’articles de sport de collection, la légende du basket Michael Jordan a pulvérisé un nouveau record la semaine dernière. Lors d’un nouvel encan organisé par la compagnie Sotheby’s, propriété du magnat franco-israélien des télécoms Patrick Drahi, l’une des dernières tuniques portée par « MJ » avec les Chicago Bulls, a été vendue pour la bagatelle de 10,1 millions de dollars, soit plus du double de l’estimation de départ.

Il s’agit d’un « nouveau record pour un maillot de basket aux enchères, un record pour n’importe quel article de sport déjà porté et appartenant au patrimoine, ainsi que l’article le plus cher jamais vendu dans la collection de Michael Jordan », s’est félicitée dans un communiqué la maison de ventes aux enchères d’œuvres d’art.

Le célébrissime maillot rouge, flanqué du numéro 23, de la franchise de l’Illinois a battu le précédent record mondial détenu par celui du footballeur Diego Maradona, vendu quelque 9,3 millions de dollars, également par Sotheby’s, peu de temps après son décès en novembre 2020. Cette tunique n’avait déjà rien de banal puisqu’elle avait été arborée par le « Pibe de oro » (le gamin d’or) lors d’un fameux quart de finale à la Coupe du monde de 1986. Un match rendu légendaire par la prestation du numéro 10 de l’Albicéleste, qui avait ce jour-là martyrisé l’équipe d’Angleterre, avant d’aller décrocher un second titre mondial. Quatre minutes après avoir ouvert le score grâce à la « main de Dieu », il doublait la mise en traversant tout le terrain, balle au pied, au milieu de six adversaires. Une action encore aujourd’hui considérée comme le plus beau but jamais inscrit dans un match de football.

Une « légende vivante »

De trois ans le cadet du regretté Argentin, Jordan a laissé une emprunte similaire, si ce n’est supérieure, à Maradona dans l’histoire du sport. Aux côtés des Mohammad Ali, Pelé et peut-être le très prochain retraité Roger Federer, il fait partie de ces athlètes ayant décloisonné les limites de leurs disciplines respectives. « Jordan appartient à l’histoire », avait confié Brahm Wachter, l’un des responsables de la vente au moment de son annonce. « L’enthousiasme était palpable parmi les fans de sport, mais aussi chez les collectionneurs avides de détenir une pièce rare appartenant à l’histoire », avait-il détaillé, avant de saluer « le nom et l’héritage incomparables de Michael Jordan, toujours d’actualité près de 25 ans après ».

Si de telles sommes peuvent logiquement sembler absurdes pour l’acquisition d’un simple maillot, celles-ci sont à la hauteur de l’impact que « His Airness » a laissé dans les souvenirs de plusieurs générations d’enfants nés entre les années 70 et 80. L’unicité de cette pièce, arrachée on le rappelle pour la modique somme de 10,1 millions de dollars, réside dans la grandeur de l’exploit sportif qu’a réalisé Jordan, avec ce maillot précis sur les épaules, en compagnie de ses coéquipiers lors de la saison 1997-1998.

Largement mise en scène dans la série Netflix The Last Dance (La dernière danse) sortie en 2020, cette ultime partition de la légendaire équipe des Chicago Bulls a laissé une trace indélébile dans l’histoire de la balle orange. Informés par leur direction que l’année 1998 sonnerait le glas de leur aventure commune, les joueurs de Phil Jackson étaient déterminés à ce que leurs dernières partitions communes soient à la hauteur de l’ampleur de leur domination sur la NBA de l’époque. Une ligue sur laquelle ils ont régné quasi sans partage tout au long de la décennie 1990 en glanant six titres de champions entre 1991 et 1998. Interrompue en son milieu par le faux départ en retraite de « MJ » en 1994, cette série inégalée est responsable de l’aura dont jouissent encore 24 ans plus tard les noms de Michael Jordan, mais aussi Scottie Pippen ou Dennis Rodman dans les mémoires « basketophiles ». « Cette saison est peut-être l’une des préférées des fans de Jordan parce que Michael était au sommet de ses capacités, tout en sachant que c’était sa dernière chance avec les Chicago Bulls pour le championnat de la NBA », résume Brahm Wachter.

L’un des plus grands come-back

Le 14 juin 1998, les Bulls se rendent à Salt Lake City pour y affronter le Jazz de Utah. Une rencontre décisive puisque Jordan et les siens pourraient réussir une nouvelle « passe de trois » : à savoir soulever pour la seconde fois un troisième titre de champion de NBA consécutif. Et en menant la série 3 matchs à 2, Jordan et les Bulls sont à une marche de s’offrir la plus belle des révérences.

Problème : à 40 secondes du coup de buzzer final, les Bulls sont devancés de 3 unités par Utah (86-83). L’entraîneur de Chicago Phil Jackson pose un temps mort de la dernière chance et ordonne à ses joueurs de donner l’intégralité des derniers shoots à Jordan.

Ce dernier, habitué à faire gagner son équipe sur le gong depuis son arrivée dans l’Illinois en 1984, effectue alors une série d’actions considérées comme l’un des plus grands spectacles dans l’histoire des finales de la NBA. Lors de la reprise du jeu, Jordan reçoit la balle, va au panier et s’envole au-dessus de plusieurs défenseurs du Jazz. Il marque, mais les arbitres n’accordant pas la faute escomptée, les Bulls restent à une unité derrière. Les joueurs de Utah récupèrent donc la balle et la font circuler jusqu’à Karl Malone. Tentant de gagner le maximum de temps en « mangeant » le chronomètre, il ne voit pas surgir un Jordan en furie qui lui vole le ballon des mains et s’offre ainsi une balle de match.

Déjà auteur de 43 points depuis le début de la rencontre, il s’élance alors à grandes enjambées en direction du panier puis stoppe brusquement sa course à proximité de la raquette. Ce brusque changement de rythme fait trébucher son vis-à-vis Bryon Russell. Puis, à l’aide d’un petit pas en arrière pour se donner le champ libre, il propulse la balle dans le panier adverse : 87-86. Le tir à trois points désespéré de John Stockton au buzzer n’y change rien, les Bulls s’offrent leur 6e titre de champion, tout comme Jordan qui reçoit pour la 6e fois le titre de meilleur joueur, « MVP » en anglais, de la finale. Cette rencontre, aux allures de jubilé pour la plus grande légende du basket, détient encore aujourd’hui la plus haute audience d’une finale de NBA.

Un record loin d’être une première

La prestance dont dispose toujours à 59 ans Michael Jordan, véritable légende vivante du basket, explique, du moins en partie, le pourquoi du comment un simple maillot de basket peut s’échanger contre plus de 10 millions de dollars. Sotheby’s a été d’autant plus prompt à flairer la belle opération financière au vu du pedigree de « Air Jordan », dont la carrière fut jalonnée de succès commerciaux qui ont rempli les poches de ses différents sponsors.

Enfant d’un père ouvrier chez General Electric et d’une mère employée de banque, le natif de Wilmington, en Caroline du Nord, n’est pas devenu l’un des athlètes les plus rentables de l’industrie sportive du jour au lendemain. En octobre 2021, Sotheby’s avait déjà organisé la vente d’une de ses plus célèbres paires de baskets. Ses Nike Air Ships, qu’il avait exceptionnellement rechaussées lors de ses derniers All-Star Games sur le parquet du Madison Square Garden de New York le 8 mars 1998, s’étaient alors échangées pour près d’un million et demi de dollars. Si elle lui avait mis les pieds en sang dès la mi-temps de la rencontre, elle lui avait surtout permis d’inscrire plus de 40 points. De quoi rappeler les toutes premières performances qui l’avaient révélé aux yeux du monde lors de son arrivée dans l’Illinois en 1984.

Révélation de la saison universitaire avec l’équipe de North Carolina, à qui il offre le titre national en marquant un ultime panier à 3 points au buzzer en finale, Jordan attire dès ses 20 ans toutes les grandes marques mondiales qui rêvent déjà d’en faire leur future égérie. Mais alors qu’il rêvait de signer avec Adidas, une jeune marque encore peu connue, créée 13 ans plus tôt, rafle la mise en lui proposant un contrat alors historique pour un joueur de basket s’élevant à 250 000 dollars. En enrôlant la future star interplanétaire, Nike a réussi le pari qui lui permettra de devenir la virgule la plus célèbre du monde. Muni de sa propre ligne de chaussures, les Air Jordan avec leurs semelles à la technologie révolutionnaire, Michael va faire rêver l’intégralité des jeunes des années 80, dont le seul objectif est d’être capable de sauter aussi haut que leur nouvelle idole. En signant ce contrat, Nike espérait vendre l’équivalent de 3 millions de dollars de Air Jordan en quatre ans, n’imaginant pas alors qu’elle en vendrait pour 126 millions dès la première année.

« Le nom de » Michael Jordan « a toujours été une bonne marchandise, explique David Falk, son agent de toujours qui l’a poussé à signer avec Nike. Absolument tous les sponsors le sollicitaient ». « On disait de lui qu’il était capable de faire vendre du produit de vaisselle comme si c’était des petits pains. », ironise-t-il dans la série The Last Dance.

« Pour un enfant, avoir sa paire de Air Jordan, c’était un peu comme détenir un sabre laser de Star Wars », plaisante le rappeur américain NAS. Dans ce même épisode, la star de la pop Justin Timberlake explique qu’il économisait toute une année pour pouvoir faire la queue dans un Foot Locker et dégoter le sésame d’une génération. « Avant Michael Jordan, les sneakers étaient juste des paires pour jouer au basket. Et d’un coup, ils sont devenus les chaussures à la mode, une part de la culture », explique Roy Johnson, directeur de Fortune Magazine ayant chapeauté une édition intitulée « The Jordan’s Effect ».

En plus d’avoir l’assurance d’être la vedette de la cour de récréation, cette hystérie collective autour des Air Jordan poussera même le cinéaste Spike Lee à centrer l’intrigue de son premier film, intitulé She’s Gotta Have It (Elle doit l’avoir), sur la quête d’une paire de Air Jordan menée par son personnage principal. Véritable héros de la jeunesse de plusieurs générations successives, il peut aussi se targuer de faire partie de ceux ayant érigé des ponts entre la culture urbaine et celle du sport.

En faisant tomber tous les records de vente, ce maillot, qui n’a donc rien de « simple », s’est invité à la table des plus précieuses œuvres d’art. On doute toutefois que son nouveau propriétaire, dont l’identité n’a pas été divulguée, l’endosse pendant sa séance de sport dominicale. Contrairement aux heureux détenteurs d’une paire de Air Jordan, authentiques ou contre-façonnés, qui garnissent et garniront encore longtemps les terrains de basket des quatre coins de la planète.

On savait que le vintage était revenu à la mode, mais peut-être pas à ce prix-là. Dans la bataille des ventes aux enchères d’articles de sport de collection, la légende du basket Michael Jordan a pulvérisé un nouveau record la semaine dernière. Lors d’un nouvel encan organisé par la compagnie Sotheby’s, propriété du magnat franco-israélien des télécoms Patrick Drahi, l’une...

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