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Auto - Éclairage

Voyager en voiture électrique ? C’est faisable...

Des journalistes ont réalisé un trajet de près de 1 000 kilomètres entre la France et la Belgique. Constat : mieux vaut bien se préparer à l’avance pour éviter la panne sèche.

Voyager en voiture électrique ? C’est faisable...

Le concept Avinya (mot dérivé du sanskrit signifiant innovation) du constructeur indien Tata Motors est une expression de la vision de la société d’un véhicule purement électrique. Francis Mascarenhas/Reuters

Partir en vacances en voiture électrique, c’est possible : un périple de 900 kilomètres entre la France et la Belgique montre que les bornes de recharge sont bien là, mais qu’il est impératif de préparer son trajet pour éviter la panne sèche, tant le réseau reste embryonnaire par rapport aux stations-service traditionnelles. Le voyage effectué par une équipe de journalistes illustre le titanesque défi financier et industriel auquel l’Europe fait face alors qu’elle veut interdire la vente de véhicules à essence ou diesel d’ici à 13 ans. Ainsi, après des mois de débats et d’intense lobbying, les eurodéputés ont voté la semaine dernière la fin des ventes de voitures neuves à essence, diesel et hybrides en 2035. De facto, seules les voitures électriques pourront être vendues hors marché d’occasion.

Au départ de Paris, pas de problème dans les bouchons de l’agglomération parisienne : la batterie peut tenir des heures à ce rythme. Mais en arrivant sur l’autoroute, l’électrique dévoile un de ses principaux défauts : l’autonomie passe de 250 à moins de 100 kilomètres, en bien moins de temps qu’il ne faut pour les parcourir. Après une première recharge, on arrive avec la jauge à zéro sur l’aire de Verdun (dans la Meuse). Pour une dizaine d’euros, on remplit la batterie à 80 %, les derniers 20 % étant plus lents. Il est essentiel d’anticiper son parcours en fonction de la voiture et de la température extérieure, la batterie se déchargeant plus vite en hiver. Pour atteindre la Belgique, il faudra charger quatre fois, pendant une trentaine de minutes à chaque pause.

« La recharge en itinérance est essentielle dans l’esprit des gens pour passer à l’électrique », souligne Cécile Goubet, de l’Avere, l’organisation des professionnels du véhicule électrique. Tesla l’avait bien compris, en lançant à ses frais des stations de recharge en parallèle de ses berlines, des stations qui comptent aujourd’hui jusqu’à 40 bornes individuelles chacune, bien plus que les stations concurrentes.

Le concept Avinya (mot dérivé du sanskrit signifiant innovation) du constructeur indien Tata Motors est une expression de la vision de la société d’un véhicule purement électrique. Francis Mascarenhas/Reuters

Petites routes

Lorsque l’on quitte l’autoroute pour passer en Belgique via les départementales, la consommation baisse, comme la peur de la panne. De nombreux chargeurs de moyenne puissance sont disponibles devant des mairies, chez des concessionnaires ou devant des supermarchés. La nuit tombe alors que Bruxelles approche : il faut maintenant trouver un hôtel ou un logement où recharger ses batteries, histoire de repartir avec 100 % d’autonomie. L’offre se limite encore à des hôtels plutôt huppés ou à quelques Airbnb.

Sur l’aire de Nazareth, près de Gand, des Hollandais enhardis par la performance de leur réseau de bornes s’arrêtent pour une première charge rapide sur le chemin de la France. « Le problème, c’est qu’entre la Belgique et l’Espagne, il y a la France », plaisante Frank Berg, âgé de 55 ans, qui se rend en Espagne avec sa femme Olga. Par rapport aux Pays-Bas ou à l’Allemagne, le réseau de recharge rapide français est encore bien incomplet. Après l’échec du réseau Corri-Door, lancé en 2015 par des filiales d’EDF et Engie, des opérateurs comme Ionity, TotalEnergies ou FastNed prennent le relais. Par décret, toutes les aires d’autoroute françaises doivent être équipées d’ici à la fin de l’année.

Après des années d’hésitation, « il y a beaucoup d’enthousiasme autour de ce business model », confirme Florian Nägele, du cabinet McKinsey. Des géants nationaux et européens devraient se consolider dans les prochaines années, prévoit l’expert du secteur.

Isabelle Inder, âgée de 34 ans, fait aussi le voyage vers la Champagne avec sa compagne Antalaya. Elles ont choisi récemment un petit SUV de la marque britannique MG (Morris Garages, aujourd’hui détenue par le groupe public chinois SAIC), qui affiche environ 300 kilomètres d’autonomie, « pour protéger l’environnement » et pour balader leur gros chien. « On recharge par petits coups chaque fois qu’on s’arrête. Ce n’est pas si compliqué, et ce n’est pas mal non plus de prendre une pause toutes les heures et demie, explique Isabelle. Il faut planifier son voyage, mais parfois, les applications ne sont pas à jour et la borne ne fonctionne pas. »

Le concept Avinya (mot dérivé du sanskrit signifiant innovation) du constructeur indien Tata Motors est une expression de la vision de la société d’un véhicule purement électrique. Francis Mascarenhas/Reuters

Expérience amère

On en fait l’amère expérience sur l’autoroute Lille-Paris : alors qu’il reste 60 kilomètres à parcourir, une station de recharge est fermée pour travaux, on rate une sortie pour la suivante et on se retrouve quasiment à zéro sur une station... où la charge rapide ne fonctionne pas.

Quelque 300 000 bornes lentes (+30 % sur un an) et 50 000 rapides (+30 % aussi) ont été installées en Europe en 2021, selon l’Agence internationale de l’énergie. L’Allemagne, le Royaume-Uni, la Norvège et la France ont notamment redoublé d’efforts au cours des derniers mois. Mais cette augmentation de 30 % sur un an reste insuffisante face à l’explosion prévue du marché des voitures électriques. Il faudrait un réseau de 6,8 millions de chargeurs d’ici à 2030, soit une installation de 14 000 chargeurs par semaine, pour répondre aux besoins, selon l’Association européenne des constructeurs d’automobiles.

Taimaz SZIRNIKS/AFP

Partir en vacances en voiture électrique, c’est possible : un périple de 900 kilomètres entre la France et la Belgique montre que les bornes de recharge sont bien là, mais qu’il est impératif de préparer son trajet pour éviter la panne sèche, tant le réseau reste embryonnaire par rapport aux stations-service traditionnelles. Le voyage effectué par une équipe de journalistes...

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