Plus d'un an et demi après la double explosion du 4 août 2020, le Premier ministre Nagib Mikati a promis lundi aux familles des victimes que les silos du port de Beyrouth ne seront pas détruits tant qu'il sera en poste et qu'il fera son possible pour accélérer des nominations nécessaires à la poursuite de l'enquête sur ce drame, qui piétine en raison des nombreux recours et ingérences politiques. La déflagration, véritable traumatisme d'un pays déjà frappé par une crise économique sans précédent, a fauché plus de 220 vies, blessé au moins 6.500 personnes et ravagé des quartiers entiers de la capitale.
"M. Mikati nous a dit que les silos du port de Beyrouth ne seront pas détruits tant qu'il sera Premier ministre", a déclaré à l'issue de la réunion William Noun, qui a perdu son frère Joe dans l'explosion, dans des propos rapportés par l'Ani (Agence nationale d'information, officielle). "Nous avons demandé une étude concernant la reconstruction des silos", a-t-il poursuivi. Pourtant, c'est le gouvernement du même Nagib Mikati qui a, il y a moins d'un mois, chargé le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) de détruire les silos du port de Beyrouth, qui sont gravement endommagés et menacent de s'effondrer.
Deuxième sujet abordé par le président du Conseil et les familles des victimes : la signature d'un projet de décret de nominations judiciaires nécessaires à la reprise de l'enquête. Ce document doit en effet permettre de nommer six des dix présidents de chambres de la Cour de cassation qui forment l’assemblée plénière de cette instance. Or cette assemblée est la juridiction compétente pour débloquer le processus d'enquête, car c’est elle qui statue sur les recours en responsabilité de l’État intentés pour "fautes lourdes" du juge Tarek Bitar, chargé de l'instruction, ainsi que du juge Naji Eid. Ce dernier est lui-même chargé d’examiner un recours en dessaisissement porté contre M. Bitar par Ali Hassan Khalil et Ghazi Zeaïter, députés et anciens ministres appartenant au camp du président de la Chambre Nabih Berry, et poursuivis dans le cadre de l'enquête. Le ministre des Finances, Youssef Khalil, un proche du parti de M. Berry, qui a refusé de signer le projet de décret, a d'ailleurs été accusé par une autre porte-parole des familles de victimes de "comportement illégal". De son côté, William Noun a regretté que "l'enquête soit clairement obstruée".
À cet égard, Nagib Mikati "a promis d'aborder la question des nominations judiciaires lors du Conseil des ministres de jeudi", a déclaré Céline Roukoz, qui a également perdu un proche dans l'explosion.
Un an et neuf mois après le drame du 4 août 2020, les collectifs de familles des victimes protestent régulièrement contre les obstructions à l'enquête du juge Bitar, réclamant que justice soit rendue en mémoire des défunts.
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