Rechercher
Rechercher

Politique - Décryptage

Mikati a renoncé... et Siniora a dû suivre

Mikati a renoncé... et Siniora a dû suivre

Nagib Mikati, après la prière du vendredi et avant sa visite à Baabda, à l’issue de laquelle a été annoncée, le 10 septembre 2021, la formation d’un nouveau gouvernement qu’il présidera. Photo AFP

Étranges élections que celles qui doivent se dérouler le 15 mai prochain. Pour la première fois depuis des décennies, elles se tiendront en l’absence des grandes figures et des familles traditionnelles sunnites, exception faite de Fayçal Karamé, héritier d’une lignée tripolitaine. Pourtant, jusqu’au dernier jour avant la fermeture du délai officiel de dépôt des candidatures, le suspense a été maintenu sur une participation directe et personnelle au scrutin de l’actuel président du Conseil Nagib Mikati et de celle de l’ancien Premier ministre Fouad Siniora. Une telle participation était devenue indispensable pour mobiliser l’électorat sunnite et éviter un report du scrutin pour cause de boycott d’une communauté aussi importante, après l’annonce le 24 janvier du chef du courant du Futur Saad Hariri de suspendre ses activités politiques et celles de son courant pour une durée non limitée. Un retrait précédé par le refus de l’ancien Premier ministre Tammam Salam – qui avait pris les rênes du pouvoir au Liban en tant que chef de gouvernement dans une période critique de vacance présidentielle et d’activité de Daech dans le nord du pays et dans la Békaa du Nord entre mai 2014 et octobre 2016 – d’assumer la moindre responsabilité politique en vue de ce scrutin. Dudit « club des anciens Premiers ministres » – formé depuis 2019 et regroupant Saad Hariri, Tammam Salam, Nagib Mikati et Fouad Siniora (qui remplissaient en quelque sorte le rôle « des sages sunnites ») – il ne restait donc plus dans la course que ces deux derniers pour prendre le leadership des sunnites et mobiliser les électeurs de cette communauté. Les regards se sont donc tournés vers eux. À eux deux, ils devaient en quelque sorte se partager les tâches et les zones d’influence, le Nord pour Nagib Mikati et Beyrouth et Saïda pour Fouad Siniora.

Lire aussi

Et Achraf Rifi dans tout ça ?

Les conseils venus de l’extérieur (essentiellement les États du Golfe et les États-Unis) étaient très précis, selon une source bien informée : il fallait à tout prix éviter un boycott sunnite des élections pour ne donner aucun prétexte à leur éventuel report. En même temps, il fallait combler le vide laissé sur la scène sunnite par le retrait, au moins momentané, de Saad Hariri. C’est ainsi que le mufti de la République, le cheikh Abdellatif Deriane, considéré comme un proche de Saad Hariri, a été pressé de ne pas se laisser influencer par le départ de ce dernier et de se rapprocher de MM. Mikati et Siniora. Une personnalité sunnite de retour de Riyad avait même transmis au mufti un message clair, selon des sources de Dar el-Fatwa, sur la nécessité de pousser vers une victoire éclatante des listes formées par Fouad Siniora. D’ailleurs, certains cadres du courant du Futur, déçus par le retrait de leur chef, ont claqué la porte de la formation pour se rallier à M. Siniora ou à M. Mikati, selon leur appartenance régionale.

Les conseils venus de l’étranger étaient si clairs que Baha’ Hariri, frère aîné de Saad, a choisi de ne plus se mettre au premier plan, renonçant lui aussi à se présenter personnellement aux élections, tout en continuant à appuyer des candidats, voire des listes. La surprise est toutefois arrivée de Saad Hariri lui-même qui a choisi d’être très ferme avec ses partisans désireux de se présenter aux élections. Selon des sources proches du courant du Futur, le leader sunnite aurait été clair avec tous ceux qui lui ont rendu visite dans son nouveau lieu de résidence à Abou Dhabi (notamment sa tante Bahia Hariri et son cousin Ahmad Hariri) et avec ceux qui l’ont contacté au téléphone, en leur rappelant que le parti bleu ne doit pas avoir de candidats aux élections, dans aucune circonscription, et que le vote de ses partisans devra être strictement décidé par les cadres. Saad Hariri a montré ainsi qu’il ne compte ni disparaître de la vie politique libanaise ni faire de cadeaux gratuits à ceux qui veulent bénéficier de ses voix. Représentant, selon plusieurs sondages différents, plus de 40 % des suffrages sunnites, il a donc décidé de frapper fort, et toutes les institutions sociales créées ou parrainées par le courant du Futur ont été mobilisées pour refuser d’appuyer les listes en gestation.

Lire aussi

À l’approche des élections, l’Arabie saoudite regarde à nouveau le Liban

Malgré cela, Fouad Siniora a poursuivi ses efforts, réussissant à convaincre des figures du courant du Futur de se présenter aux élections, sans toutefois réussir à rallier ceux que l’on considère comme « les poids lourds ». Il a aussi maintenu le suspense au sujet de sa propre candidature. En réalité, selon des sources proches du Futur, il attendait la décision de Nagib Mikati. Si ce dernier présentait sa candidature, M. Siniora ne serait plus le seul du « club des anciens » dans la course et ne ferait pas figure de personnalité qui aurait porté un coup à Saad Hariri, tout en misant sur son duo avec le Premier ministre actuel pour mobiliser les électeurs. Nagib Mikati, lui, n’était pas très chaud pour mener la bataille après le retrait de Saad Hariri et dans une période aussi confuse. Il a donc annoncé lundi qu’il renonçait à se porter candidat, tout en s’apprêtant à appuyer des listes à Tripoli et au Nord en général. Selon ses proches, le Premier ministre était soucieux de ne pas apparaître comme celui qui profite du retrait de M. Hariri pour tenter de s’emparer de sa base électorale. En même temps, il conserve sa base populaire au Nord et, surtout, il a de fortes chances de rester au Sérail pour la période à venir, en raison de la complexité de la situation régionale et internationale et de la confusion qui règne sur la scène locale.

La décision de Nagib Mikati annoncée, Fouad Siniora n’avait plus le choix. Il a dû renoncer à présenter sa candidature pour ne pas être le seul des quatre anciens Premiers ministres à participer aux élections. Il compte toutefois les mener à travers des listes qu’il appuie, notamment dans la seconde circonscription de Beyrouth et à Saïda-Jezzine. Mais la bataille risque d’être beaucoup plus difficile sans des figures de premier plan. La participation des électeurs sera en tout cas déterminante pour montrer si Saad Hariri est une page tournée et si Fouad Siniora peut le remplacer.

Étranges élections que celles qui doivent se dérouler le 15 mai prochain. Pour la première fois depuis des décennies, elles se tiendront en l’absence des grandes figures et des familles traditionnelles sunnites, exception faite de Fayçal Karamé, héritier d’une lignée tripolitaine. Pourtant, jusqu’au dernier jour avant la fermeture du délai officiel de dépôt des candidatures, le...
commentaires (3)

BON DEBARRAS !

LA LIBRE EXPRESSION. LA PATRIE EST EN DANGER.

12 h 15, le 18 mars 2022

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • BON DEBARRAS !

    LA LIBRE EXPRESSION. LA PATRIE EST EN DANGER.

    12 h 15, le 18 mars 2022

  • Que toutes les anciennes figures des politiciens ripoux ne se présentent pas, c’est le début de la victoire de la révolution. Maintenant si c’est pour les remplacer par des opportunistes soumis au Hezbollah, on aura tout perdu. Quand j’écrivais que Saad Hariri est un nain immature en politique … ne serait que sa grande bêtise de s’être brouillé avec les FL

    Lecteur excédé par la censure

    10 h 48, le 18 mars 2022

  • JE NE COMPRENDS PAS CE QUE FAIT ET CHERCHE L,ELITE SUNNITE. A MOINS QU,ILS DONNENT L,ORDRE A LEUR COMMUNAUTE DE VOTER FORCES LIBANAISES...

    LA LIBRE EXPRESSION. LA PATRIE EST EN DANGER.

    08 h 30, le 18 mars 2022

Retour en haut