
Le sénateur américain Jim Risch, au Capitole, le 31 janvier 2022. Photo Chip Somodevilla/Getty Images/AFP
Deux élus américains ont interpelé le secrétaire d'État Anthony Blinken pour lui faire part de leurs préoccupations sur les accords énergétiques, conclus ou en cours d'élaboration, entre le Liban, la Syrie, la Jordanie et l'Égypte, qui doivent permettre d'approvisionner le pays du Cèdre en électricité. Ces élus, qui ont envoyé une lettre à M. Blinken, dénoncent notamment le fait que ces initiatives, parrainées par Washington, enfreignent la loi César, un texte entré en vigueur en 2020 et servant de cadre à Washington pour imposer des sanctions à toute personne et entité collaborant avec le régime syrien de Bachar el-Assad.
Après des mois de discussion, Beyrouth a signé il y a tout juste une semaine un contrat avec Amman et Damas qui prévoit l'importation de courant électrique en provenance de Jordanie via la Syrie, avec l'approbation de l'ambassadrice américaine au Liban, Dorothy Shea. Cet accord concrétise un des deux axes des projets énergétiques proposés par l'administration américaine, le second visant à importer du gaz égyptien, via également le territoire syrien.
Les deux élus, Michael McCaul et Jim Risch, ayant exprimé leurs craintes vis-à-vis de ces projets, appartiennent à la commission des Affaires étrangères : le premier à la Chambre des représentants, le deuxième au Sénat. Figures du parti républicain, ils s'en prennent tous deux à l'Administration Biden qui "a fourni un plan pour contourner les sanctions de la loi César à l'avenir, en impliquant la Banque mondiale", selon leur lettre adressée à Anthony Blinken et publiée en entier sur le site de la commission.
Les "problèmes fondamentaux" non-résolus
"Nous vous écrivons pour vous faire part de nos sérieuses préoccupations concernant les accords énergétiques que l'Administration Biden facilite entre le Liban, la Syrie, la Jordanie et l'Égypte, qui enrichiraient sans aucun doute le régime Assad et devraient déclencher des sanctions américaines en vertu de la loi César", déclarent les deux élus. Michael McCaul et Jim Risch estiment également que "le peuple américain a déjà fourni une aide humanitaire, économique et sécuritaire importante pour renforcer la stabilité du Liban. Cependant, ces accords énergétiques, qui n'exigent pas de la classe politique libanaise qu'elle fasse des réformes attendues depuis longtemps, ne traitent pas les problèmes fondamentaux" du pays. Réitérant leur condamnation d'un accord fait selon eux pour "contourner" la loi César, ils demandent à M. Blinken de reconsidérer son soutien à ces accords énergétiques.
Cette prise de position est donc tout à fait à l'opposé de celle donnée par Dorothy Shea à la mi-janvier : l'ambassadrice américaine au Liban avait alors affirmé qu'il n'y avait "aucune crainte à avoir pour le Liban concernant la loi César".
Un des collègues des deux élus, le sénateur républicain Ted Cruz, avait alors déjà réagi aux propos de l'ambassadrice et fustigé les projets énergétiques. "Ce conseil est exceptionnellement mauvais. Le Liban devrait absolument s'inquiéter de la violation des sanctions américaines. De même pour tous les autres pays concernés. Le Congrès ne laissera pas l'équipe Biden enrichir les satellites de l'Iran et encore moins les tyrans sanguinaires comme Assad. Les sanctions américaines seront appliquées", avait-il écrit sur Twitter.
Exceptionally poor advice. Lebanon should absolutely worry about violating US sanctions. So should every other country involved. Congress isn't going to allow Team Biden to enrich Iran's proxies, especially not bloody tyrants like Assad. US sanctions will be enforced. https://t.co/8FsJ0cku8J
— Ted Cruz (@tedcruz) January 14, 2022
Ces projets s'inscrivent dans le cadre d’une initiative américaine dévoilée en août 2021 pour aider Beyrouth à sortir d’une grave crise multiforme, alors que la population subit depuis des mois un rationnement extrême du courant. L'accord avec la Jordanie devrait permettre, d'ici deux mois, d’ajouter deux heures de courant par jour à l’approvisionnement fourni par l’établissement public Électricité du Liban (EDL). Pour permettre ces accords, les États-Unis ont accepté d’aménager de façon ciblée le régime de sanctions (associé à la loi César) pour que ces projets énergétiques puissent aboutir. C’est en principe la Banque mondiale qui doit les financer, à condition que certaines réformes visant le secteur soient entre-temps lancées. La semaine dernière, au moment de signer les accords avec ses homologues jordanien et syrien, le ministre de l'Énergie Walid Fayad avait lâché hors micro : "Je dis à l'ambassadrice américaine qu'elle est ma meilleure amie car elle peut bloquer l'accord à tout moment", une déclaration qui avait provoqué un tollé.
commentaires (3)
Are these two elected Republicans who are protesting unaware that the Caesar Law sanctions are penalizing and starving, in the first place, the poor syrian people they want to help? M.Z
ZEDANE Mounir
11 h 27, le 03 février 2022