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Société - Rapport

La situation des droits s’est encore détériorée au Liban en 2021, affirme HRW

Le document annuel de l’organisation met en avant la paupérisation alarmante de la population, et accable le gouvernement pour son inaction.


La situation des droits s’est encore détériorée au Liban en 2021, affirme HRW

Un homme dort dans la rue. Photo Michel Sayegh

Le rapport annuel de l’organisation internationale Human Rights Watch est accablant pour la situation au Liban, dont il décrit la détérioration évidente à tous les niveaux. Il cite des chiffres sans équivoque, comme les « plus de 80 % des habitants du pays qui n’ont pas accès aux droits fondamentaux » selon les Nations unies, ou encore « la livre libanaise qui a perdu 90 % de sa valeur depuis octobre 2019, érodant la capacité des Libanais à accéder aux biens de base, notamment à la nourriture, à l’eau, aux soins de santé et à l’éducation ».

De manière très significative, le rapport cite « la Banque mondiale qui décrit la crise au Liban comme une » dépression délibérée « due à la gestion défaillante des dirigeants libanais et à l’absence de mesures politiques efficaces ». Très critique à l’encontre du gouvernement, le texte rappelle que celui-ci « a supprimé ou réduit les subventions sur le carburant, le blé, les médicaments et d’autres produits de base sans mettre en place un système de protection sociale adapté pour protéger les personnes le plus vulnérables contre l’impact des fortes hausses des prix », mettant l’accent sur la marginalisation de communautés comme celles des handicapés, des réfugiés et autres. « Le gouvernement libanais n’a pratiquement fourni aucun soutien aux familles qui font face à une crise économique exacerbée par la pandémie de Covid-19, a fait échouer un prêt de la Banque mondiale censé fournir une aide d’urgence aux Libanais vulnérables et a maintes fois retardé la mise en place d’un programme de cartes de rationnement destiné à aider les familles à faire face à la suppression des subventions. »

Sans surprise, l’accent est mis sur la paupérisation de la population. « Entre juin 2019 et juin 2021, le taux d’inflation a atteint 281 %. Les prix des denrées alimentaires ont à eux seuls augmenté de 550 % entre août 2020 et août 2021. Pendant ce temps, la monnaie nationale a perdu 90 % de sa valeur d’avant la crise, et les banques continuent d’imposer des restrictions arbitraires sur les retraits d’espèces », lit-on dans le texte. Il y est précisé que 78 % de la population, selon l’ONU, vit dorénavant dans la pauvreté, et 36 % dans l’extrême pauvreté contre 23 % en 2020 et 8 % en 2019.

Le texte revient longuement sur la crise sanitaire qui découle de la crise économique, mentionnant les pénuries de médicaments, les hôpitaux dans une situation de « catastrophe imminente » (alors que « le gouvernement ne débourse pas les milliards de dollars qu’il leur doit » ), l’exode du personnel de santé… Le texte stigmatise les « autorités libanaises (qui) ont fait preuve d’un mépris total pour la protection des travailleurs de santé, pourtant en première ligne de la pandémie ».

Les entraves à l’enquête sur l’explosion de Beyrouth

Une partie non négligeable du chapitre sur le Liban est consacré à l’enquête sur l’explosion du 4 août au port de Beyrouth, là aussi pointant du doigt le gouvernement. « L’examen par Human Rights Watch de centaines de pages de documents officiels laisse fortement penser que certains responsables du gouvernement étaient conscients du désastre meurtrier que pouvait entraîner la présence de nitrate d’ammonium dans le port », souligne le texte. Et à propos de l’enquête, l’organisation constate que « les dirigeants libanais ont continué à faire obstruction et à retarder l’investigation en cours au niveau national, protégeant ainsi plusieurs hauts responsables de l’obligation de rendre des comptes ». Il note aussi « des vices de procédure et défaillances systématiques » et une « ingérence politique flagrante ». Le texte fait état de la « campagne » menée contre le juge en charge de l’enquête, Tarek Bitar.

Les autorités libanaises ont failli également dans la protection de la liberté d’expression, d’après le rapport, qui rappelle « l’usage de la force » par les Forces de sécurité intérieure pendant les protestations face à la détérioration rapide des conditions de vie. L’organisation pointe du doigt « les services de renseignements militaires qui ont fait disparaître de force et torturé des manifestants détenus » et « le parquet militaire qui a poursuivi non moins de 35 manifestants ». Le texte s’attarde aussi sur les agressions contre les journalistes, revenant sur l’assassinat en février de « Lokman Slim, un intellectuel de premier plan critique du Hezbollah ».

Catégories marginalisées

Les droits des femmes n’ont pas connu de progression majeure cette année, souligne le texte qui mentionne néanmoins deux avancées en demi-teinte : le vote de la loi criminalisant le harcèlement sexuel en décembre 2020, mais « qui n’est pas aux normes internationales », et la modification de la loi sur les violences domestiques qui tient dorénavant compte des violences qui ne sont pas commises pendant le mariage, mais qui ne criminalise toujours pas le viol conjugal.

Le rapport de HRW s’attarde par ailleurs sur les abus commis à l’encontre des catégories marginalisées. Les travailleurs migrants en subissent beaucoup plus au Liban depuis la crise économique et la pandémie de Covid-19. Le texte cite l’alerte lancée par l’Organisation internationale du travail à ce sujet. Les personnes LGBTQ continuent de subir de multiples discriminations, et ont été touchées de manière disproportionnée par la crise économique, aggravée par les mesures de confinement.

Pour ce qui est des réfugiés, notamment syriens, « le gouvernement continue de mener des politiques visant à les contraindre à quitter le pays », selon le texte, qui dénombre quelque 6 000 refoulements, et mentionne les « graves atteintes aux droits humains » subies par ceux qui sont rentrés en Syrie. Il y est également précisé que « 90 % des familles syriennes au Liban vivent dans une pauvreté extrême et doivent de plus en plus s’endetter pour survivre ».

Le tableau n’est pas plus reluisant concernant les droits des enfants. Le rapport souligne que nombre d’enfants réfugiés syriens et d’enfants handicapés n’ont pas eu accès à une éducation digne de ce nom, et évoque les « défaillances des autorités en matière de planification ayant retardé le début de l’année scolaire 2021-22 » en raison de la pandémie et de la crise. 

Le rapport annuel de l’organisation internationale Human Rights Watch est accablant pour la situation au Liban, dont il décrit la détérioration évidente à tous les niveaux. Il cite des chiffres sans équivoque, comme les « plus de 80 % des habitants du pays qui n’ont pas accès aux droits fondamentaux » selon les Nations unies, ou encore « la livre libanaise qui a perdu 90 % de sa...

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