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Moyen-Orient - Golfe

Campagne pour les premières législatives au Qatar, mais pas de véritable débat

Les Qataris doivent élire le 2 octobre les 30 membres du conseil de la Choura, un organe législatif sans véritables prérogatives.

Campagne pour les premières législatives au Qatar, mais pas de véritable débat

L’acteur-présentateur Saïd el-Bourchaid (à gauche) au cours de sa campagne électorale, à Doha, le 19 septembre 2021. Karim Jaafar/AFP

La foule est modeste, mais l’acteur-présentateur Saïd el-Bourchaid prononce avec fierté un discours pour les toutes premières élections législatives au Qatar, une goutte d’eau de démocratie dans le désert politique de ce riche pays du Golfe gouverné par la famille régnante des al-Thani.

« C’est notre travail d’informer les électeurs et d’éduquer les gens », se félicite ce candidat vedette, arrivé sur un tapis rouge dans une salle de sport d’al-Wakrah, au sud de la capitale Doha. Quelques dizaines de Qataris en robe traditionnelle l’écoutent attentivement en sirotant du thé.

Les Qataris doivent élire le 2 octobre les 30 membres du conseil de la Choura, un organe législatif sans véritables prérogatives. Les membres de la Choura étaient auparavant nommés par l’émir, qui concentre toujours l’essentiel du pouvoir dans un pays où les partis politiques restent strictement interdits.

Ce scrutin constitue une petite et rare concession à la démocratie dans une région particulièrement hermétique au débat public. Mais elle ne devrait pas constituer un tournant pour le Qatar, selon les observateurs.

La Choura pourra certes proposer des lois, approuver le budget et révoquer des ministres, mais le tout-puissant émir aura un droit de veto.

Cette élection intervient dans le contexte d’une campagne de séduction menée par le petit émirat gazier, régulièrement vilipendé par les organisations de défense des droits humains, en particulier à l’approche de la Coupe du monde de football qui doit s’y tenir l’année prochaine.

Devant la foule, Saïd el-Bourchaid évite soigneusement les diatribes électorales d’usage : il mêle hymnes prudents aux droits des travailleurs ou des femmes et éloges convenus de la politique de l’émir, le cheikh Tamim ben Hamad al-Thani.

« Nous voulons rendre le système plus ouvert et aussi discuter des questions modernes », assure l’acteur en kandoura blanche, la robe traditionnelle portée par les hommes dans le Golfe.

La bonne personne

Les rues du pays ont été parsemées d’affiches électorales, mais la campagne de 14 jours s’est déroulée sans véritable débat et n’a pas porté sur des questions sensibles dans ce pays autocratique et très conservateur.

Sur les 284 candidats, seuls 28 sont des femmes. Pour soutenir Saïd el-Bourchaid, les électeurs masculins étaient cinq fois plus nombreux que les femmes, ces dernières étant séparées par un cordon en velours rouge.

« Je ne pense pas que le Qatar en tirera grand-chose en termes de législation ou de réforme nationale », estime Michael Stephens, chercheur au centre de réflexion Foreign Policy Research Institute.

Selon des sources diplomatiques, les familles et les tribus ont déjà organisé des scrutins internes officieux pour déterminer le candidat à élire. Et les travailleurs étrangers, qui représentent l’écrasante majorité de la population, ne pourront pas voter.

Nasser el-Kouwari y voit néanmoins « une avancée positive et très importante », espérant que les gens ne se contenteront pas de choisir les candidats « les plus proches du cercle familial ou amical ». « J’aimerais que nous choisissions la bonne personne au bon endroit », confie ce jeune électeur.

Leur mot à dire

Pour Danyel Reiche, professeur de sciences politiques à l’Université de Georgetown au Qatar, il s’agit d’« un pas vers la démocratie qui n’aurait peut-être pas eu lieu sans la tenue de la prochaine Coupe du monde » qui a braqué les projecteurs sur l’émirat. Reste à voir, selon lui, si la Choura « obtiendra plus de pouvoir ». « Le gouvernement a compris qu’il était temps d’avoir un système démocratique. Nous sommes le second pays du Golfe après le Koweït », dit un électeur d’une soixantaine d’années qui a requis l’anonymat.

Petit émirat pétrolier du Golfe, le Koweït est le seul pays de la région à connaître une vie parlementaire relativement vive, avec des députés élus qui n’hésitent pas à prendre certains ministres à partie. Mais là aussi, la famille régnante des al-Sabah garde les clefs du pouvoir.

« Nous allons passer par une phase d’apprentissage. Le moment est venu pour les gens d’avoir leur mot à dire », se réjouit l’électeur sexagénaire.

Gregory WALTON/AFP

La foule est modeste, mais l’acteur-présentateur Saïd el-Bourchaid prononce avec fierté un discours pour les toutes premières élections législatives au Qatar, une goutte d’eau de démocratie dans le désert politique de ce riche pays du Golfe gouverné par la famille régnante des al-Thani.« C’est notre travail d’informer les électeurs et d’éduquer les gens », se...

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