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Politique - Décryptage

Objectif US au Liban : les législatives de 2022

La déclaration de l’ambassadrice des États-Unis Dorothy Shea, à sa sortie jeudi du palais de Baabda, a marqué le paysage politique tout au long des deux derniers jours. À la fois le ton et le contenu de cette déclaration étaient différents de ceux auxquels les Libanais s’étaient habitués de la part de la diplomatie US depuis le début du mouvement de contestation le 17 octobre 2019.

De plus, le mouvement diplomatique qui a suivi la visite de Mme Shea à Baabda, notamment sa visite à la Maison du Centre, ainsi que celle de l’ambassadrice de France Anne Grillo à Aïn el-Tiné, puis la réunion entre les deux diplomates et l’ambassadeur d’Arabie saoudite, montre que quelque chose a changé dans l’approche diplomatique à l’égard du Liban. Pour certains, c’est l’aggravation des crises économique et sociale qui pousse les diplomates concernés par le Liban à réagir en appelant aussi clairement les différentes parties libanaises à former un gouvernement le plus rapidement possible.

Mais, selon un diplomate chevronné, ce changement d’attitude aurait une autre explication. Pour ce diplomate qui suit de près la situation aux États-Unis, le changement doit être attribué à une évolution dans l’approche américaine au Liban et dans la région. Après la politique des sanctions extrêmes et des pressions maximales sur l’Iran et ses alliés, notamment en Irak et au Liban, adoptée par l’administration de Donald Trump, la nouvelle équipe de Joe Biden a choisi une autre méthode que l’on appelle en termes stratégiques « la guerre douce ».

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S’il est vrai que la nouvelle équipe n’a pas encore définitivement mis au point les détails de sa stratégie pour le Moyen-Orient, il est clair qu’elle est actuellement en train de réévaluer la politique adoptée au cours des dernières années dans la région. Dans les cercles proches de la décision actuelle aux États-Unis, on estime que la politique étrangère de Donald Trump a été un échec. Il est vrai que les pressions et les sanctions ont fait mal aux populations des pays concernés, mais elles n’ont pas réussi à faire plier la direction iranienne, ni à affaiblir al-

Hachd al-chaabi en Irak, et encore moins le Hezbollah au Liban. Elles ont aussi contribué à ternir l’image des États-Unis dans le monde à travers l’appui direct à des guerres impopulaires et non réussies (comme celle du Yémen), des sanctions imposées même aux alliés (certaines sociétés françaises, dont des banques, par exemple) et une perte des valeurs démocratiques traditionnellement défendues par Washington.

L’administration Biden, qui sait qu’elle n’a pas beaucoup de temps – puisque le président américain a annoncé lui-même qu’il ne briguerait pas un second mandat –, estime donc que sa mission est de recadrer l’image des États-Unis dans le monde et de modifier l’approche précédente axée sur le défi et le durcissement des positions. Mais l’objectif ultime reste évidemment le même, celui d’assurer la suprématie des États-Unis dans le monde. Face à la montée de la Chine et même à l’augmentation de l’influence de la Russie au Moyen-Orient, la nouvelle administration chercherait ainsi à adopter une méthode plus douce. En tout cas, selon le diplomate précité, il est clair que cette administration ne compte pas mener de nouvelles guerres, les États-Unis n’étant pas prêts pour cela, mais en même temps, elle ne se dirige pas vers la conclusion de grands accords globaux, comme cela a été dit, qui consisteraient en un nouveau partage de l’influence dans le monde. La radicalisation des positions entre les États-Unis d’une part et la Chine et la Russie de l’autre serait ainsi la preuve que l’on ne se dirige pas vers de grands accords, mais plutôt vers de petites ententes.

C’est dans cet esprit que le diplomate précité estime que l’équipe Biden devrait se contenter de conclure de petits compromis, destinés à donner aux États-Unis un répit, pour pouvoir se renforcer face au véritable défi que représente la puissance grandissante de la Chine.

Au Liban et en Irak, qui sont les deux pays qui se ressemblent le plus aux yeux des Américains, il s’agirait donc de se fixer un objectif réalisable sans

heurts majeurs.

Dans ce contexte, toujours selon le même diplomate, l’objectif actuel des Américains serait de pousser vers un renversement de la majorité parlementaire au Liban et en Irak, dans le cadre des élections législatives. Après avoir lancé l’idée d’élections anticipées, et après avoir poussé le Premier ministre irakien à en accepter l’idée et à les fixer à mai 2021, et face au fait qu’au Liban, elles sont difficiles à réaliser en si peu de temps, les Américains se concentreraient actuellement sur la nécessité de maintenir les élections à la date prévue (mai 2022 pour les deux pays), tout en essayant de pousser leurs alliés à remporter une victoire claire et une majorité éclatante.

Pour cela, la priorité au Liban est donc actuellement de former un gouvernement qui serait en mesure d’organiser ces élections, tout en stoppant le processus d’effondrement du pays et de ses institutions. D’où l’insistance de l’ambassadrice des États-Unis, mais aussi d’autres diplomates, sur la nécessité de former le plus rapidement possible un gouvernement crédible et efficace. Ce gouvernement aurait pour mission principale de procéder aux réformes structurelles élémentaires et d’entamer un dialogue avec le Fonds monétaire international (FMI) pour non pas redresser la situation économique, mais arrêter l’effondrement financier et redonner un minimum de stabilité au pays. Tout cela afin de permettre la tenue d’élections législatives saines et retirer ainsi tout prétexte qui pourrait être invoqué pour les reporter. En même temps, il ne faut pas que le chef de l’État et son camp, ainsi que le Hezbollah, puissent tirer profit de ce retour au calme et s’en attribuer le mérite.

C’est donc une politique tout en nuance que les États-Unis et leurs alliés adoptent actuellement au Liban. L’idéal, pour eux, serait que le Liban se dote d’un gouvernement neutre dont aucun des membres ne serait candidat aux élections, un peu selon le modèle du gouvernement de Nagib Mikati en 2005 dont la mission s’était limitée à organiser le scrutin de mai 2005 (avril-juillet).

La déclaration de l’ambassadrice des États-Unis Dorothy Shea, à sa sortie jeudi du palais de Baabda, a marqué le paysage politique tout au long des deux derniers jours. À la fois le ton et le contenu de cette déclaration étaient différents de ceux auxquels les Libanais s’étaient habitués de la part de la diplomatie US depuis le début du mouvement de contestation le 17 octobre...

commentaires (17)

Sans les decryptages de Scarlett Haddad on ne comprendrait pas ce qui ce passe en pensant “librement”...car beaucoup se debatent en fantasmes qui se prouvent le plus souvent juste faux, et ne refletent que les souhaits irrealistes de certain.. Philippe Bardawil

Bardawil dany

10 h 24, le 31 mars 2021

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Commentaires (17)

  • Sans les decryptages de Scarlett Haddad on ne comprendrait pas ce qui ce passe en pensant “librement”...car beaucoup se debatent en fantasmes qui se prouvent le plus souvent juste faux, et ne refletent que les souhaits irrealistes de certain.. Philippe Bardawil

    Bardawil dany

    10 h 24, le 31 mars 2021

  • Selon une source très bien informée, cet article est un tissu de fantasmes de son auteure

    Lecteur excédé par la censure

    20 h 45, le 27 mars 2021

  • Et suivant la cousine au deuxième degré du jardinier de mon cousin, experte en politique internationale, les USA s’apprêtent à envahir le Liban... allons donc, un peu de sérieux svp. et de fact checking ne ferait pas de mal, à commencer par l’intention de Biden de briguer un second mandat selon.... lui même.

    Bachir Karim

    19 h 30, le 27 mars 2021

  • Il n'y a plus le Liban c'est une colonie iranienne, maudit HN????

    Eleni Caridopoulou

    18 h 40, le 27 mars 2021

  • Je suis contente d’avoir mis fin à mon abonnement à L’OLJ. Je me sens moins grugée lorsqu’ils censurent à tout va et surtout dès qu’on rappelle à Aoun son devoir de protéger le pays et de respecter ses citoyens sans le ménager. Comme si lui, employé du peuple prenait des gants pour s’adresser à nous ou pour nous assassiner . La presse est objective lorsqu’elle laisse le peuple exprimer son abjection aux actes et aux comportements de ceux qui sont sensés le représenter et le respecter et non de publier des discours insultants prononcés par des politiciens à l’encontre des citoyens qui paient leurs salaires et qui se retrouvent otages de leurs caprices et de leur cupidité. Si L’OLJ a peur des sanctions du pouvoir alors il faut qu’il arrête de publier leurs provocations car le peuple a un droit de réponse, il y va de la démocratie.

    Sissi zayyat

    17 h 21, le 27 mars 2021

  • Et si on disait que plus personne n’en à rien à fiche du Liban, de sa population, et de ses politiciens corrompus ? Cela ne serait pas plus réaliste ?

    TrucMuche

    17 h 13, le 27 mars 2021

  • Di2 l may may, ba3da mitl l 2orb3a be nos l jom3a!

    Nassar Jamal

    15 h 41, le 27 mars 2021

  • Quel est le comble d’un ambassadeur US au Liban? Avoir un nom qui se prononce "chiaa”. Lol...

    Gros Gnon

    15 h 18, le 27 mars 2021

  • L’OLJ. Continuez de censurer. A chaque censure vous perdez un peu plus de votre objectivité.

    Sissi zayyat

    14 h 02, le 27 mars 2021

  • en des termes moins hypocrites, khamenai, nasroullah & par ricochet aoun ont reussi a coincer les americains et a les obliger a composer avec eux ! Halleluja !

    Gaby SIOUFI

    08 h 59, le 27 mars 2021

  • Le diplomate chevronné pris à témoin plusieurs fois dans cet article... Pourquoi un journaliste doit il rapporter les dires des anonymes, au lieu de publier sa propre analyse sur le sujet ?

    Desperados

    08 h 42, le 27 mars 2021

  • VOILA LA DESINFORMATION QUI SAISIT AU VOL LES PAROLES DE SHEA ET LES COMPREND A L,ENVERS ET VEUT NOUS LES FAIRE GOBER A SA FACON. POURQUOI NE PAS NOUS DIRE QUE LES AMERICAINS FRAPPES D,UN COUP DE FOUDRE AMOUREUX DU HEZBOLLAH VEULENT UN GOUVERNEMENT HEZBOLLAHI ? NE PRENEZ PAS LES LIBANAIS POUR DES IMBECILES !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 12, le 27 mars 2021

  • "... Objectif US au Liban : les législatives de 2022 ..." - et moi qui croyais que c’était l’objectif de gendrillon. Comme quoi tout le monde peut se tromper...

    Gros Gnon

    08 h 08, le 27 mars 2021

  • C'est la politique d'Obama, notamment l'accord sur le nucléaire iranien et non celle de Trump au Moyen-Orient qui a été un échec. En mettant fin aux guerres désastreuses livrées par ses prédécesseurs et en parrainant les accords d'Abraham entre plusieurs pays arabes et Israël ce dernier a enregistre des succès sans précédant dans la région. Les "petits compromis" ( je vous cite) que Biden se propose de faire risquent de conforter hégémonie du regime des mollahs dans la region et au Liban

    Tabet Ibrahim

    07 h 57, le 27 mars 2021

  • Les sanctions americaines auraient eu au moins un effet de taille: reduire a neant les ambitions demeusurees du prince heritier jibran bassil dans sa course effrenee a la presidence de la republique.

    Goraieb Nada

    07 h 35, le 27 mars 2021

  • Si l'objectif des USA (la plus grande démocratie au monde) est de forcer des élections parlementaires à temps au Liban et en Iraq, alors sans hésitation, ce plan là est plus que parfait.   Trois précisions s'imposent :   1-Trump a la mentalité d'un businessman, c’est-à-dire, qu'il ne fait pas de guerres.  2-Biden semble continuer la politique Trump de longue haleine de pressions économiques maximum sur l'Iran et acolytes.   3-Contrairement à Trump, Biden n'a pas nommé d'envoyé spécial pour le Liban, ce qui veut dire que pour l'instant, les démarches des USA au Liban sont gérées par  l'ambassadrice. 

    Zovighian Michel

    06 h 00, le 27 mars 2021

  • Bof...

    Gros Gnon

    01 h 21, le 27 mars 2021

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