Les médiateurs dans le conflit afghan ont exhorté jeudi les talibans à renoncer à leur offensive de printemps, à l'issue de pourparlers à Moscou faisant partie des efforts se multipliant pour parvenir à la paix avant un retrait possible des troupes américaines du pays.
Cette rencontre à Moscou entre émissaires de Kaboul et des talibans, en présence de représentants russe, chinois, pakistanais et américain, intervient avant la date butoir du 1er mai, qui doit théoriquement voir Washington retirer ses militaires d'Afghanistan. Cette date a toutefois été remise en cause mercredi par le président Joe Biden.
A l'issue des discussions à Moscou, les médiateurs internationaux ont appelé dans une déclaration commune "toutes les parties au conflit en Afghanistan à réduire le niveau de violence, et le mouvement des talibans à ne pas déclarer d'offensive de printemps", qui met chaque année à rude épreuve les forces de Kaboul.
Quelques heures auparavant, le co-fondateur du mouvement taliban, Mullah Abdul Ghani Baradar, avait appelé à laisser les Afghans "décider de leur propre sort". "Le monde devrait prendre en compte les valeurs islamiques, l'indépendance et les intérêts nationaux du peuple afghan", a indiqué sur Twitter un porte-parole, résumant un discours prononcé à huis clos.
Le chef du conseil de réconciliation du gouvernement afghan, Abdullah Abdullah, a de son côté déclaré que Kaboul souhaitait accélérer les négociations et que "les deux parties entament leurs pourparlers et discussions dans une atmosphère différente" qu'à Doha, au Qatar où ont aussi lieu des pourparlers.
Gulbuddin Hekmatyar, autre membre de la délégation du gouvernement afghan et commandant militaire connu comme le "boucher de Kaboul", a estimé que la rencontre de jeudi à Moscou avait permis de sortir les négociations avec les talibans de "l'impasse".
La délégation afghane à Moscou comprenait un large éventail de personnalités, y compris des négociateurs à Doha, un ancien président et deux seigneurs de guerre accusés de crimes de guerre. Les rares femmes émissaires de Kaboul y étaient absentes.
"Une conversation sérieuse a eu lieu avec toutes les parties afghanes, dont le principal leitmotiv est qu'elles comprennent et sont prêtes à négocier la paix", a déclaré à l'issue de la réunion l'émissaire du Kremlin pour l'Afghanistan, Zamir Kaboulov.
"Retards inacceptables"
Plus tôt, après avoir reçu les différentes délégations, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait appelé Washington et les talibans à "rester attachés aux dispositions de l'accord" conclu par l'administration de l'ex-président Donald Trump en février 2020 au Qatar. Cet accord prévoit le retrait des 2.500 soldats américains d'ici au 1er mai 2021 en échange de garanties sécuritaires et d'un engagement des talibans à discuter avec Kaboul.
Le nouveau président des Etats-Unis, Joe Biden, a toutefois estimé mercredi qu'il serait "difficile" de tenir ce délai et les talibans l'ont aussitôt mis en garde contre tout retard. Washington a aussi proposé aux belligérants afghans la formation d'un gouvernement de transition incluant les talibans. Cette idée, soutenue par Moscou, a pour l'instant reçu un accueil peu enthousiaste de la part du pouvoir à Kaboul.
Les discussions à Moscou étaient organisées parallèlement à celles ayant commencé en septembre à Doha et à celles que la Turquie veut accueillir en avril à Istanbul.
M. Lavrov a dit "regretter que les efforts déployés pour lancer le processus politique à Doha n'aient pas encore donné de résultats", espérant que les discussions à Moscou "contribueront à créer les conditions nécessaires" à des progrès. Il a souligné que de nouveaux retards dans les négociations à Doha seraient "inacceptables" alors que "la situation militaro-politique se dégrade".
Les violences se sont intensifiées ces derniers mois dans tout l'Afghanistan malgré ces pourparlers. Dans ce contexte, le départ des Etats-Unis inquiète le gouvernement en place, dont l'autorité est contestée ou mise à mal sur plus de la moitié du territoire.
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