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Politique - Disparition

Massoud Achkar n’est plus, Achrafieh pleure un de ses héros

Celui qui était affectueusement surnommé Poussy, résistant dans l’âme, est décédé des suites de complications dues au coronavirus.

Massoud Achkar n’est plus, Achrafieh pleure un de ses héros

L’ex-candidat aux législatives de Beyrouth Massoud Achkar. Photo d’archives Facebook/Massoud Achkar

Depuis lundi matin, Achrafieh pleure Massoud Achkar, affectueusement surnommé Poussy depuis le début de la guerre en 1975. Un des premiers et plus proches compagnons du fondateur des Forces libanaises et ancien président assassiné, Bachir Gemayel, Massoud Achkar est décédé à 64 ans des suites de complications dues au coronavirus, douze jours après avoir été admis aux soins intensifs du centre universitaire LAU-hôpital Rizk, suite à la détérioration de son état de santé. C’était le jeudi 31 décembre. Deux jours plus tard, samedi, une marche aux flambeaux a été organisée à son intention place Sassine, suivie d’une veillée de prière devant le centre hospitalier.

Avec sa disparition, Achrafieh perd un de ses principaux soutiens, une figure charismatique qui, quarante-six ans durant, a défendu inlassablement les mêmes principes souverainistes et maintenu le même discours politique en faveur d’un Liban souverain, indépendant et libre pour lequel il aura plaidé jusqu’au dernier souffle. Ce sont ces mêmes principes qui l’ont poussé à porter les armes alors qu’il était tout juste âgé de 19 ans, au début de la guerre. Avec Bachir Gemayel et plusieurs autres camarades, dont nombreux sont tombés en cours de chemin sur les champs de bataille entre 1975 et la fin des années quatre-vingt, ils se sont engagés à protéger les quartiers chrétiens d’Achrafieh, de Saïfi, Rmeil et Médawar face d’abord à l’alliance dite palestino-progressiste puis à l’armée syrienne, et enfin aux milices dominant la partie ouest, à majorité musulmane, de la capitale.

Poussy Achkar était au cœur de la Résistance libanaise fondée par Bachir Gemayel qu’il a accompagné tout au long de son parcours : dans les rangs du parti Kataëb puis avec la fondation des Forces libanaises, jusqu’à l’assassinat de Bachir en septembre 1982.

Avec la fin de la guerre, il lâche les armes. Son combat ne s’achève pas pour autant. Le Liban venait d’entrer dans l’ère de l’occupation syrienne et de l’aliénation de l’État. La lutte qu’il mène pour le recouvrement d’une liberté et d’une indépendance spoliées prend une autre dimension, politique mais tout aussi acharnée. C’est cette logique qui le pousse à partir de 1988 à soutenir le général Michel Aoun, à l’époque chef d’un gouvernement de transition formé à la fin du mandat du président Amine Gemayel, dans sa bataille dite de libération contre les forces syriennes. Il s’oppose aussi, comme Michel Aoun, à l’accord de Taëf, qui a certes mis fin à la guerre, mais qui a dans le même temps scellé la mainmise syrienne sur le Liban.

Garant d’une ligne politique souverainiste au moment où plusieurs parties s’accommodaient de la tutelle syrienne, il continue de dénoncer celle-ci et de critiquer vivement, jusqu’en 2005 – année au cours de laquelle les forces syriennes ont été boutées en dehors du Liban après l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri –, l’alliance de dirigeants libanais avec le régime des Assad. À aucun moment il ne lâche prise, au mépris de sa propre sécurité.

Ce résistant dans l’âme, homme de terrain dévoué à la chose publique, n’a jamais cessé de gagner en popularité dans son milieu en dépit des vicissitudes de la vie politique. Pour nombre de ses amis et partisans, il était surtout un grand cœur, à la bienveillance et à la sollicitude exemplaires, toujours affable, souriant et attentif, proche des habitants du quartier qui l’a vu naître et grandir. Aux législatives de l’été 2000, en pleine tutelle syrienne, Achrafieh lui accorde une majorité écrasante de ses voix, mais le succès n’est pas au rendez-vous, en raison d’un fort taux d’abstention, et surtout d’une loi électorale inique taillée sur mesure et qui consacre surtout un déséquilibre au niveau de la représentation communautaire dans le but d’enlever son poids au vote chrétien et de barrer ainsi la voie à l’émergence de tout noyau parlementaire souverainiste.

Ce plébiscite populaire le pousse à se présenter deux autres fois consécutives aux élections pour le seul siège maronite de Beyrouth, mais sans réussir à accéder au Parlement, malgré un changement du découpage électoral. Après le départ des Syriens, ce siège est revenu aux Kataëb. Beyrouth a été représentée d’abord par la veuve de son ancien camarade de combat, Solange Gemayel, entre 2005 et 2009, puis par son fils, Nadim, à partir de 2009, tous deux aussi populaires que Massoud Achkar à Beyrouth I.

Face aux héritiers directs de Bachir Gemayel, Massoud Achkar décide d’incarner, sans succès, une synthèse politique entre ses idées souverainistes, et l’alliance avec le Courant patriotique libre de Michel Aoun et Gebran Bassil. Un choix tactique qui, à ses yeux, est supposé l’aider seulement à institutionnaliser son action politique, sans pour autant le faire basculer dans le camp du 8 Mars, celui du Hezbollah et de l’axe syro-iranien, auquel le CPL adhère après 2005. Ainsi, lors des consultations de 2009 puis de 2018, Massoud Achkar, qui revendique son autonomie, maintient un discours anti-Hezbollah tout en se présentant sur la liste aouniste.


Depuis lundi matin, Achrafieh pleure Massoud Achkar, affectueusement surnommé Poussy depuis le début de la guerre en 1975. Un des premiers et plus proches compagnons du fondateur des Forces libanaises et ancien président assassiné, Bachir Gemayel, Massoud Achkar est décédé à 64 ans des suites de complications dues au coronavirus, douze jours après avoir été admis aux soins intensifs du...

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