Sans cesse détruite et reconstruite depuis des millénaires
champs de bataille pour ceux qui la convoitaient
cimetière à ciel ouvert pendant les années noires de guerre
je la retrouvais sur le petit écran
reconnaissais à travers mes larmes les rues mais pas les immeubles
les noms des martyrs mais pas leurs visages souriants sur les troncs des arbres.
les survivants sortis des tranchées ont déblayé la haine avec les gravats
redressé les murs écroulés
remis des vitres aux fenêtres.
refait leur ville à l’identique (les murs pas les morts)
plus fastueuse, plus raffinée. Glamour.
Les jeunes s’éclataient dans les night clubs
les femmes sorties des abris retrouvaient leurs maisons
réparaient, raccommodaient remeublaient
réapprenaient la douceur pour oublier la violence affrontée à visage découvert
les exilés bouclaient leur valise, revenaient.
Grande leur confiance dans leur ville.
« Jamais plus ça ».
Jamais plus jusqu’au 4 août. Pompéi et Nagasaki réunies.
Pire qu’un tremblement de terre, un tremblement des cœurs
des morts sous les décombres des maisons mortes
des vivants à l’écoute d’un souffle d’une respiration sous les pierres.
Faute d’un être cher on récupère une chaise, un abat-jour, un livre, un album de famille qu’on feuillette avec l’espoir fou de retrouver à l’intérieur des pages un enfant, un père, une mère, un voisin.
Comment leur faire admettre qu’ils devront désormais vivre avec une photo ?