Nicosie réplique à l'enquête sur son dispositif "passeport contre investissement"

Le gouvernement chypriote a répliqué à l'enquête de la chaîne de télévision qatarie Al-Jazira selon laquelle son dispositif dit "passeport contre investissement", à destination de riches investisseurs, a pu bénéficier à des criminels. Al-Jaziera a rapporté que des dizaines de personnes ayant demandé ces fameux "passeport en or" sont sous le coup d'enquêtes criminelles, de sanctions internationales ou en train de purger des peines de prison.

Selon Nicosie, les allégations de la chaîne qatarie ne sont plus d'actualité depuis le durcissement du dispositif l'année dernière: "tous les individus mentionnés (...) remplissaient les conditions qui étaient en place à l'époque", a indiqué le ministère chypriote de l'Intérieur dimanche soir. "La République de Chypre a fait des changements successifs pour améliorer son programme", qui permet d'obtenir un passeport chypriote et donc européen pour les citoyens de pays tiers investissant d'importantes sommes d'argent dans l'île, a tenu à rappeler le ministère dans un communiqué. Nicosie a durci en février 2019 les conditions d'obtention de ses "passeports en or" après des pressions de la part de Bruxelles qui estime que le dispositif présente des risques et peut aider le crime organisé au sein de l'Union européenne. "Le changement le plus important assure la transparence, la crédibilité et un contrôle continu", a précisé le communiqué.

Selon Al-Jazira, qui a étudié des données de passeports qui ont fuité sans en révéler la source, de riches Russes liés au Kremlin, mais aussi des ressortissants chinois, "étaient prêts à payer des millions de dollars pour un passeport européen". Selon l'enquête de la chaîne qatarie, trente candidats au précieux sésame, dont la demande de passeport a été approuvée, faisaient l'objet de charges criminelles, dont ils ont été condamnés ou sanctionnés. Il n'est pas clair s'ils ont bel et bien reçu leur passeport. Quarante autres, qui ont réussi a obtenir le passeport chypriote, tiennent des fonctions sensibles politiquement dans leur pays d'origine, ce qui fait d'eux des personnes à "haut risque" selon les législations chypriote et européenne, rapporte Al-Jazira.

Le gouvernement de l'île méditerranéenne avait fait l'objet de critique l'année dernière après l'annonce que des membres de l'élite cambodgienne avaient obtenu des passeports chypriotes en 2016 et 2017.

Les "passeports contre investissement" ont été instaurés en 2013 à Chypre, après la crise financière qui avait durement frappé l'économie de l'île. Ils ont rapporté depuis des milliards d'euros au pays.

Selon les dernières règles en vigueur, un citoyen d'un pays hors UE obtiendra un passeport chypriote en échange d'un investissement de 2,5 millions d'euros, qui peut consister en l'achat d'une résidence dans l'île.