
Un passager de l’avion de Mahan Air ensanglanté, après que le pilote a effectué une manœuvre pour échapper à deux avions de chasse américains jeudi. Capture d’écran d’une vidéo diffusée par l’agence de presse iranienne IRIB
Un regain de tension entre Téhéran et Washington est palpable depuis jeudi soir, après qu’un avion de ligne de la compagnie iranienne Mahan Air, se rendant à Beyrouth, a été approché au-dessus de la Syrie par deux avions de combat américains. L’avion a finalement pu atterrir sans encombre le soir même à l’Aéroport international de Beyrouth (AIB), mais cet incident alimente les spéculations sur le déclenchement d’un nouveau conflit armé dans la région, à l’heure où les tensions entre l’Iran et les États-Unis vont crescendo.
Contacté par L’Orient-Le Jour, le directeur de l’Aviation civile à l’AIB, Fady el-Hassan, a assuré que l’avion faisait partie des vols programmés et transportait 140 passagers libanais et iraniens. Selon M. Hassan, l’incident a fait un seul blessé, une personne âgée qui a dû être hospitalisée suite à l’atterrissage de l’avion pour un problème de tension artérielle. Une source de sécurité libanaise citée par l’AFP indique pour sa part que l’incident a fait quatre blessés légers.
L’avion, effectuant la liaison Beyrouth-Téhéran, a été approché par deux F-15 américains alors qu’il passait jeudi au-dessus de la région de Tanf (sud-est de la Syrie) où se trouve une base militaire américaine. « Le pilote de l’avion iranien a eu une conversation avec les pilotes des deux chasseurs (...), ils se sont présentés comme américains », explique l’agence de presse iranienne IRNA, citée par l’AFP. La télévision publique iranienne a diffusé une vidéo de passagers en panique qui hurlent alors que l’avion de ligne semble tenter d’échapper à un avion de combat. Le pilote de l’avion commercial a réduit rapidement l’altitude pour éviter d’entrer en collision avec le chasseur et plusieurs passagers ont été blessés, selon la télévision. Sur les images, on voit des passagers blessés, l’un a le front couvert de sang et l’autre par terre, le visage crispé. Un seul avion de chasse est visible volant à proximité.
Manœuvre délibérée ?
Le centre de commandement américain, qui supervise les opérations américaines au Moyen-Orient, a confirmé dans un communiqué qu’un de ses F-15 en « mission aérienne de routine » avait approché l’avion iranien au-dessus de la Syrie. « L’inspection visuelle » s’est faite à 1 000 mètres de distance et a été menée « conformément aux normes internationales », selon le communiqué. « Une fois que le pilote du F-15 a identifié l’avion comme un avion de passagers de Mahan Air, il s’est éloigné de l’appareil en toute sécurité. »
« Il se peut que les Américains aient suspecté qu’il s’agissait d’un avion militaire iranien. Ils se sont alors rapprochés pour s’en assurer », explique le général à la retraite Khalil Hélou à L’Orient-Le Jour. « Il se peut également qu’ils aient effectué cette manœuvre délibérément pour augmenter la pression sur l’Iran », ajoute-t-il. Selon le général Hélou, « la distance de 1 000 mètres n’est pas dangereuse, mais le pilote a probablement paniqué ». « Il a alors délibérément perdu de l’altitude pour échapper aux avions américains », explique le militaire à la retraite qui souligne que le couloir aérien où l’incident a eu lieu est emprunté en permanence par Mahan Air.
Comme on pouvait s’y attendre, l’incident a provoqué la colère des Iraniens qui n’ont pas tardé à hausser le ton. « S’il arrive quoi que ce soit à l’avion sur le chemin du retour, l’Iran tiendra les États-Unis pour responsables », avait déclaré jeudi soir le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Abbas Moussavi, cité par l’agence IRNA.
Des messages de protestation ont été adressés à l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et à l’ambassade de Suisse à Téhéran, qui représente les intérêts des États-Unis en Iran en l’absence de relations diplomatiques entre les deux pays, a indiqué le porte-parole des Affaires étrangères iraniennes. Selon IRNA, le représentant de l’Iran à l’ONU écrira bientôt une lettre « au Conseil de sécurité et au secrétaire général de l’ONU » pour dénoncer « la menace posée à l’avion de passagers de Mahan Air ». Les avions de chasse américains pourraient avoir soupçonné la présence à bord de l’avion d’un proche de Hachem Safieddine, président du conseil exécutif du Hezbollah, indique pour sa part notre informateur Mounir Rabih, faisant état de rumeurs non confirmés à ce sujet. Contacté par L’OLJ, un analyste proche du Hezbollah dément pour sa part la présence d’une personnalité iranienne ou libanaise proche du parti chiite à bord de l’avion, « ce qui exclut l’hypothèse d’une attaque », selon lui. « Les Iraniens ont ouvert une enquête pour voir si leur pilote est sorti du couloir aérien habituel et a survolé la zone dite 55 que les Américains considèrent comme une zone interdite au trafic aérien. Si ce sont les Américains qui ont empiété sur le couloir aérien emprunté par Mahan Air, l’Iran portera plainte auprès du Conseil de sécurité », assure cet analyste.
Le Hezbollah a condamné l’incident dans un communiqué publié hier. « Il s’agit d’un acte de terrorisme qui aurait pu avoir des conséquences d’une grande ampleur pour la région. Cette agression contre cet avion qui transportait notamment des Libanais appelle une prise de position internationale claire contre les États-Unis, qui sont une force d’occupation du territoire et du ciel syrien », indique le parti, qui exprime également sa solidarité avec l’Iran et la Syrie.
« Ne pas offrir de cadeau à Netanyahu »
L’incident de l’avion iranien a ravivé les craintes au Liban d’une riposte du Hezbollah, d’autant que le parti chiite a perdu un de ses combattants lundi, tué lors d’une frappe israélienne en Syrie. D’autant plus que l’armée israélienne procède, depuis mardi, au renforcement de ses positions à la frontière avec le pays du Cèdre. Tel-Aviv a même annoncé hier, par le biais du porte-parole arabophone de ses forces armées Avichay Adraee, sa volonté de continuer dans ce sens. « L’armée israélienne va modifier son dispositif dans les zones militaires et résidentielles à la frontière avec la Syrie et le Liban, afin de renforcer la frontière nord », a annoncé Adraee sur son compte Twitter.
Selon notre informateur Mounir Rabih, le Hezbollah s’apprêterait bel et bien à répondre à l’attaque israélienne qui l’a ciblé lundi en Syrie, mais ce serait sans doute une réponse symbolique. Cette riposte interviendrait probablement avant le 14 août, date de la « victoire » du Hezbollah lors de la guerre de juillet 2006 qui l’a opposé à l’État hébreu.
Le général Khalil Hélou estime improbable toute possibilité de riposte de la part du Hezbollah dans un futur proche. « Le parti chiite n’a jamais riposté lorsqu’il s’agissait d’un de ses combattants tués en Syrie. Il contre-attaque uniquement quand un de ses membres est tué au Liban, il s’agit d’un accord tacite avec l’État hébreu », souligne-t-il. Et pour l’analyste proche du Hezbollah, le parti chiite est assez lucide pour ne pas se laisser entraîner dans un nouveau conflit qui servirait les intérêts d’Israël. « Le Hezbollah prend en considération le fait que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu essaie de le mener vers la confrontation afin de regagner en popularité, surtout après les manifestations qui réclament sa démission », estime cet analyste. Depuis plusieurs semaines, des manifestants israéliens accusent M. Netanyahu de corruption et dénoncent sa gestion de la pandémie de coronavirus. « Le Hezbollah choisit lui-même où et quand il ripostera à la dernière attaque israélienne. Mais il est clair qu’il ne compte pas offrir de cadeau à M. Netanyahu », conclut l’analyste.
Les pauvres ... en tant que pilote de loisir ... on nous apprend à ne pas rentrer dans l’espace aérien de moins de 300 mètre d’un autres avions et pour les a ion de chasse ça passe à plus de 900 m ... donc si vraiment les avions US étaient à plus de 1000m alors les pauvres pilotes iraniens ont juste voulu faire du sensationalisme comme a leur habitude
15 h 14, le 27 juillet 2020