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Sport

Les « précaires » du tennis craignent de ne pas s’en sortir

Derrière le lucratif top 100, beaucoup de joueurs complètent leurs maigres revenus en entraînant ou en jouant dans des championnats de clubs.

La Géorgienne Sofia Shapatava, 375e joueuse mondiale, plaide la cause des « sans-grade » de son sport auprès de la Fédération internationale de tennis. Photo DR

Déjà condamnés à la précarité la majeure partie de l’année, de nombreux joueurs de tennis au classement modeste craignent de ne plus pouvoir joindre les deux bouts avec l’arrêt des tournois consécutif à la pandémie de Covid-19. Un risque qu’entend dénoncer Sofia Shapatava, 375e joueuse mondiale, qui a plaidé la cause des « sans-grade » de son sport auprès de la Fédération internationale de tennis (ITF). La Géorgienne réclame une aide pour les centaines de joueurs qui ont perdu leur gagne-pain avec l’interruption des circuits masculin et féminin pour trois mois. « Les joueurs classés au-delà de la 250e place ne seront plus capables de s’acheter de la nourriture d’ici à deux ou trois semaines », prévient Shapatava.

La joueuse de 31 ans se montre pessimiste quant à sa requête. « Honnêtement, je ne pense pas » que l’ITF y répondra favorablement, a-t-elle dit. « Ils m’ont répondu qu’ils étaient très occupés et qu’ils reviendraient vers moi dès que possible. Mais, après cet e-mail, ils ne m’ont plus répondu », regrette-t-elle. Elle a lancé la semaine dernière une pétition appelant à un soutien financier de l’ITF, qui a réuni à ce jour près de 1 000 signatures. « J’ai lancé cette pétition pour aider les joueurs de tennis à être écoutés par l’ITF, après avoir parlé à beaucoup de personnes que je connais, de leurs plans pour les trois prochains mois et réalisé que certains ne pourraient même pas s’acheter à manger », a écrit la Géorgienne sur son blog. « Mon problème, c’est que mon sport va mourir. Tel qu’il est, il va mourir parce que les joueurs classés au-delà du 150e rang mondial ne pourront pas jouer », a-t-elle continué.

Shapatava, professionnelle depuis 16 ans, participe principalement à des tournois secondaires de l’ITF, un univers bien lointain des grands chelems et des multimillionnaires Serena Williams et Roger Federer. Elle a remporté 354 000 dollars dans sa carrière en près de 1 500 rencontres disputées, simple et double combinés. Depuis janvier, elle a joué à Andrézieux-Bouthéon, dans la Loire, ainsi que dans quatre tournois aux États-Unis : Midland (Michigan), Nicholasville (Kentucky), Rancho Santa Fe (Californie) et Las Vegas (Nevada). Avec, au total, seulement 3 300 dollars glanés. Pourtant, par rapport à beaucoup d’autres, Shapatava est bien nantie.

105 dollars en 2020

Les classements, ATP pour les hommes et WTA pour les femmes, comptent chacun plus de 1 000 joueurs. Parmi les nombreuses joueuses, figure par exemple la Russe Ksenia Kolesnikova, classée 1 292e avec seulement 3 points à la WTA, qui n’a remporté que 105 dollars en 2020.

Derrière le lucratif top 100, beaucoup de joueurs complètent leurs maigres revenus en entraînant ou en jouant dans des championnats de clubs en Europe. Mais ces sources de revenus fiables se sont taries après que les gouvernements de la plupart des pays du monde eurent interdit les rassemblements pour lutter contre la pandémie de Covid-19. La saison sur terre battue dans sa totalité a été anéantie dans la foulée du report du tournoi de Roland-Garros, à septembre-octobre, alors qu’il se tient traditionnellement entre mai et juin. Il pourrait en être de même pour Wimbledon, dont les organisateurs réfléchissent à une annulation pure et simple.

La Britannique Tara Moore, 447e mondiale, n’a empoché que 2 800 dollars depuis le début de l’année, mais a engrangé 473 750 dollars depuis le début de sa carrière, grâce notamment à des invitations à Wimbledon. En 2016, sa qualification pour le second tour du tournoi londonien lui avait rapporté 62 000 dollars. « Il y a des choses plus importantes, comme la vie et la mort, mais beaucoup de joueurs de plus petits pays (sont) privés du moindre revenu, privés de la moindre aide car ils sont considérés auto-entrepreneurs », a écrit Tara Moore en soutien à la pétition lancée par Shapatava. « Ce sera dur pour beaucoup de joueurs de survivre lors des prochains mois », a-t-elle craint.

Alla Kudryavtseva, ex-n°15 mondiale en double et qui a empoché plus de 3 millions de dollars depuis ses débuts professionnels, soutient également le mouvement. « J’ai des économies, je ne suis pas inquiète. Mais qu’en est-il des juniors qui ont choisi de faire carrière dans le tennis et qui sont en pleine transition vers le monde professionnel ? Qui n’ont encore aucune chance de faire quelque économie que ce soit ? Qui ont peut-être eux-mêmes investi de l’argent ? » a interrogé la Russe de 32 ans.

Dave JAMES/AFP

Déjà condamnés à la précarité la majeure partie de l’année, de nombreux joueurs de tennis au classement modeste craignent de ne plus pouvoir joindre les deux bouts avec l’arrêt des tournois consécutif à la pandémie de Covid-19. Un risque qu’entend dénoncer Sofia Shapatava, 375e joueuse mondiale, qui a plaidé la cause des « sans-grade » de son sport auprès de la...

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