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Culture - Exposition

Quand la mémoire prend des couleurs...

Son univers est marqué par la nostalgie de sa ville et ses œuvres ont d’abord pour objet la quête d’une émotion poétique. À la galerie ArtLab, avec un talent bien à elle, Audrée Anid ranime les clichés et les personnalise.

Des images nimbées de nuages colorées qui illuminent un ciel nostalgique... Photo DR

Installée il y a quelques années dans son studio à Brooklyn, Audrée Anid, artiste multimédia, comme elle se plaît à se définir, élabore un procédé né de son engouement pour la photographie et de sa formation académique de peintre. « Il y avait toujours une palette qui traînait dans le coin, alors spontanément j’allais faire se rencontrer mes deux passions. » C’est ainsi qu’un coffret de photographies récupérées de la maison familiale de Beyrouth, ville de ses origines, allait s’ouvrir et se voir éclabousser de toutes les couleurs pour se doter d’une nouvelle vie. Voilà comment a germé cette idée, de combiner la photographie à la peinture et ainsi de transformer chaque cliché photographique en une sorte de nouvelle œuvre indépendante comme un objet à l’identité nouvelle.

Revoir ses classiques

Elle est née en 1990 dans le Michigan et a grandi dans le Bronx (New York). Titulaire d’un B.A. de l’Université Wesleyan du Connecticut et d’un M.A. du Teachers College de l’Université Columbia de New York, le travail de cette artiste libano-américaine couvre la photographie, la peinture et la gravure.

À l’université où elle étudie et pratique la peinture à l’huile sur grands formats, son point de départ a souvent été les images. Audrée Anid avoue son penchant pour la photographie analogue.

« Il y a dans la photo argentique comme une sorte d’homogénéité de matière entre le sujet et les images qu’on en fait, une espèce de langage et d’échange énergétique… »

Par ce qu’elle contient de transmission, d’intelligence du geste mais aussi du temps octroyé à l’ouvrage, la photographie analogue est un témoignage de l’existant, souvent liée à une inquiétude du temps qui passe, à l’encontre de la photographie numérique qui voue une fascination à l’impermanence, aux images immédiatement diffusées sur les réseaux sociaux, comme une distinction d’une société en éternelle mouvance.

Pour Lacan, la photographie contient sa part de refoulé et d’inconscient comme la mémoire de ce que l’on tend à oublier. C’est précisément cette dynamique qui rejaillit dans Memorial Passageway, la première exposition en solo à Beyrouth d’Audrée Anid. Elle laboure le passé, comme dans une urgence de récit photographique qu’elle modifie, plus que dans un désir de reconnaissance artistique ou mercantile, car pour elle la photo participe à sa manière de voir le monde ou de le revoir.

Qu’est-ce que la peinture apporte à la photographie ?

Une série de photographies, au format couleur 35 mm, transformées par des superpositions colorées de peinture à l’huile, dénoncent le regard qu’Audrée Anid porte sur la ville de Beyrouth et témoignent de son intérêt pour cette cité en perpétuel changement. Les œuvres présentées dans cette exposition chez ArtLab comprennent des photographies d’albums que l’artiste a récupérées de l’appartement de ses grands-parents à Beyrouth et des photographies prises par elle-même à chaque retour en vacances. « Depuis quatre ans, je ne viens jamais sans mon appareil suspendu à mon cou, pour réaliser à chaque fois l’évolution surprenante des rues de Beyrouth. Garder les clichés dans leur format d’origine, c’est inviter le spectateur à rentrer dans l’intimité et de mon travail et de la ville, et à prendre son temps pour lire chaque détail évocateur », dit-elle. Modifiées en géométrie ludique par des aplats de formes ou de lignes, nimbées de nuages colorées qui illuminent un ciel nostalgique, en transparence ou en aplats opaques, l’artiste multiplie les techniques (tantôt à la brosse tant à la spatule et tantôt par un effet de décollement) afin de traduire par tous les moyens des impressions d’un instant et le saisissement du temps présent ou celui jauni par les années.

Dans un désir de réanimer la mémoire, la liberté de son pinceau fait de la rencontre avec ses clichés un moment de grande poésie et d’intimité.

« Memorial Passageway », jusqu’au 31 août, ArtLab Gemmayzé, Beyrouth, Liban.

Installée il y a quelques années dans son studio à Brooklyn, Audrée Anid, artiste multimédia, comme elle se plaît à se définir, élabore un procédé né de son engouement pour la photographie et de sa formation académique de peintre. « Il y avait toujours une palette qui traînait dans le coin, alors spontanément j’allais faire se rencontrer mes deux passions. » C’est...

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