Rechercher
Rechercher

Culture - Exposition

Comment récupérer l’ombre de Beyrouth ?

En seize toiles et une dizaine d’aquarelles, Mohammad Abdallah esquisse le portrait de Beyrouth la jolie, à la galerie ArtLab*.

« Nous sommes devenus l’ombre de nos ombres », affirme Mohammad Abdallah qui expose ses toiles chez ArtLab.

La ville de Beyrouth serait-elle au féminin ou au masculin ? Si l’on demande à Mohammad Abdallah, qui dépeint le passé de la capitale libanaise (l’ayant bien connue), il répond d’emblée qu’elle est les deux réunis.

Le joli Beyrouth ou Beyrouth la jolie était cette ville bigarrée, féconde et sensuelle par ses saveurs et ses senteurs. Conviviale et hospitalière, elle accueillait des personnes issues de divers pays ou milieux, sans les différencier les unes des autres. Bruyante, peut-être, elle peut être aussi calme et apaisante, ployant sous une chape de chaleur et de lumière réconfortantes. C’est cette Beyrouth du passé que raconte Mohammad Abdallah par des couleurs fortes et puissantes, mais aussi par des transparences d’aquarelliste.

Impressionniste des mots

Les personnes qui circulent dans la ville, que ce soit le marchand de kaak traînant un chariot, le vendeur de quatre saisons conduisant sa charrette à mulet ou encore les cyclistes et les couples à mobylette, expriment par un minimalisme de couleurs et sans fioriture aucune une certaine douceur de vivre. Ils dessinent leurs ombres sur le sol, non derrière eux, mais devant eux. Erreur ? Pas du tout ! Un détail bien volontaire et prémédité, précise l’artiste, « qui traduit toute ma démarche ». « Nous sommes devenus l’ombre de nos ombres, dit-il encore. Nous vagabondons à la recherche d’un passé. » Peut-être que ce passé-là, c’est comme l’exprime le réalisateur chinois Wong Kar-wai, « cette ombre qui reste attachée à vous ». C’est cette ombre-là devenue fantomatique avec le temps que l’artiste essaye de retrouver, en tout coin de la capitale, dans cette beauté qui tend à disparaître. Il y a quelque chose de suranné dans l’image du musée Sursock autrefois couvert de palmiers et actuellement entouré de deux ou trois arbres esseulés. Ou cette rambarde de la Corniche où il faisait bon s’asseoir et regarder la mer et qui est devenue un simple garde-fou de la Mare nostrum.

Ce sont des impressions de beauté et de bonheur que l’artiste reproduit par touches colorées. En aplats de teintes harmonieuses qu’il transforme tel un alchimiste rendant ainsi le jaune violacé ou en touches aqueuses très légères traduisant l’évanescence de la ville, il exprime la nostalgie de ce qui n’est plus. Et pourtant aucun pathos n’y transparaît et malgré la mélancolie qui baigne le sujet, les couleurs fortes effacent toute idée de tristesse. Profondément inspiré par les miniatures islamiques, l’artiste se suffit uniquement de deux plans pour traduire sa pensée.

À quoi servent les 3 ou les 4 dimensions quand on peut le dire simplement par un simple plan évocateur ? Le travail de Mohammad Abdallah a beaucoup évolué avec le temps. Infatigable et sans cesse à l’écoute du pouls de sa ville, il a emmagasiné les émotions et les impressions. Son esprit s’est regorgé de couleurs et de senteurs. L’abstrait a également laissé la place au figuratif. Et les acteurs de la toile (autant les personnages que les objets) participent, dans ce travail récent exposé à la galerie ArtLab, à la reconstruction d’un passé que l’artiste désire réveiller.

Galerie ArtLab

Gemmayzé. Jusqu’au 24 novembre.

La ville de Beyrouth serait-elle au féminin ou au masculin ? Si l’on demande à Mohammad Abdallah, qui dépeint le passé de la capitale libanaise (l’ayant bien connue), il répond d’emblée qu’elle est les deux réunis. Le joli Beyrouth ou Beyrouth la jolie était cette ville bigarrée, féconde et sensuelle par ses saveurs et ses senteurs. Conviviale et hospitalière, elle accueillait...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut