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Liban - Campagne électorale

La LADE pointe des « abus » en matière de financement électoral

L’association trouve le timing de la CEDRE « suspect ».

Le directeur exécutif de la LADE, Omar Kaboul, lors du lancement de la campagne d’observation.

Ingérences extérieures, versement d’argent politique, confusion entre publicité et information électorale, telles sont quelques-unes des irrégularités dénoncées par l’Association pour la démocratie des élections (LADE) et consignées dans un second rapport qui vient d’être rendu public.

Tablant sur plusieurs semaines d’observation du panorama électoral et après avoir vérifié les informations figurant dans ce rapport, l’association égrène les pratiques qui « entachent le processus électoral et violent certaines dispositions de la loi ».

Dans son rapport, la LADE déplore en premier lieu l’organisation de la Conférence économique pour le développement par les réformes et avec les entreprises (CEDRE) le 6 avril à Paris, soit à « quelques semaines à peine des élections », un timing on ne peut plus « douteux » selon l’association. D’ailleurs, souligne le rapport, des lignes de crédit et des promesses d’aides y ont été décidées sur la base d’engagements faits, côté libanais, par « un gouvernement dont la composition sera très probablement modifiée au lendemain des législatives, la prochaine équipe pouvant ne pas avoir les mêmes orientations économiques », précise le texte. Pour la LADE, ce rendez-vous peut être considéré comme « un soutien international à l’actuel gouvernement dont les membres ne manqueront pas de l’exploiter dans leurs campagnes électorales respectives ».

L’association met par ailleurs l’accent sur certaines activités entreprises par des diplomates qu’elle dénonce comme étant « une influence de la part des diplomaties étrangères » dans les campagnes électorales de certains candidats. Le rapport cite notamment une déclaration de la part du guide suprême de la révolution islamique, Ali Khamenei, dans laquelle il exprime sa satisfaction de voir se concrétiser l’alliance chiite entre le Hezbollah et Amal, à plusieurs occasions. Également critiquée, la visite, le 30 mars dernier, du chargé d’affaires de l’ambassade d’Arabie saoudite Walid al-Boukhari et de l’ambassadeur des Émirats arabes unis, Hamad al-Chamsi, à la mosquée Oumaoui à Baalbeck « où ils ont participé à la prière et rencontré l’un des candidats du courant du Futur ».

Une grande partie du rapport a été consacrée à l’argent politique versé dans le cadre des campagnes et au plafond des dépenses fixé par la loi.  La LADE commence par rappeler que le plafond des dépenses prévu par la loi « est trop élevé » et souligne qu’il contribue ainsi « à exacerber l’inégalité entre les candidats ». L’association cite l’exemple de la circonscription du Liban-Sud III, où le plafond des dépenses atteint les 1 735 000 dollars. Le plafond est calculé selon le nombre de listes en présence et le nombre de candidats sur chaque liste.


(Lire aussi : Enquête : comment l'argent influence le résultat des élections libanaises)


Cependant, précise l’association, les dépenses électorales ne se limitent pas aux frais directs déboursés, mais elles comprennent des prestations et des services de tout genre qui peuvent parfois être sous forme de dons. Le rapport effectue une distinction entre les « pots-de-vin en nature » qui sont directement versés aux électeurs, et les prestations et services qui leur sont octroyés et « qui doivent être interrompus durant la période de la campagne électorale puisqu’ils sont de la même nature que les pots-de-vin ». L’association déplore au passage le fait que la loi électorale ainsi que le code pénal libanais (articles 351 et 356) ne prévoient aucun mécanisme pour évaluer ce type de violations et y mettre fin, la Commission de supervision des élections n’ayant pas non plus les prérogatives nécessaires pour cela.

À ce propos, le rapport cite les annonces publiques faites par les candidats sur les services qu’ils ont offerts pendant plusieurs années, donnant pour exemple Fouad Makhzoumi, candidat à Beyrouth II, qui a égrené sur une chaîne de télévision « toutes les aides offertes par ses associations caritatives depuis 2009 ». Un autre exemple est donné sur l’annonce faite par W’iam Wahhab, candidat au Chouf-Aley, qui, sur l’un des médias, a appelé les électeurs en Syrie, notamment dans la région druze de Soueida, à venir voter, s’engageant à payer leurs dépenses. 

Le rapport fait état par ailleurs du témoignage confié par un électeur de Qabb Élias, dans la circonscription de Zahlé. Ce dernier affirme, « preuve à l’appui » selon la LADE, que l’un des employés auprès du candidat Michel Daher (liste CPL-Futur) s’est engagé à lui payer 1 000 dollars par voix. Également mentionnées, les aides financières que verse le candidat de la Békaa Abdel Rahim Mrad à la municipalité de Mdoukha.

La LADE dénonce enfin la politique de la carotte et du bâton à laquelle recourent plusieurs relais locaux (les chefs de clan, les moukhtars, les édiles, etc.) en exerçant parfois du « chantage affectif » sur les électeurs pour les inciter à voter en faveur d’un candidat donné, des pratiques qui peuvent aller « jusqu’aux menaces dans certains cas ».

Tout un chapitre du rapport est consacré par ailleurs à la confusion que font sciemment les médias entre publicité et information électorale, dans le but de faire payer aux candidats toute apparition ou couverture médiatique censée être à l’origine et selon la loi « fournie gratuitement ».



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commentaires (1)

Bravo la LADE, mais pensez-vous nous apprendre quelque chose de nouveau ou nous scandaliser? Mais voyons, ce sont des pratiques tellement établies dans nos mœurs électorales depuis des décennies que, si vous nous appreniez qu’il y avait ne serait-ce qu’une minime amélioration qu’on ne vous croirait pas! Dans une république de ploutocrates, avec mœurs tribales féodales, programmes politiques bidon, et corruption rampante, qu’attendez-vous de ce citoyen aigri, écœuré, d’autre que de se vendre au plus offrant, quémander des faveurs pécuniaires et faire croire qu’il achète leurs slogans publicitaires? Vous pensez que nous vivons dans une démocratie de droit où vous pouvez demander des comptes et pénaliser les contrevenants? Ben, voyons, mais, au moins vous redonnez courage aux nombreuses gens honnêtes et qui croient encore dans notre pays!

Saliba Nouhad

03 h 03, le 19 avril 2018

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Commentaires (1)

  • Bravo la LADE, mais pensez-vous nous apprendre quelque chose de nouveau ou nous scandaliser? Mais voyons, ce sont des pratiques tellement établies dans nos mœurs électorales depuis des décennies que, si vous nous appreniez qu’il y avait ne serait-ce qu’une minime amélioration qu’on ne vous croirait pas! Dans une république de ploutocrates, avec mœurs tribales féodales, programmes politiques bidon, et corruption rampante, qu’attendez-vous de ce citoyen aigri, écœuré, d’autre que de se vendre au plus offrant, quémander des faveurs pécuniaires et faire croire qu’il achète leurs slogans publicitaires? Vous pensez que nous vivons dans une démocratie de droit où vous pouvez demander des comptes et pénaliser les contrevenants? Ben, voyons, mais, au moins vous redonnez courage aux nombreuses gens honnêtes et qui croient encore dans notre pays!

    Saliba Nouhad

    03 h 03, le 19 avril 2018

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