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Liban - Législation

Raï met en garde contre une implantation maquillée

Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a vivement dénoncé le week-end dernier l’article 50 (ou 49, une confusion régnant sur le numéro de l’article – que L’Orient-Le Jour n’a pas été en mesure de dissiper hier) de la loi du budget 2018 votée le 29 mars, en vertu duquel « tout ressortissant arabe ou étranger qui achète une unité résidentielle au Liban peut obtenir un permis de séjour permanent ». L’article, qui profite également à l’épouse et aux enfants mineurs de l’acheteur, impose une condition :  « La valeur du bien acquis ne doit pas être inférieure à 1 milliard cinq cent millions de LL (1 million de dollars) s’il est situé dans Beyrouth, et à 750 millions de LL (500 000 dollars) s’il se trouve dans les autres régions. »

À l’heure où le problème de l’implantation des étrangers se pose de manière accrue, cette disposition permettant aux acquéreurs étrangers d’obtenir une résidence définitive a donc inquiété le patriarche maronite, qui s’est demandé si elle ne constitue pas « un prélude à l’obtention de la nationalité et à l’implantation, en violation de la Constitution ». À deux reprises (samedi, lors de l’ordination de deux évêques à la basilique Notre-Dame du Liban à Harissa, et dimanche, au cours de la messe dominicale à Bkerké), Mgr Raï a évoqué « cette loi insérée comme par magie dans le budget 2018 », dénonçant « une largesse dans la vente de la terre libanaise ». « Qui sont les individus et les sociétés propriétaires de ces appartements à vendre ? Y aurait-il des marchés financiers et politiques derrière ces offres nocives pour le pays ? Et au profit de qui ? » s’est en outre interrogé le prélat maronite, mettant en garde contre l’implantation, « à l’instar, a-t-il dit, de ce qu’a produit le décret sur la naturalisation (1994) ». S’attardant sur ce point, le patriarche a déploré le fait que « le ministère de l’Intérieur n’a pas exécuté la décision du Conseil d’État qui avait invalidé ce décret ».

Et Mgr Raï de souhaiter que « les responsables adoptent une politique d’habitat à travers des projets permettant aux Libanais de se procurer un logement à des conditions favorables et de rester ainsi sur leur terre natale ». « Le gouvernement doit résoudre le problème des prêts d’habitat et assurer le logement aux Libanais dont 30 % sont en dessous du seuil de pauvreté », a-t-il estimé, avant de clamer : « La priorité de logement appartient aux gens de la maison plutôt qu’aux autres. »
Le courant de l’Indépendance (de l’ancien vice-Premier ministre Issam Abou Jamra) a dénoncé dans le même sillage l’article « passé en catimini dans le budget 2018 ». Dans un communiqué, Lucien Aoun, membre du bureau politique du courant, a mis en garde contre « une menace démographique » et « un grand complot visant l’entité du Liban et la destruction définitive de son patrimoine ».

Un observateur s’interroge à cet égard sur l’identité des parties qui seraient intéressées par l’offre suggérée dans l’article incriminé. Joint par L’Orient-Le Jour, cet expert affirme qu’« en général, ce ne sont pas les Européens qui viendraient acheter des appartements, mais plutôt des personnes appartenant à une confession déterminée ». Et d’indiquer que « plusieurs personnalités musulmanes construisent actuellement de nombreux complexes d’habitations dans des régions chrétiennes », ce qui, craint-il, « tend à modifier la configuration de ces zones au plan de leurs populations ».

Entre les mains de Aoun
Des personnalités chrétiennes sont également montées au créneau, notamment Chamel Roukoz, candidat aux législatives dans la circonscription du Kesrouan-Ftouh. Lors d’un rassemblement électoral à Akoura (Jbeil), il a estimé qu’« une telle démarche ne relèvera pas le secteur immobilier mais videra le pays de son peuple ». M. Roukoz a exhorté le président de la République Michel Aoun à « intervenir en personne pour empêcher ce nouveau phénomène d’implantation camouflée, qu’on cherche à imposer par la ruse », estimant que « la préservation de la Constitution et de l’entité du Liban est entre les mains du chef de l’État ». « Nous avons tous confiance en lui, surtout au regard des dossiers existentiels, et nous croyons qu’il prendra la décision opportune en temps opportun », a-t-il laissé espérer.

On sait à cet égard que, conformément à la Constitution, la loi n’entre en vigueur qu’après avoir été signée par le président de la République et publiée dans le Journal officiel. La question est donc de savoir si M. Aoun l’approuvera ou non. Un expert juridique indique à L’OLJ que le chef de l’État dispose d’un délai de 40 jours pour signer le document ou au contraire le renvoyer au Parlement. Celui-ci devra alors en faire une deuxième lecture, à l’issue de laquelle il peut soit la modifier, soit la voter à nouveau. Si cette deuxième option est choisie, la loi devrait être obligatoirement publiée, mais le président de la République pourrait alors intenter un recours en invalidation auprès du Conseil constitutionnel. Interrogé par L’OLJ, un proche de certains milieux parlementaires écarte cette possibilité, indiquant cependant que quelques députés se préparent à recourir eux-mêmes auprès du CC.

Mais, pour un tel recours, il faudra qu’ils soient dix. « Ce chiffre pourra-t-il aisément être atteint alors que de nombreuses instances économiques et politiques imposent leur loi, basée sur des considérations liées à leurs intérêts privés ? » se demande cet observateur.


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commentaires (3)

Encourageons plutôt la diaspora libanaise à revenir et re-investir avant qu'il ne soit trop tard !

Claude AZRAK

10 h 29, le 10 avril 2018

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Commentaires (3)

  • Encourageons plutôt la diaspora libanaise à revenir et re-investir avant qu'il ne soit trop tard !

    Claude AZRAK

    10 h 29, le 10 avril 2018

  • LA GUERRE OU LE MATCH SYRIEN N,ETANT ENCORE QU,A SON PREMIER TOUR IL Y A ENCORE BEAUCOUP DE CHEMIN POUR BOUCLER LE SECOND ET PEUT-ETRE LE TROISIEME ET LE QUATRIEME TOUR... ENTRETEMPS NOUS RISQUONS DE VOIR LES REFUGIES PRESENTS ENCORE POUR LONGTEMPS SUR NOTRE TERRITOIRE ! PLUS RESPONSABLES SONT LES LIBANAIS VENDUS AYANT COMBATTU EN SYRIE QUE LE REGIME SYRIEN LUI-MEME !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 28, le 10 avril 2018

  • qu'est-ce qu'on ne ferais pas pour ranimer le secteur immobilier au Liban...l'immobilier c'est beaucoup d'electeurs potentiels, on est en train de vendre le Liban, on l'a deja offert a 400,000 gueux dans les annees 90 (le jardinier egyptien de mon voisin l'a obtenu apres 4 annees passee au Liban, sans meme se marier, il a obtenu un wasta...) virez tout ces deputes, et qu'on fasse une loi pour leur reprendre tout l'argent et les biens, et les mettre ensuite en prison

    George Khoury

    06 h 54, le 10 avril 2018

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