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Lifestyle - Rencontre

Carla W. Sfeir, de Reyfoun au monde

Elle aurait pu être sculptrice. Elle l'est, à sa manière. Car de ses mains à la fois patientes et nerveuses, elle crée des lunettes qui s'expriment en toute liberté.

Photo DR.

Cette femme a définitivement la tête de l'emploi. De son emploi, qui est aussi sa passion... Une tête libre, libérée des on-dit, des non-dits, des interdits. Il suffit de la voir débarquer dans cette galerie d'art de Beyrouth – elle y était de passage pour quelques jours – pour immédiatement la repérer et deviner la flamme peu conventionnelle qui l'anime. Vêtue de noir, de grands yeux également foncés, cerclés d'une paire de lunettes, complètent sa signature. Carla Sfeir, vous l'aurez sans doute deviné, est opticienne créatrice. Lunettiste, dirait-on, si le mot existait, comme d'autres sont marionnettistes. « Je m'exprime, dit-elle, à la façon d'un danseur, d'un chanteur, d'un peintre, d'un artiste, à travers mes sculptures lunettières. » Des montures qui expriment son regard sur le monde, la tolérance, des valeurs à la fois esthétiques et humaines, et qu'elle dessine, modèle, sculpte avec une relation physique, émotionnelle et technique. « J'ai toujours été à la recherche de mon propre style de vie. Toute jeune, j'avais mes habitudes de jeux hors du commun pour une petite fille. Ma famille m'attribuait le surnom de garçon manqué, ou bien William junior (du prénom de son père). Mon petit cerveau avait déjà commencé à sécréter un virage un peu créatif. Ce fut une chance d'être dans la différence », confie Carla W. Sfeir.

 

« À ma manière »
C'est en 1989 que cette brebis noire fière de l'être quitte le troupeau de son Reyfoun natal, une famille d'artistes qui n'a cessé de l'inspirer et ses études de traduction pour la France et des cours d'optique au lycée technique Fresnel. « Mes choix professionnels ont toujours été guidés par ma soif de liberté. La traduction à l'international ou l'optique-lunetterie m'ont donné l'opportunité de pouvoir accéder à Paris à la fin des années 1980, avec tout ce que cela pouvait comporter de vivre en Europe à cette période post-1969 ». En 1991, elle se lance dans cette nouvelle page animée par une belle énergie et par l'envie de faire des lunettes sur mesure. D'en faire autre chose qu'un simple objet qui se porte sur la face. Après ses années parisiennes, Carla Sfeir met le cap sur Montpellier en 1999 « retrouver l'air du Liban ». Elle y fera l'optique « autrement ». « La valeur ajoutée de mes objets est la passion. Que ce soit des objets en lunetterie, en textile, en mobilier ou autres. Je tiens à rester hors de la mouvance des modes, du design et du style. Le fait main est un credo pour moi. J'aime insuffler à la matière travaillée une partie de l'humain qui la travaille ». Ses matières de prédilection sont le cuir, la fleur de coton, le bois et d'autres éléments naturels. Elle développe ainsi trois lignes dont deux portent son prénom et que l'on trouve également à Paris : Carla.W.Sfeir, une gamme de montures classiques haut de gamme, réalisées sur mesure ou en édition limitée, souvent en écailles ; Carla's Eye, « l'expression, explique-t-elle, de ma "folie artistique". Une collection colorée à la marge, avec des réalisations étonnantes et exubérantes, tels des masques de scène ou des lunettes artistiquement expressives, faites main, en pièces uniques ou en séries limitées ». Et enfin Coexist Eyewear, « des lunettes qui font coexister des formes opposées, des couleurs, des genres, pour obtenir un équilibre parfait sur le visage et transmettre un message de paix ».

Les créations de Carla Sfeir ne passent pas inaperçues. Sa clientèle, attirée par cette forme d'excentricité, est également constituée de personnalités connues, parmi lesquelles Gilbert Montagné, Lio, Caroline Loeb, Jean-Pierre Coffe, Lenny Kravitz, Mathieu Chedid ou encore Émilie Simon.
Ses projets pour l'année sont nombreux : après New York, Milan, Munich et Paris, elle mettra le cap sur Houston, Las Vegas, Tokyo et, pour finir, la Russie. Une exposition est prévue dans une galerie d'art à Miami puis à Beyrouth. « J'ai également été sollicitée par Dominique Imbert pour dessiner les dernières tendances des cheminées contemporaines Focus, ainsi que par Gilbert Montagné pour la création d'un jeu de société dédié aux voyants et aux non-voyants. Mais la cerise sur le gâteau sera ma collaboration avec la maison Hermès, à travers leur recherche de créatifs pour le petit «h» d'Hermès. Il s'agit là d'invention d'objets uniques, numérotés et très hauts de gamme. » Et le Liban, dans cet agenda hyperchargé ? « Le Liban et Reyfoun, mon village natal, mes racines et mes ailes... J'espère ramener à Beyrouth ne serait-ce qu'un petit souffle de mon élan. »

Cette femme a définitivement la tête de l'emploi. De son emploi, qui est aussi sa passion... Une tête libre, libérée des on-dit, des non-dits, des interdits. Il suffit de la voir débarquer dans cette galerie d'art de Beyrouth – elle y était de passage pour quelques jours – pour immédiatement la repérer et deviner la flamme peu conventionnelle qui l'anime. Vêtue de noir, de grands...

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