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Culture - Exposition

Sept personnages en quête d’auteur

À la galerie Sfeir-Semler, une exposition collective regroupe les œuvres de sept
artistes de nationalités différentes. Difficile de faire moins explicite comme titre, mais une chose est claire cependant : « Blind Date »* s'avère être une aventure particulière, un rendez-vous énigmatique.

Dineo Seshee Bopape surprend le visiteur avec une installation composée de vidéos, de sculptures et d’objets de récupération qui se déploient dans l’espace.

Avec Blind Date, la galerie Sfeir-Semler prend le parti de réunir des artistes sans leur soumettre un thème à respecter, mais leur offre un terrain de jeu où la poésie, la mythologie et la psychologie sont privilégiées, et où se côtoient le primitif, le rituel et le fétiche. Sept artistes s'emparent de l'espace au gré de leurs recherches, tantôt archéologiques ou sociales, tantôt philosophiques, pour retranscrire le fruit de leurs réflexions en sculptures, peintures, installations, voire même en tapisserie. Rien ne les rapproche et, pourtant, au cours de la déambulation, la condition humaine se dessine petit à petit comme le fil conducteur.

 

Phonèmes et conflits
Mohammad Monaisser, artiste égyptien, se penche sur la mystique et la mythologie. Pour lui, l'observation du comportement animal est un moyen de décrypter la conduite des hommes. Ses bestiaires en broderies aux colorations perses racontent des fables qui traitent du pouvoir hiérarchique, de la loyauté, de la mort et du cycle de la vie. Dans sa façon de se protéger les uns les autres ou même de s'entre-tuer, le microcosme animal réfléchit toute l'humanité. Et, sur un autre registre, l'artiste décode la fonction des mots qui, à force d'être répétés, finissent par perdre leurs sens et deviennent comme une litanie aux effets magiques. Et le langage s'efface...

C'est justement à travers le langage que Lawrence Abu Hamdan aborde la thématique des droits de l'homme. Parler une langue suppose la maîtrise de certaines connaissances et de certains habilités, mais avant d'être interprétés sémantiquement, les mots doivent être décodés sur le plan sonore. C'est là que la prononciation intervient et transmet des indices qui déterminent l'appartenance socioculturelle. Quand le gouvernement des Pays-Bas décide de donner droit d'asile au peuple somalien, il entreprend un travail d'analyse des sons et de leurs conséquences. Les divers accents seront les facteurs déterminants pour chaque individu. Conflicted Phonemes, ou comment donner droit à une terre d'asile.

La Terre, de Basel Abbas et Ruanne Abou Rahme, est une terre meurtrie par des années de conflits et de problèmes d'appartenance. Ensemble, pour exorciser leur trauma et celui de tout un peuple, ils la fouleront, se plongeront dans ses vestiges, pour restituer ce qui lui appartient. L'archéologie n'est pas seulement une affaire de culture, elle est bel et bien une façon de se positionner sur l'échiquier politique.

 

(Lire aussi : Maria Chakhtoura : Exposer les graffitis, comme une alarme contre la violence...)

 

La peau de Rousseau
Dineo Seshee Bopape, née en Afrique du Sud, surprend le visiteur avec une installation composée de vidéos, de sculptures et d'objets de récupération qui se déploient dans l'espace, l'envahissent et traduisent la démarche empirique et sensible de l'artiste. Entre projections, ombres et lumières, ses combinaisons d'images et d'objets multiplient les récits et les points de vue qu'elle porte sur la société, le genre et la sexualité. Les symboles renvoient aux traditions ancestrales et aux coutumes tandis que la spontanéité de la construction laisse le visiteur perplexe.

Cette perplexité se déplace sur les toiles de Ania Soliman, artiste polonaise qui tente de traduire un monde devenu digital par l'étude d'un système de notation de la danse. Nés de l'éphémère et du spontané, les mouvements s'inscrivent à leur tour dans une programmation digitale qu'elle déplore. Au-delà du rythme des barres colorées qui se succèdent et se superposent, la compréhension des œuvres requiert une abstraction totale du sujet ou une réincarnation dans la peau de Noureev ou de Béjart.

Quant à Joshua Mosley, artiste et animateur américain, il entraîne le spectateur à travers une balade champêtre bercée par une conversation entre Blaise Pascal et Jean-Jacques Rousseau, qui ont troqué leur habit épidermique pour une peau en bronze. Dread s'arrête sur les deux penseurs qui ont révolutionné le monde et met en image la condition humaine et sa relation avec la nature.

Plastiquement parlant, les œuvres s'offrent à voir comme un incroyable imbroglio de projections, de sculptures et d'installations. Quelque chose pourtant constitue le vecteur cardinal de chacune de ces compositions, soulignant la condition humaine sous ses différents aspects. Chaque artiste est habité de sa propre histoire, de ses origines et d'un vécu dont il est l'expérience présente. Encore faut-il réussir à traverser ces différents mondes, faire abstraction de la lecture subjective, tantôt philosophique et tantôt spirituelle, pour n'en retenir que ce pour lequel on a fait le déplacement : le plaisir des yeux.

 

*« Blind Date », avec Basel Abbas & Ruanne Abou Rahme, Lawrence Abu Hamdan, Dineo Seshee Bopape, Mohammad Monaiseer, Joshua Mosley, Ania Soliman à la galerie Sfeir-Semler. Jusqu'au 25 mars 2017.

 

 

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commentaires (1)

Blind : le bien nommé. Pas d'autre commentaire!!!!!!!!!!!

Skamangas Stelios

18 h 05, le 26 janvier 2017

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Commentaires (1)

  • Blind : le bien nommé. Pas d'autre commentaire!!!!!!!!!!!

    Skamangas Stelios

    18 h 05, le 26 janvier 2017

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