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Culture - Photo

Confinée et rassurée, ou libre et inquiète ?

D'une part, de vastes étendues de terres sauvages, de l'autre des femmes dénudées évoluant dans leur environnement domestique. Deux séries d'œuvres photographiques signées Rasha Kahil, a priori diamétralement opposées, jouent paradoxalement les rapprochements sur les cimaises de la galerie Janine Rubeiz *.

Rasha Kahil, photographe de l’intime et de l’émotionnel. Photo Mattias Bjorklund

Être en sécurité dans le cocon domestique mais s'y sentir confiné(e). Ressentir l'appel du large des vastes espaces inhabités, mais aussi l'angoisse diffuse de la solitude. Ce sont ces sentiments paradoxaux propres à l'être humain que Rasha Kahil tente d'explorer à travers l'accrochage, volontairement contrasté, de deux séries de photos qui n'ont, d'emblée, rien en commun. Sinon d'être le travail de cette photographe libanaise trentenaire, installée depuis quelques années à Londres. Et de véhiculer une réflexion sur l'attrait-rejet que provoquent les deux états antinomiques que sont la liberté (et ses corollaires le risque et la solitude) et la sécurité (et son inévitable sentiment d'enfermement).
Sur les cimaises baignées de lumière de la galerie Janine Rubeiz, d'une part donc, des images en grand format de larges étendues sauvages : déserts, montagnes, marécages, horizon marin ou même terrain vague... De l'autre, des portraits de femmes dénudées, calfeutrées dans leurs intérieurs.

Le corps féminin
Pour exprimer la dualité de ce ressenti émotionnel, l'artiste a agrandi les photos des espaces naturels (130 x 110 cm) et les a laissées libres, sans encadrement, tandis qu'elle a encadré, encerclé même de couleurs pastel, les images de femmes dans leur intimité, qu'elle a éditées en plus petit format (60 x 60 cm). Puis, dans leur accrochage, elle les a alternées de manière à souligner le rapprochement sous-jacent et ambigu qu'elle y trouve et à offrir aux visiteurs de multiples jeux de lecture. « En fonction des projections de chacun », souligne-t-elle.
Intitulée « Homebound » (« Confinées à la maison »), cette exposition est le fruit d'une maturation lente, indique Rasha Kahil. « L'idée m'en est venue avec le temps, à la suite d'autres travaux photographiques dans lesquels je m'étais intéressée au corps féminin et à ce qu'il véhicule comme idées préconçues sur les identités sociales. Mais aussi à la suite des voyages que j'ai faits ces six dernières années (Allemagne, France, Écosse, Yémen ou Émirats arabes) et au cours desquels je prenais invariablement des photos de paysages libres à l'infini. »
« C'est un projet très visuel, voire émotionnel, pas nécessairement très conceptuel », tient à souligner cette photographe qui nourrit constamment son travail des expériences qu'elle vit. « Il s'inscrit dans mes introspections, mes questionnements personnels sur l'alternance des désirs de tout être humain entre le rassurant-étouffant du chez-soi et le sublime inquiétant de la liberté. »
À découvrir à la galerie Janine Rubeiz jusqu'au 26 avril.

Carte de visite
Née au Liban en 1980, Rasha Kahil vit et travaille en Grande-Bretagne depuis 2004. En 2009, elle décroche un master en design et arts de la communication du Royal College of Art de Londres et reçoit en même temps le prix Carl Garnham pour la photographie.
La jeune femme – qui mêle souvent dans ses œuvres la photographie, la vidéo, les textes et les installations – possède déjà à son actif plusieurs expositions collectives à Paris, Zurich, Taipei, Dubaï ou Londres... Ainsi que des solos à Beyrouth dont, en 2011, le très piquant « In Your Home » chez Running Horse : une série d'autoportraits dans des maisons à Londres, Beyrouth, New York ou Berlin, pris à l'insu des propriétaires. Une artiste à suivre... dans ses pérégrinations photographiques.

* Raouché, imm. Majdalani (Banque Audi). Horaires d'ouverture : de mardi à vendredi, entre 10h et 19h, et samedi, de 10h à 14h. Tél. : 01/868290.

Être en sécurité dans le cocon domestique mais s'y sentir confiné(e). Ressentir l'appel du large des vastes espaces inhabités, mais aussi l'angoisse diffuse de la solitude. Ce sont ces sentiments paradoxaux propres à l'être humain que Rasha Kahil tente d'explorer à travers l'accrochage, volontairement contrasté, de deux séries de photos qui n'ont, d'emblée, rien en commun. Sinon...

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