Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Religion

Entre islamistes et évangélistes, l’Église africaine face à de multiples défis

Le pape François débutera demain son premier voyage en Afrique, quelques jours seulement après la prise d'otages à Bamako.

Pour la première fois depuis qu’il est pape, Jorge Bergoglio entame demain une tournée en Afrique. Tony Karumba / AFP

Le pape François trouvera pour son premier voyage en Afrique une Église en pleine croissance, véritable pouvoir politique et social mais qui affronte des défis redoutables, de l'islamisme radical à la prolifération des sectes évangélistes. C'est la première fois que Jorge Bergoglio se rend en Afrique, continent où la croissance des catholiques est la plus rapide. Pour certains, comme le cardinal guinéen Robert Sarah, la jeune Église africaine incarne l'espoir d'une régénérescence de l'Église dans le monde. D'autres sont plus circonspects, relevant que le christianisme apporté par les missionnaires est jeune – un siècle et demi – et que la culture chrétienne est fragile. Pour le père Angelo Romano, expert de la communauté Sant'Egidio, lumières et ombres coexistent : « L'Église africaine est missionnaire, plaide pour la paix, défend la cohabitation avec les autres religions et est toujours favorable à la démocratie. » Mais, analyse-t-il, son personnel laïc est « encore trop fragile » et son clergé « souffre de difficultés à comprendre les changements que la société africaine est en train de vivre ».

Maintenir la relation de tolérance
Deux réalités présentent pour elle des défis particuliers : l'apparition de mouvements jihadistes et de mosquées radicales financées notamment par les monarchies du Golfe, et la création d'Églises évangélistes ou pentecôtistes, vers lesquelles affluent les catholiques. Au Kenya, en Ouganda, en Centrafrique, François trouvera des communautés chrétiennes sur la défensive face au jihadisme. La menace des Shebab somaliens (notamment après le massacre au Kenya de 150 étudiants à l'université de Garissa en avril), la peur de Boko Haram et d'autres groupes, mettent les chrétiens sur la défensive.
De multiples églises pentecôtistes et évangélistes – plus festives, plus conservatrices, et promettant aussi des miracles aux gens en difficulté – apparaissent dans les quartiers. Des centaines de milliers de catholiques les rejoignent. « Elles sont le fruit de l'échec de l'inculturation des Églises établies, qu'elles soient catholiques, protestantes, anglicanes », explique à l'AFP le père Giulio Albanese, expert de l'Afrique à Radio Vatican. Les liturgies catholiques sont restées trop romaines, les célébrations trop solennelles, déconnectées de la culture africaine.
À son crédit, l'Église catholique joue dans de nombreux pays un rôle politique de contre-pouvoir, face à des pouvoirs forts comme en République démocratique du Congo. De nombreux évêques et cardinaux, comme l'archevêque de Bangui, Dieudonné Nzapalainga, œuvrent courageusement à la paix civile, au risque de leur vie. L'Église administre par ailleurs des milliers d'écoles, et, du sida à Ebola, les dispensaires catholiques sont en première ligne, parfois gérés par des missionnaires et sœurs européens.

Conservatisme contre l'Occident « décadent »
L'Église catholique africaine campe en outre sur des positions très intransigeantes en matière de mœurs. Ainsi en octobre, au dernier synode sur la famille au Vatican, les évêques africains ont fustigé l'Occident « décadent » et « le colonialisme » idéologique, dénonçant le conditionnement par les pays occidentaux de leurs aides à l'adoption de législations favorables à la contraception, l'avortement, l'homosexualité. Les Africains se sont présentés comme grands défenseurs de la morale sexuelle et familiale catholique, alors même qu'une partie des prêtres et certains évêques ont des liaisons avec des femmes, selon des sources au Vatican. « Ils sont plus romains que le pape, mais leur clergé est le plus prolifique. Ils ont de nombreux enfants de plusieurs femmes », a ainsi fustigé une source du Vatican sous le couvert de l'anonymat. D'autres fléaux devraient être dénoncés par François. La « mondanité » et la « corruption » touchent une partie du haut clergé : limousines, vie de luxe, népotisme, affaire de mœurs, collusion avec une classe politique corrompue dans des pays comme le Kenya où l'élite accapare les richesses.

Jean-Louis
DE LA VAISSIÈRE / AFP

Le pape François trouvera pour son premier voyage en Afrique une Église en pleine croissance, véritable pouvoir politique et social mais qui affronte des défis redoutables, de l'islamisme radical à la prolifération des sectes évangélistes. C'est la première fois que Jorge Bergoglio se rend en Afrique, continent où la croissance des catholiques est la plus rapide. Pour certains, comme le...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut