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Diaspora - Portrait

Qui est Jean el-Dahdouh, religieux et militaire ?

Supérieur de l'ordre libanais maronite au Canada depuis 2014, le père Jean el-Dahdouh est aussi capitaine des Forces armées canadiennes où il exerce comme aumônier du « Royal Montreal Regiment ».

Le lieutenant-général Stuart Beare, commandant des opérations interarmées du Canada, remet une mention élogieuse au capitaine Jean el-Dahdouh, lors de la visite au quartier général de la 2e division CA et de la Force opérationnelle interarmées-est à la garnison de Montréal, le mardi 27 mai 2014. Photo caporal Louis Brunet, section d’imagerie St-Jean/Montréal

Né à Falougha dans le Haut-Metn, membre d'une fratrie de cinq enfants, Jean el-Dahdouh éprouve, dès l'âge de cinq ans, un attrait pour la vie ecclésiale. « Un jour, l'institutrice nous a demandé ce que nous voulions faire quand nous deviendrons grands, et j'ai répondu : prêtre », raconte le père Dahdouh. « Je n'avais que cinq ans, et l'institutrice demanda à mes camarades de m'applaudir », poursuit-il.
Cette vocation précoce devait s'épanouir suite à des événements tragiques, notamment les massacres interconfessionnels qui ont provoqué un déplacement en masse des populations chrétiennes de la Montagne libanaise.
La famille est contrainte de partir, tout d'abord vers Sin el-Fil et puis Nabaa, vers le monastère Saint-Maron de Annaya. Les parents demandèrent aux moines de les accueillir dans ce monastère avec leurs enfants, même s'il leur faudrait dormir dans le couloir. Deux semaines plus tard, les moines ont proposé un logement indépendant à la famille.
Pendant ce temps, le petit Jean, âgé de sept ans, passait son temps au monastère qui abrite le tombeau de saint Charbel. « Il m'arrivait de servir huit messes d'affilée le dimanche, se souvient-il. Je passais tout mon temps avec les moines. Malgré mon jeune âge, je me considérais déjà comme un vrai moine. »
C'était le début des années 1980. Au monastère de Annaya résidaient des moines de tous âges dont certains avaient plus de 80 ans. Ils portaient de longues barbes blanches et ont eu une influence considérable sur l'enfant, qui a appris à prier et à fabriquer l'hostie.

Ordination sacerdotale
La famille restera trois ans à Annaya. L'enfant fréquente alors l'école des Saints-Cœurs à Ehmej. Sur dérogation, il est accepté comme « postulant » malgré son jeune âge (10 ans) au couvent de Tamiche pour poursuivre ses études en vue de devenir moine.
En l'an 2000, Jean el-Dahdouh est ordonné prêtre par imposition des mains du Mgr Guy Noujeim. Il célèbre sa première messe dans sa paroisse d'origine, à Notre-Dame de Falougha, en présence de 2 500 personnes. Depuis, le père Jean a accumulé les expériences spirituelles dans plusieurs endroits : des séjours religieux au Mexique, en Argentine, au Venezuela, et enfin une mission paroissiale dans la ville de Charlevoix au Québec. Ce fut une tâche exigeante puisqu'on lui a confié la lourde charge de servir dix paroisses latines. À son départ, ses paroissiens étaient devenus très attachés à lui.
Après cette expérience, le père Dahdouh a suivi des cours d'entraînement pour devenir officier dans les forces armées canadiennes, afin de servir en tant qu'aumônier. Il est major de sa promotion en 2008 et devient capitaine. Il enchaîne avec une formation d'aumônier de l'armée s'étalant sur deux ans.
En tant qu'aumônier militaire, et avant d'avoir la charge du monastère montréalais Saint-Antoine-le-Grand, le père Dahdouh part en exercice au sein des forces de l'Otan en Allemagne, en 2010-2011. Il lui arrive alors de travailler 16 heures par jour. « Je recevais toute sorte de soldats blessés venant d'Afghanistan, des personnes défigurées, démembrées, j'accompagnais des agonisants dans leurs dernières minutes », raconte-t-il. Depuis 2014, succédant au père Antoine Tahan, il est nommé supérieur du monastère Saint-Antoine-le-Grand par le père abbé Tannous Nehmé, supérieur général de l'ordre libanais maronite.

Médaille de la reine d'Angleterre
Le père Jean est d'une grande humilité. Âgé seulement de 40 ans, il détient déjà une dizaine de diplômes et une trentaine de médailles officielles. Il est formé en théologie, en écriture sainte, en psychologie, en droit international et même en traduction et en administration des entreprises. Il a étudié à l'Université Saint-Esprit de Kaslik, mais aussi à l'Universidad de la Salle (celle des frères de La Salle) dans la capitale mexicaine, ainsi qu'à l'Université Saint-Paul à Ottawa.
Le nombre de médailles (une trentaine) et de lettres de félicitations et d'appréciation qu'il a obtenues est impressionnant. L'une de ces médailles est une mention élogieuse, décernée par le commandant de l'armée canadienne, lui reconnaissant des exploits qui dépassent les exigences des fonctions normales. D'autres lui ont été décernées par différents contingents armés canadiens, ou par le commandant général des forces de l'Otan. La plus prestigieuse lui vient de la part de la reine Élisabeth, à l'occasion du jubilé de diamant de son accession au trône d'Angleterre, en 2012.
Pour la dernière commémoration de la mort de soldats canadiens à Dieppe, lors du débarquement des Alliés en France à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le père Dahdouh a été choisi pour accompagner le gouverneur général du Canada sur un avion privé du gouvernement. « La gloire du monde n'est que vanité, le plus important pour nous, c'est de servir notre frère l'homme », affirme-t-il, quand on l'interroge sur toutes ces distinctions. « Pour moi, le plus grand don, c'est le sacerdoce », confie-t-il.
Ses paroissiens, eux, sont admiratifs de sa foi. Un sourire confiant se dessine toujours sur son visage en regardant la sainte hostie qu'il lève après sa consécration, mais ce sourire se dessine aussi quand il rencontre les paroissiens après la messe. Il est accueillant et facile d'accès, à la manière des moines d'Orient.

Un livre en cours
En 2006, à l'âge de 32 ans, le père Jean est nommé supérieur de l'ordre libanais maronite en Argentine. Il va exercer dans la province de Mendoza comme curé de la paroisse maronite Saint-Jean-Maron. Rapidement, la jeunesse chrétienne orientale s'attache à lui. Il œuvre à la rénovation de la façade de l'église, à réunir des personnalités pour soutenir le Liban pendant la guerre. Quand le moment de quitter est venu, les paroissiens ne voulaient pas qu'il parte. « Nous avons reçu la triste nouvelle, celle de savoir que le curé de Saint-Jean-Maron, le père Jean, va nous quitter pour son pays natal », écrit l'étudiant Andres Abraham, un descendant de Libanais maronites, dans le journal argentin Uno. Sa présence à Mendoza a tellement influencé les fidèles qu'un glacier nomma une glace Abouna Jean pour lui rendre hommage. On la trouve encore dans la Heladeria de la Parrala (nom du magasin), elle a un parfum de chocolat blanc avec une senteur d'orange. L'orange est pour rappeler la senteur méditerranéenne et les moines d'Orient, et le blanc pour la pureté du cœur.
Sa réalisation la plus récente est la construction d'un sanctuaire maronite unique au monde, abritant des reliques de saints libanais. Mais d'autres projets sont en cours : le père Jean œuvre pour la création d'un asile pour les personnes âgées. Il est par ailleurs en train de terminer un livre sur l'Église et l'ordre libanais maronite, les saints du Liban et l'histoire de son monastère montréalais.

Né à Falougha dans le Haut-Metn, membre d'une fratrie de cinq enfants, Jean el-Dahdouh éprouve, dès l'âge de cinq ans, un attrait pour la vie ecclésiale. « Un jour, l'institutrice nous a demandé ce que nous voulions faire quand nous deviendrons grands, et j'ai répondu : prêtre », raconte le père Dahdouh. « Je n'avais que cinq ans, et l'institutrice demanda à mes camarades de...