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Culture - Visite guidée

Un peu de création dans une jungle beyrouthine de brutes

Au cœur de Zoqaq el-Blat, une belle maison bourgeoise est hantée par des esprits créatifs. Derrière sa façade jaune et un peu décrépie, « Mansion » est à la fois un lieu de travail, une résidence d'artiste, une salle d'exposition et un lieu de détente ouvert à tous.

De loin, la maison jaune semble un peu laissée à l'abandon. Au fur et à mesure qu'on s'en approche, elle commence à prendre vie, à s'animer. À travers l'entrebâillement de sa petite porte rouillée, on devine déjà une atmosphère apaisante... Dans le jardin à la végétation sauvage, à l'ombre des arbres centenaires, des fleurs, un chat, des tortues... Et un petit mot de bienvenue. Dès les premiers pas sur le magnifique carrelage de la grande salle du rez-de-chausée, les visiteurs sont dans l'ambiance. Dans la cuisine, des ustensiles sont suspendus au bout d'une petite ficelle et une odeur délicieuse sort du four. « Salut ! » : Ghassan Maasri apparaît. Mansion, qui a ouvert ses portes au public en 2013, est son projet.
L'histoire remonte à la fin des années 2000. Pendant 3 ans, cet architecte quarantenaire passe devant la vieille maison bourgeoise quasi abandonnée depuis la fin de la guerre. Tous les jours, il s'arrête, observe les murs de la jolie bâtisse usés par le temps, criblés par les impacts de balles. Lui qui rêve de créer un lieu communautaire, loin de la frénésie immobilière de l'après-guerre, voit dans cette maison un havre de paix. Jusqu'au jour où il rencontre, presque par hasard, le maître des lieux.
Après un an et demi d'échanges et de paperasses, le propriétaire, un Beyrouthin qui ne souhaite ni revendre ni occuper cette maison (pour le moment, du moins), ouvre les portes de Mansion à Ghassan et à son projet. Les pièces vides de la maison se remplissent, Ghassan Maasri s'installe, et commence à inviter des artistes à y planter leurs pénates. Créatrice, chercheurs, designers, architectes... Les profils sont variés et le principe est simple : les résidents versent un petit loyer, qui sert à rembourser les frais de vie (eau, électricité, Internet, réparations). Et ils participent à l'entretien de la maison, réparent, bricolent, rangent, nettoient. Petit à petit, l'aménagement prend forme, les murs moisis deviennent blancs, les fenêtres sont réparées, la terrasse nettoyée...

La « Mansion » de tous
Pour Jad Melki et Ghaith Abi Ghanem, deux jeunes architectes (agence Ghaith&Jad) installés depuis plus d'un an, « c'est une grande chance de pouvoir interagir avec la communauté de ce lieu ». Les membres de Studio Zumra, deux jeunes designers installés au troisième étage de la maison depuis deux ans, ont trouvé ici un véritable équilibre. « Être ici, c'est très inspirant, expliquent Ayman Hassan et Ziad Bou Assi, cela nous offre un cadre de travail ouvert et cela nous encourage à la création. »
Au-delà de l'aspect créatif, la dimension activiste semble omniprésente à Mansion. « Ce que j'aime le plus ici, c'est la notion forte de respect : tout le monde est bienvenu, à condition de respecter le lieu, les résidents, les œuvres...» souligne Ziad Bou Assi, perché sur le rebord de la fenêtre de son bureau. Politiques ou non, les échanges entre résidents et visiteurs de passage sont souvent animés. Ayman Hassan et Ziad Bou Assi confirment : » Mansion est avant tout un moyen d'être investis, de manière active ou non, contre la gentrification de Beyrouth. »
Aujourd'hui, Mansion prend aussi la forme d'une galerie d'art, gratuite et ouverte au public. Sur les murs de la salle principale, des photos, des tableaux sont souvent accrochés, des films projetés... Outre les bureaux de travail et les expositions, Mansion accueille des cours... Comme par exemple les classes de yoga de Yalda Younès, chaque mercredi soir. Cette jeune femme habituée du lieu apprécie avant tout les valeurs transmises par le concept de Mansion. « J'aime la confiance entre les gens, sa pluridisciplinarité qui mêle l'intellectuel, la philosophie, la cuisine, tout en étant accessible au grand public... Tout cela fait de Mansion un lieu unique au Liban. »
Un lieu qui semble suspendu dans le temps, loin des brouhahas de la ville. À Mansion, lorsque les discussions ne sont pas animées, on n'entend que le gazouillis des oiseaux. Omniprésent dans la maison, Ghassan Maasri suit de près les différents projets défilant sous le toit de la demeure. « Nous n'avons pas de but précis, sinon de continuer à bâtir une communauté avec une identité forte. »
Mansion, projet en construction perpétuelle... dont l'objectif premier semble déjà atteint : y aller, c'est vouloir y revenir.

Laura DAMASE

De loin, la maison jaune semble un peu laissée à l'abandon. Au fur et à mesure qu'on s'en approche, elle commence à prendre vie, à s'animer. À travers l'entrebâillement de sa petite porte rouillée, on devine déjà une atmosphère apaisante... Dans le jardin à la végétation sauvage, à l'ombre des arbres centenaires, des fleurs, un chat, des tortues... Et un petit mot de bienvenue....

commentaires (2)

La villa de Haig Tufenkdjian, soeur jumelle du Ministère des Affaires étrangères fut amputée dans les années 60 de son quart arrière pour ne pas reculer le tracé d'une nouvelle route Place-Debbas - Achrafieh. En dépit des efforts déployés par l'ancien ministre Khalil Hibri, de Me Anis Saleh et de l'APSAD. Un ministre aussi abrutit qu'ignorant n'a pas cédé. Le patrimoine beyrouthin, connais pas !

Un Libanais

16 h 46, le 28 juin 2015

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Commentaires (2)

  • La villa de Haig Tufenkdjian, soeur jumelle du Ministère des Affaires étrangères fut amputée dans les années 60 de son quart arrière pour ne pas reculer le tracé d'une nouvelle route Place-Debbas - Achrafieh. En dépit des efforts déployés par l'ancien ministre Khalil Hibri, de Me Anis Saleh et de l'APSAD. Un ministre aussi abrutit qu'ignorant n'a pas cédé. Le patrimoine beyrouthin, connais pas !

    Un Libanais

    16 h 46, le 28 juin 2015

  • Le massacre du patrimoine de Beyrouth a commencé dans les années 60 par le grignotage de la villa de HaiG Tufenkdjian, soeur jumelle de la villa occupée par le Ministère des Affaires étrangères dans le quartier dit des Sraska, au bout de la montée Accaoui. Malgré les immenses efforts déployés par l'ancien ministre Khalil Hibri, de maître Anis Saleh et de l'APSAD, les bulldozers d'un ministre aussi ignorant qu'abrutit, ont détruit le quart arrière de la villa, devenu un mur blanc et muet...Tout cela, pour ne pas déplacer le tracé d'une nouvelle route de quelques petits mètres. Allez le voir avec un mouchoir.

    Un Libanais

    16 h 02, le 28 juin 2015

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