Le projet photographique #Project60 a pour origine la rencontre de l’artiste Brock Elbank avec l’Australien Jimmy Niggles.
Quand la barbe (re)prend encore plus du poil de la bête
par Colette Khalaf
Non, il ne s'agit pas d'un simple accrochage de photos regroupant les barbus célèbres de l'histoire, bien qu'ils fassent légion. Allez, citons en quelques-uns: Barbe Bleue, Charlemagne, l'empereur à la barbe fleurie, Victor Hugo, Karl Marx... Non, Beard, qui se tient jusqu'à la fin du mois de mars à la Somerset House à Londres, est née d'une approche plus large.
Le projet photographique #Project60 a pour origine la rencontre de l'artiste Brock Elbank avec l'Australien Jimmy Niggles, qui décide de se laisser pousser la barbe suite au décès d'un de ses proches, terrassé par un cancer de la peau. Nous sommes en 2007 et Mr. Elbank (c'est son nom d'artiste) commence à immortaliser des barbes. Le photographe vit alors à Sydney où il rencontre, quelques années plus tard, Jimmy Niggles, à l'origine de l'initiative Beard Season qui vise à sensibiliser le plus grand nombre de la population au dépistage du cancer de la peau en se laissant pousser la barbe. Brock Elbank prend en photo la gueule velue de Jimmy Niggles. De retour en Angleterre, il imagine ce #Project60, une série de portraits de barbus donc, en partenariat avec Beard Season.
Mr. Elbank ne s'attardera pas sur le côté esthétique de ce tas de poils qui pend du menton, dans tous les sens. Il décide d'étendre la portée du projet de Niggles. Il commence par photographier 60 barbus pour en diffuser les portraits sur les réseaux sociaux. 1200 demandes de participation et une présélection plus tard, l'expo prend forme. L'artiste ajoutera vingt autres clichés dans cette série exclusive pour son exposition à la Somerset House.
Pas les barbes, les hommes...
Dans une interview au Guardian, Elbank se défend d'être un photographe de barbes: «On m'a classé dans cette catégorie, mais je n'en suis pas un. C'est juste un sujet intéressant pour mes portraits. Ce n'est pas la barbe que je prends en photo, mais la personne qui la porte (...) C'est une bonne tranche de la société qui va être rassemblée au sein de cette exposition », explique-t-il. «Je ne veux pas faire référence au hipster avec cette exposition, parce que tel n'est pas le sujet. Tout cela a commencé grâce à une association pour alerter les gens sur les risques des mélanomes», rappelle-t-il.
La barbe, revenue à la mode en Occident dans la seconde moitié du XIXe siècle, puis au début du XXIe siècle à partir des premières années de la décennie 2010, n'est absolument pas une énième expression du phénomène hipster sur les cimaises de la Somerset House, mais un message, une envie de liberté, de pouvoir et de fierté. L'expo Beard permet aussi de prendre conscience de l'incroyable variété de barbes. On reconnaîtra parmi les visages pileux, l'acteur John Hurt, le tatoueur Miles Better, le mannequin Ricki Hall ou encore Harnaam Kaur, une femme souffrant du syndrome des ovaires polykystiques, dont l'hyperpilosité faciale est un des effets secondaires.
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Le hipster est mort, vive l'altbro
Par Maya GHANDOUR HERT
En 2014, le dernier des hipsters occidentaux rendait l'âme, étranglé par les boutons de sa chemise. Col serré, jeans trois tailles plus slim, barbe non traitée. Asphyxie, infection ou anémie. Trois éléments d'une mort annoncée, inévitable.
Cette espèce parfois détestée, souvent soumise à un bashing intensif, a migré sous nos cieux, avec quelques variantes. Si, en Occident, la barbe rousse ou blonde a un effet... décoiffant, surtout si elle est assortie à une paire de beaux yeux bleus, sous les latitudes orientales, l'accessoire pilaire se présente presque aussi dru que la forêt amazonienne, presque aussi noir qu'un corbeau un soir sans lune. Attention, ne pas confondre entre la barbe de hipster et celle de l'intégriste. Pour les membres de Daech, la différence se joue à un poil près: c'est la moustache
qui tranche.
Portrait-robot
Le barbu hipster se taille une bonne part du marché des chemises à carreaux, jadis dite du camionneur, désormais à tartan (pion !). Autres particularités vestimentaires : pantalon retroussé. Lunettes de vue arrondie. Chaussures sans chaussettes. Tatouage (un seul, énorme, si possible). Piercing (deux, symetriques). Vie sociale : on le rencontre aux terrasses des cafés. Aux terrasses des restos. Aux terrasses des pubs. Devant les salles de concert ou de théâre. Aux fenêtres des agences de pub. Jamais dedans. Car il fume.
Ses ancêtres? Georges Moustaki. Le capitaine Haddock.
Sa compagne, la hipsteuse, est (souvent) bien épilée, elle (heureusement...). Elle est souvent habillée selon la mode en vigueur lors de la chute du mur de Berlin : n'oublions pas qu'on a retrouvé les carcasses du premier hipster dans l'underground allemand...
« Tabi3eh »
Mais voilà : les hispters sont devenus tellement nombreux que le principe de base, être différent, ne compte plus. Du coup, ils sont devenus mainstream. Les sociologues disent que le hipster est mort à la minute même où on l'a tagué de hipster. Son look n'est plus hype. Pour compliquer la donne, ils vont même jusqu'à distinguer deux espèces de hipsters : le hipster contemporain, avec la barbe qu'on adore détester. Et le proto-hipster, le real deal comme ils disent. Le véritable connoisseur. Celui-là même qui a inspiré le type urbain qui l'a imité, jusqu'à la parodie. Entre les vrais ou les faux, les leaders ou les followers, toute une différence. Mais la barbe reste une barbe et elle a été décrétée has been.
Vous avez entendu les mecs ? Ce n'est plus hype, la barbe. Allez, zou... On rase et on repart à zéro.
Le hipster est mort ? Vive qui/quoi alors ? Ses successeurs pressentis ? L'altbro (mélange d'alternative et de brother) ou le normcore (normal et hardcore), ou l'apologie de la normalité. Du monsieur tout le monde, tellement «comme tout le monde» qu'il en devient déviant. Avec une devise: la normalité au summum de la platitude.
Ce qu'il faut faire alors, à part passer par la case rasage? Refiler son iTunes à six mille titres uniquement fourni en progressive rock à son cousin de trois ans, et écouter la radio, pardi. Exit aussi les mots de la hipslangue: «dude», «cool», «bro», «7azzak» et «af7amtak ». Qu'il faut dorénavant remplacer par : «3adeh », «tabi3eh», « mar7aba» et même par «hi, kifak, ça va?».
Allez eh, un petit effort. Tout cela ne tient qu'à un fil. De rasoir.
par Colette Khalaf
Non, il ne s'agit pas d'un simple accrochage de photos regroupant les barbus célèbres de l'histoire, bien qu'ils fassent légion. Allez, citons en quelques-uns: Barbe Bleue, Charlemagne, l'empereur à la barbe fleurie, Victor Hugo, Karl Marx... Non, Beard, qui se tient jusqu'à la fin du mois de mars à la Somerset House à Londres, est née d'une approche plus large.Le projet photographique #Project60 a pour origine la rencontre de l'artiste Brock Elbank avec l'Australien Jimmy Niggles, qui décide de se laisser pousser la barbe suite au décès d'un de ses proches, terrassé par un cancer de la peau. Nous sommes en 2007 et Mr. Elbank (c'est son nom d'artiste) commence à immortaliser des barbes. Le photographe vit alors à Sydney où il rencontre,...
MÊMES LES FEMMES... À L'IMAGE DES JEANS... VONT SE PARER DE BARBICHETTES... DES FEMMES BARBUES... QUOI ! LA MODE NOUS VIENT PROCHAINEMENT AVEC LE TCHADOR !
11 h 20, le 19 mars 2015