Allemagne: Merkel dit comprendre les inquiétudes des manifestants anti-islam

La chancelière allemande Angela Merkel affirme comprendre les inquiétudes des milliers de personnes manifestant chaque lundi en Allemagne pour réclamer une politique migratoire plus restrictive par crainte d'une islamisation du pays, dans une interview à paraître vendredi.

"Je comprends les nombreux problèmes qui inquiètent beaucoup de gens, comme les questions indéniables que pose l'immigration, même si elle constitue un gain et une nécessité pour notre pays", a déclaré la chancelière au quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung. Elle a ajouté comprendre aussi que les citoyens s'inquiètent de "la criminalité dans les grandes villes et certaines régions frontalières" de l'Allemagne.

Cependant, elle a une nouvelle fois invité les Allemands à ne pas participer aux manifestations anti-islam du lundi, organisées, selon elle, par des personnes ayant "d'autres objectifs". Leur coeur est trop souvent rempli de "préjugés" et de "haine", avait-elle affirmé lors de son allocution du Nouvel An, des mots répétés dans l'interview.
Depuis octobre, le mouvement anti-islam Pegida ("Patriotes européens contre l'islamisation de l'Occident") mobilise chaque lundi à Dresde (est) contre la religion musulmane et les demandeurs d'asile. Avec un succès croissant: 500 personnes pour le premier défilé le 20 octobre, 10 000 début décembre, 25 000 lundi dernier, un record jusqu'ici.

Les partisans d'une Allemagne ouverte et tolérante sont cependant toujours plus nombreux à descendre dans la rue pour critiquer Pegida : ils étaient plus de 100 000 dans tout le pays lundi. La chancelière n'a constaté "aucune islamisation de l'Allemagne", estimant que les inquiétudes de ses concitoyens pouvaient être nourries par leur ignorance de la religion musulmane. "Nous connaissons trop peu l'islam", a-t-elle dit, tout en invitant aussi les chrétiens Allemands à "approfondir leurs connaissances sur leur propre religion".

Des observateurs de la vie politique allemande et des responsables de son parti, l'Union chrétienne-démocrate (CDU), s'inquiètent d'un discours trop centriste de la chancelière, notamment sur l'immigration, qui profiterait au nouveau parti anti-euro AfD, très à droite sur cette même thématique.

Soulignant la forte popularité de la CDU dans les sondages, elle a contesté que celle-ci ait été affaiblie par la percée de l'AfD. Elle a aussi exclu de changer de ligne. Face à la mondialisation, certaines personnes ont une réaction de "retour au national", qui explique, selon elle, la popularité des mouvements radicaux en Europe. Mais, ajoute-t-elle, ce serait "une erreur" de croire que chaque Etat serait mieux apte à résoudre ses problèmes seuls.