Rechercher
Rechercher

Une contagion de la révolte risque d’être explosive dans le reste du monde arabe

« En Syrie, il reste le pain »

Damas, de Jean LECHEMIER
Les nuits sont fraîches à Damas en ce début février. La vague touristique des fêtes de fin d'année passée, la vieille ville semble tourner au ralenti ; les nombreux restaurants du quartier de Bab Touma, d'habitude affectionnés par les groupes de voyages organisés venus admirer les merveilles archéologiques de la Syrie, font grise mine.
Sur les multiples écrans de télévision de ces anciennes maisons alépines, aujourd'hui reconverties en cantines de luxe pour la bourgeoisie damascène, le Real Madrid se fait malmener par la modeste équipe d'Ossasuna, 16e de la Liga espagnole.
Dans les régimes autoritaires, le football reste l'un des rares sujets non tabous.
Après les événements de Tunis et ceux d'Égypte, la jeunesse syrienne serait-elle prête à battre le pavé et réclamer le départ du président Bachar el-Assad, héritier direct d'une dynastie au pouvoir depuis plus de 40 ans ? « Je pense que les Syriens sont capables de faire plus que les Tunisiens, mais ils ont beaucoup plus peur », se risque Walid, étudiant à l'Université de Damas. Peur des moukhabarat dont l'omniprésence empêche toute prise de parole publique.
« La liberté s'améliore, tempère Iyad, autre étudiant. Un journaliste peut critiquer un ministre, désormais. » « Les jeunes Syriens aiment le président, s'empresse de reprendre Walid, entre deux bouffées de narguilé.
Il est proche du peuple et tu peux le voir parfois dans la rue se promener avec sa femme. »
Il est vrai que le « raïs » arpente souvent les souks de la vieille ville et nombre de commerçants se targuent de l'avoir eu au moins une fois dans leur magasin.
Le « style » Bachar peut plaire à la jeune génération, qui voit en lui le réformateur progressiste que nombre d'observateurs attendaient au moment de sa prise de fonctions.
Mais la timide conversion de l'économie dirigiste syrienne à l'économie de marché profite surtout à une minorité d'hommes d'affaires proches du pouvoir et le large secteur public, qui emploie à lui seul un quart de la population, reste une usine à gaz. « Les Tunisiens n'avaient rien à perdre. Nous, oui », poursuit Iyad, étudiant en lettres.
Reste la liberté d'expression. Dans son rapport 2011, Human Rights Watch indiquait que « les autorités ont continué à violer fréquemment les droits civils et politiques des citoyens, et notamment en arrêtant des militants politiques et des défenseurs des droits humains, en censurant des sites Web, en plaçant en détention des blogueurs et en imposant des interdictions de voyager ». Kamal, propriétaire d'une échoppe dans le vieux Damas, résume la situation : « En Tunisie, il manquait deux choses : la liberté et le pain. En Syrie, il reste le pain. »
Les nuits sont fraîches à Damas en ce début février. La vague touristique des fêtes de fin d'année passée, la vieille ville semble tourner au ralenti ; les nombreux restaurants du quartier de Bab Touma, d'habitude affectionnés par les groupes de voyages organisés venus admirer les merveilles archéologiques de la Syrie, font grise mine. Sur les multiples écrans de télévision de ces...