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Actualités - OPINION

Sous les lambris, la puanteur

Sont-ils tous devenus fous, sont-ils tous devenus amnésiques ? La mémoire, celle qui devrait tarauder leur conscience, leur fait-elle donc défaut, ou l’ont-ils enfouie, profondément cachée dans les bas-fonds de leur ineptie, de leur nuisance ? Tic-tac, tic-tac, tic-tac : la machine infernale égrène les heures, les minutes qui nous rapprochent du point de non-retour, une bombe minutée, méticuleusement confectionnée, mais qui explosera inévitablement à leur visage si elle n’est pas désamorcée à temps. Un bras de fer autant pernicieux qu’inutile et qui n’aboutira qu’à davantage de drames et de misères. « Khalass », assez : les dérapages qui ont accompagné, qui ont précédé et suivi la partielle du Metn ont écœuré les Libanais, les ont guéris de leur suivisme aveugle. S’il est une leçon à tirer de ce scrutin, c’est qu’il a révélé la maturité des électeurs : une défiance plus qu’un plébiscite, un « non » plus qu’un « oui », une parité qui a instauré une nouvelle équation, un nouvel équilibre. Alors de grâce, que cessent les fanfaronnades, les cocoricos risibles, qu’un terme définitif soit mis aux insultes nauséabondes, aux déclarations sectaires indignes de ceux-là mêmes qui se veulent les protecteurs de la moralité publique, les chantres de la démocratie. Pauvre démocratie galvaudée sans arrêt, prise au piège de défis bêtes et méchants, un hara-kiri qui n’épargne rien et personne. « Khalass » : l’électorat du Metn, les chrétiens de cette région ont hurlé ce mot, l’ont scellé dans les urnes, un « non » assourdissant, rebelle… mais il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre : le « non » a été interprété comme un « oui » et le ras-le-bol a été considéré comme un encouragement à davantage d’intransigeance, un feu vert aux mêmes politiques d’ostracisme, de rejet de l’autre. Représentativité, légitimité, verdict des urnes : mots vains, inutiles, pitoyables références, lecture surannée des chiffres et des lettres. Les principaux concernés, eux, n’en font que la lecture qui leur sied, l’analyse qui leur convient. Quelques semaines encore, quelques petites semaines, et le décor de fin de règne sera planté. Une fin de règne marquée par l’opprobre et l’indignité, annonciatrice du même opprobre, de la même indignité, une frénésie quasiment apocalyptique, un « après moi le déluge » asséné comme une vérité de La Palice. Et tous foncent tête baissée dans le piège qui leur est tendu, une course éperdue au déshonneur sous les lambris trompeurs d’une démocratie taillée sur mesure. « Khalass », assez ! Bernard Kouchner, à son départ de Beyrouth, le mois dernier, n’a pas caché sa colère face au gâchis, à l’irresponsabilité de l’ensemble de la classe politique. Et c’est dans la société civile qu’il a placé tous les espoirs d’une sortie de crise, celle-là même qui a lancé la campagne « Khalass » : « Nous, Libanaises et Libanais, tenons toutes les parties politiques responsables d’une éventuelle aggravation de la crise conduisant à l’effondrement et exigeons de leur part une prise de position ferme pour la sauvegarde du Liban. » Dans les jours, dans les semaines qui viennent, ce credo sera matraqué, exprimé avec force jusqu’à ce que les oreilles finissent par entendre, les yeux par voir, les méninges par comprendre. Dans moins de 45 jours s’ouvrira l’arène présidentielle, démarrera la corrida de fin de règne. Ni candidat de défi ni chiffe molle, mais un homme fort qui émergerait non d’un compromis, mais d’un consensus, une personnalité crédible qui permettrait au Liban de contourner les turbulences régionales, de se protéger de la politique des axes. Regardez autour de vous : les hommes qui répondent à ces critères ne sont pas des « oiseaux rares », ils sont parmi nous et ne rechigneraient pas à exercer la fonction suprême. Mais les monopolisateurs des décisions nationales accepteraient-ils de s’effacer, de laisser le jeu démocratique suivre son cours ? L’Assemblée parlementaire, représentante légitime du peuple, sera-t-elle autorisée à siéger en tant que collège électoral ou sera-t-elle neutralisée par un défaut de quorum répétitif, un boycottage qui signifierait que le consensus a été assassiné et enterré ? Ce serait alors la voie ouverte à toutes les dérives, une descente aux enfers que rien ne pourrait arrêter, l’unité de destin à bord d’une embarcation naviguant sans boussole ni capitaine. Bonjour les dégâts. Nagib AOUN
Sont-ils tous devenus fous, sont-ils tous devenus amnésiques ? La mémoire, celle qui devrait tarauder leur conscience, leur fait-elle donc défaut, ou l’ont-ils enfouie, profondément cachée dans les bas-fonds de leur ineptie, de leur nuisance ?
Tic-tac, tic-tac, tic-tac : la machine infernale égrène les heures, les minutes qui nous rapprochent du point de non-retour, une bombe minutée,...