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Actualités - OPINION

HOMMAGE Émile n’est plus, le contrat est orphelin

Émile Chéaïb s’est éteint. Cette formulation n’est point une formule de style. Bien au contraire. En effet la vie du grand maître s’est amenuisée, affaiblie et rétrogradée au fil des ans, particulièrement après le tragique événement qui a frappé la famille. Depuis août 1986, Émile Chéaïb n’était plus le même quoiqu’il restât doté d’une intelligence supérieurement percutante. Cependant pour l’avoir connu, aimé et admiré, je me dois de lui rendre hommage, notamment à l’heure où l’époque des grands maîtres tend à disparaître. Lors de l’année universitaire 1980-1981 je l’ai connu en tant que professeur de deuxième année de droit. Il devait nous dispenser les enseignements relatifs à la théorie générale des obligations. Il s’agissait d’un cours magistral conformément à la formule consacrée ; cependant, si quelque chose cette année-là était magistral, c’était bien lui. D’ailleurs, comment oublier sa première réflexion : « Je ne saurai être le complice de diplômes sans valeurs. » Ô combien était-elle prémonitoire cette affirmation ! D’autant qu’il fallait du courage afin d’oser une si périlleuse aventure à l’ère des milices de tous bords et de tous poils. Depuis cette période et jusqu’à quelques mois avant sa mort, Émile Chéaïb était la référence nécessaire et indispensable qui me guidait. Il était d’ailleurs pour beaucoup dans le choix que j’avais opéré afin de poursuivre mes études en France, et quel était grand son plaisir lorsqu’il sut que je serai l’élève de son condisciple et ami Jean-Marc Mousseron – autre grand disparu. En 1990, alors que j’étais thésard à montpelliérain, celui-ci me confia la mission de faire part aux étudiants du DEA droit des affaires et accords industriels du thème de l’examen final : « Le contrat est mort. Vous avez dit Mort ? » À la disparition de mon maître montpelliérain et actuellement, avec la disparition de mon maître libanais, la question s’est de nouveau posée avec acuité. Le contrat était-il mort ? Le contrat de filiation, de fidélité, d’appartenance aux grandes valeurs telles l’éthique, l’intégrité, l’honnêteté intellectuelle, voire l’honnêteté tout court, ne mourra jamais. Émile Chéaïb, comme Jean-Marc Mousseron, restera dans ma mémoire synonyme de grandeur, de savoir et de générosité. La grandeur d’âme, le savoir encyclopédique et la générosité du cœur. Depuis leur disparition, le contrat n’est certes pas mort. Le contrat est orphelin. Melhem EL-KIK Juriste à la Banque du Liban
Émile Chéaïb s’est éteint. Cette formulation n’est point une formule de style. Bien au contraire. En effet la vie du grand maître s’est amenuisée, affaiblie et rétrogradée au fil des ans, particulièrement après le tragique événement qui a frappé la famille.
Depuis août 1986, Émile Chéaïb n’était plus le même quoiqu’il restât doté d’une intelligence...