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Actualités - OPINION

Savoir dire non

Le 8 mars 1949, Michel Chiha – dont les empreintes marquent jusqu’à nos jours (et jusqu’à nouvel ordre, semble-t-il !) la constitution libanaise – écrivait à l’adresse du censeur : « Dans les pays les plus avancés, on obéit scrupuleusement et on se soumet strictement à des disciplines rigoureuses, mais ce sont aussi les pays ou l’on sait dire non, avec le plus de force et d’assurance. » La négation s’identifiait dès lors à un droit, voire à un devoir, face à la servilité et à l’abnégation. Un demi-siècle plus tard, force est de constater l’actualité des propos d’un « géniteur » de notre Loi fondamentale. Actualité rendue d’ailleurs plus acerbe à partir du 4 septembre 2002, deux ans déjà, jour pour jour ; journée de deuil où les libertés médiatiques ont succombé à la censure sélective qui ne cesse de rappeler aux Libanais et aux Libanaises le tiers-mondisme dans lequel ils baignent… Sélective, en effet, est la peine de mort qui a condamné la MTV à la musette, comme pour éradiquer de la conscience collective des hommes libres de ce pays leur faculté de résistance à l’incongruité des propos tenus, face à l’incohérence des discours affichés, face à la médiocrité galopante de ceux qui se disent pourtant « responsables ». En cela, la MTV n’est plus une simple adresse médiatique : depuis son passage sous la guillotine, cette station représente un symbole. Son sort – achevé, irrévocable ou, au contraire, repensé, ressuscité – a sans doute marqué et marquera inévitablement toute la sensibilité du pouvoir vis-à-vis des libertés publiques. Tel est le critère, telle est l’épreuve : la valeur d’un « responsable » devrait désormais se mesurer au gré et en fonction de son allergie à ceux qui disent non. Cela vaut autant pour la MTV que pour toute autre station télévisée, journal, parti politique, syndicat, académicien, fonctionnaire, éducatrice, ouvrier, étudiant ou… simple citoyen. Repenser le sort de la MTV, c’est affronter avec beaucoup de courage une erreur à redresser. Il y va de l’image que l’on veut se donner ; il y va aussi d’une nécessaire restauration de cette image défigurée que l’on a voulu – on dirait sciemment – donner au pays. Rien n’est irrémédiable : les professionnels du graphisme s’évertuent aux retouches en Adobe et Photoshop ; ils transforment la réalité en l’améliorant. La mode n’est plus aux couleurs sépia lorsqu’il s’agit de libertés : les couleurs arc-en-ciel sont de rigueur. Politique par excellence, c’est seulement l’excellence d’un politique qui pourrait éventuellement redonner vie à la mort déclarée d’un symbole. Autrement, que l’on s’abstienne de discours et de clichés, et que l’on ait au moins le courage de ne dire que ce que l’on est capable d’assumer. Le verbe aura le mérite de correspondre au geste. « Un homme qui a le courage de dire non ! Il faut le louer, poursuit Chiha, et non point le brimer. Et ce n’est pas une raison qu’un tel homme cesse de trouver, dans les services de l’État, un fonctionnaire pour faire aller ses affaires et un magistrat pour lui rendre justice. » À bon entendeur... Ziyad BAROUD
Le 8 mars 1949, Michel Chiha – dont les empreintes marquent jusqu’à nos jours (et jusqu’à nouvel ordre, semble-t-il !) la constitution libanaise – écrivait à l’adresse du censeur : « Dans les pays les plus avancés, on obéit scrupuleusement et on se soumet strictement à des disciplines rigoureuses, mais ce sont aussi les pays ou l’on sait dire non, avec le plus de force et...