L'administration américaine s'est dite vendredi "consternée" par les critiques du régime syrien envers la présence de l'ambassadeur américain Robert Ford dans la ville rebelle de Hama, soulignant que l'idée selon laquelle sa visite a été une surprise pour le gouvernement syrien "n'a pas de sens".
M. Ford a quitté la ville à la mi-journée vendredi après avoir rencontré de nombreux manifestants, et a regagné Damas, a précisé Victoria Nuland, la porte-parole de la diplomatie américaine.
Mme Nuland a répété que Washington avait informé à l'avance Damas de cette visite, contredisant les propos de la porte-parole du président syrien, Bousseina Chaabane, qui avait affirmé à la télévision BBC que l'ambassadeur américain n'avait pas demandé d'autorisation pour se rendre à Hama, ajoutant que cette visite marque une « sérieuse escalade ». La visite du diplomate américain a suscité l'ire des autorités syriennes, selon lesquelles les Etats-Unis sont "impliqués" dans le mouvement de contestation et "incitent à faire monter la tension, ce qui nuit à la sécurité et à la stabilité en Syrie".
D'après la porte-parole de la diplomatie US, l'ambassadeur a été acclamé vendredi par des manifestants, qui ont couvert de fleurs le pare-brise de sa voiture. Il aurait renoncé à sortir de sa voiture afin de ne pas leur voler la vedette.
De même source, lorsqu'il a quitté la ville vers 13h30 locales, il a été escorté par des manifestants à moto soucieux de sa sécurité.
La porte-parole a relevé que la visite de l'ambassadeur français, Eric Chevallier, à Hama n'avait pas été coordonnée entre les deux diplomates.
Sur le terrain, les militants pro-démocratie se sont massivement mobilisés aujourd'hui vendredi en Syrie, notamment à Hama, Homs et Damas pour une journée de manifestations anti-régime placée sous le slogan : « Non au dialogue » avec le régime de Bachar el-Assad.
Au total, treize civils ont été tués vendredi par les tirs des forces de sécurité qui tentaient de disperser des manifestations anti-régime, ont affirmé des militants.
"Au moins cinq personnes ont été tuées dans le quartier al-Khalidya à Homs (centre) par les forces de sécurité qui ont ouvert le feu sur des manifestants. Deux autres manifestants ont été tués dans le quartier Midane à Damas", a indiqué à l'AFP Abdel-Karim Rihaoui, de la Ligue syrienne des droits de l'Homme.
Rami Abdel Rahmane, de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, joint par téléphone à Londres, a par ailleurs fait état de six morts dans la localité de Dmeir, près de la capitale.
A Hama, quatrième ville du pays, plus de 450 000 personnes ont manifesté sur la place al-Assi et dans les rues adjacentes, où se trouvaient également l’ambassadeur américain Robert Ford et son homologue français Eric Chevallier afin de manifester leur sollicitude aux habitants.
A Damas, deux manifestants ont été tués, selon un premier bilan, par les tirs des forces de sécurité qui tentaient de disperser des manifestations dans le quartier Midane, a annoncé à l'AFP Abdel-Karim Rihaoui. Selon la chaîne satellitaire Al-Arabiya, 22 personnes auraient également été arrêtées aux alentours de la mosquée al-Hassan.Selon Al-Jazeera, d’autres manifestations massives ont eu lieu à Damas, notamment dans les quartiers de Baraza et Jdeidet Artouz. L'agence officielle Sana a annoncé pour sa part que "des dizaines de milliers de manifestants se sont rassemblés à Damas pour exprimer leur refus de l'intervention étrangère dans les affaires syriennes et de la visite de l'ambassadeur américain à Hama".Des rassemblements ont également eu lieu à Deir Ezzor (est) et à Kan Safra, une localité proche, ainsi qu'à Alep (nord) et dans des villes à majorité kurde comme Qamechli (nord-est).
Sana a fait état en outre de "manifestations de soutien" aux réformes annoncées par le président Assad, à Alep et à Deir Ezzor.
La télévision publique a montré des images de rassemblements pro-régime sur les places Bab-Touma et Hijaz à Damas.
A Homs (centre), où plus de 100 000 militants participent aux manifestations, cinq personnes ont été tuées par les tirs des forces de sécurité, dans les quartiers de Bab Sebaa et d'Al-Qarabis alors que 24 autres ont été blessées. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, la ville de Homs est "en ébullition". "Les manifestants ont recommencé à défiler dans cette ville" en fin de journée, en protestation contre "la répression". "D'intenses tirs ont été entendus dans le quartier d'al-Qoussour, selon la même source, qui a précisé qu'"un grand nombre d'agents de sécurité sont déployés". Pour sa part, la télévision officielle syrienne avait fait état de deux blessés à Homs parmi les rangs des forces de l'ordre. "Des hommes armés ont ouvert le feu sur les éléments des forces de l'ordre dans les quartiers d'Al-Qoussour et Al-Fakhoura, blessant deux d'entre eux", a-t-elle indiqué sans plus de précisions. Dans cette même ville, les autorités syriennes auraient démonté une statue de l’ancien président syrien Hafez el Assad, a rapporté la chaîne al-Arabiya.
Sur le plan humanitaire, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a fait état d'une extension de ses opérations en Syrie grâce à l'accord négocié il y a deux semaines avec Damas pour son accès sans entrave aux villes du pays. Au cours de la semaine écoulée, des responsables de l'agence humanitaire ont pu se rendre à Deraa, au Sud où la révolte contre le président Bachar al-Assad a débuté à la mi-mars. Le CICR a également visité les villes de Djisr al-Choghour et de Khirbat al-Djouz, dans la province septentrionale d'Idlib, près de la Turquie, où il a évalué les besoins de la population. L'agence humanitaire a également distribué vivres, couvertures, médicaments et autres produits dans une vingtaine de villages de la région.
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