Plus grands, plus centraux, mieux équipés... les entreprises, poussées par la reprise économique en Russie, recherchent de nouveaux bureaux à Moscou, et l’offre pourrait avoir des difficultés à suivre la demande. «L’an 2000 a été marqué par une forte demande. Celle-ci devrait se poursuivre cette année», souligne Arnaud Benoit, directeur du service entreprises chez Colliers HIB. Nouveaux venus sur le marché haut de gamme, les géants russes des matières premières sont arrivés en tête de liste des plus grosses opérations menées l’an dernier : le groupe pétrolier Slavneft a acheté en plein centre 14 000 mètres carrés de bureaux, les groupes Sibirski Aluminii et Rousski Aluminii ont loué respectivement 4 500 et 3 200 mètres carrés... Mais les sociétés étrangères ne sont pas en reste : le franco-américain Schlumberger et l’américain Gillette ont déménagé, l’allemande Commerzbank a acheté 6 000 mètres carrés sur les quais de la Moskova, selon les agences immobilières. «Les sociétés cherchent à augmenter leurs espaces de bureaux. Et les demandes sont passées de 100 000 mètres carrés au début de l’an dernier a plus de 200 000 mètres carrés en fin d’année», souligne le quotidien économique Vedomosti. Or, l’offre haut de gamme reste minime pour une ville de près de 10 millions d’habitants. «L’immobilier de bureau de classe A et B comprend à Moscou 150 immeubles, soit 75 numéros du boulevard Haussmann à Paris», relève M. Benoît. «Dans les mois à venir, nous devrions faire face à une relative pénurie», ajoute-t-il. Bâtiments en jachère Certains ont trouvé la parade : de nombreux bâtiments industriels sont encore en jachère dans la capitale russe, et le groupe de cosmétiques français L’Oréal s’est installé début janvier dans une splendide usine de brique rouge, en plein centre de Moscou. Trois mois de travaux pour reconvertir l’espace de l’ancienne usine textile en bureaux paysagers flambant neufs, bénis par le pope le week-end dernier, selon la tradition orthodoxe. Et pour un loyer inférieur au prix moyen de 480 dollars par an le mètre carré, atteint à fin 2000. La pénurie pourrait aussi toucher les surfaces commerciales, alors que les grands groupes de distribution commencent à s’intéresser à la Russie. Le suédois Ikéa, qui a ouvert ses portes dans la banlieue de Moscou en mars dernier, entend poursuivre son offensive, relevait en décembre le directeur général d’Ikéa Russie, Lennart Dahlgren. Il prévoit de construire un second magasin géant dans le sud-est de la capitale dans un an. Et d’ici deux ans, le fabricant de meubles compte s’installer au cœur même de la capitale russe. Les hésitations des investisseurs «Théoriquement, en se basant sur le potentiel de chiffre d’affaires total du commerce, Moscou pourrait accueillir environ 60 hypermarchés et 400 supermarchés, mais le foncier disponible fait défaut pour ces grandes surfaces», soulignait dernièrement Alexandre Spengler, consultant en immobilier. En 2000, l’offre de surface commerciale nouvelle a été d’environ 50 000 mètres carrés. Elle devrait plus que doubler cette année, et encore l’année suivante, relèvent les experts. Mais les besoins sont nettement supérieurs : l’Europe compte plus de 200 mètres carrés de surface commerciale pour 1 000 habitants, contre seulement 14 mètres carrés en Russie. Les investisseurs étrangers hésitent encore à venir placer leurs capitaux dans le bâtiment russe. «Le gouvernement annonce la mise en place de réformes prochaines, qui concerneraient notamment la propriété de la terre et le transfert des droits de propriété, mais l’incertitude demeure sur la date d’introduction de ces mesures», souligne un spécialiste du secteur.