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Actualités - OPINION

Tribune Les dommages culturels des frappes américaines contre l'Irak

Dans sa dernière déclaration à la presse au sujet de l’agression américaine contre l’Irak, rapportée dans L’Orient-Le Jour du 24 décembre dernier, le Amid du Bloc national, M. Raymond Eddé, est l’un des rares, sinon le seul à ma connaissance (au moins dans la presse locale), à avoir soulevé l’aspect culturel des dommages que les frappes meurtrières sont à même d’occasionner. En y apportant un correctif plus aggravant encore, on peut dire avec le Amid que ces frappes criminelles, si toutefois elles se poursuivent, risquent de détruire non pas «l’un des plus brillants foyers de la civilisation», mais le foyer unique et authentique de la civilisation universelle dans laquelle nous baignons tous à l’heure actuelle. À cette différence près que les Arabes d’aujourd’hui sont les héritiers en ligne directe de cette première civilisation éclose sur leur sol, dans le périmètre de ce que les Assyriologues appellent Sumer (ou encore Kalam), situé dans la partie inférieure du Bassin des Deux-Fleuves, l’Euphrate et le Tigre. C’est là qu’est née l’histoire par l’invention du système d’écriture phonétique à caractères cunéiformes, et que la civilisation simultanément y voyait le jour. En effet, on ne peut qu’approuver le Amid lorsqu’il souligne que c’est «Babylone, capitale intellectuelle et religieuse, qui est détruite» Rappelons ici que Babylone (de l’arabe Babel) fut fondée par Soumouaboum, tête de file de la dynastie babylonienne, au début du 11e millénaire avant notre ère. Elle deviendra, sous le règne de Hammourabi (1792-1750), la capitale de son empire et du monde, à laquelle fait justement référence le Amid. Le code Hammourabi, édicté par lui et gravé sur stèle, se trouve aujourd’hui au Louvre. Il représente la somme juridique de tous les codes antérieurs — et ils sont nombreux — dont celui du réformateur Ouroukagina (vers 2355) le «défenseur de la veuve et de l’orphelin», le précurseur de la Déclaration universelle des droits de l’homme proclamée il y a cinquante ans. C’est Babylone qui peut prétendre au titre convoité de «Mère des Lois» qui lui a été usurpé par les Romains. De sorte que les Américains ne doivent pas ignorer qu’ils dirigent leurs frappes sur le berceau de l’homme contemporain, berceau qui est aussi le leur. D’autant plus que c’est un de leurs citoyens du nom de Kramer qui a rédigé le livre intitulé L’Histoire commence à Sumer, paru dans sa version française en 1957 chez Arthaud. Que la première exposition universelle des monuments sumériens a eu lieu à Austin le 12 janvier 1975, à l’initiative de Marian Davis, conservateur du musée de la ville du Texas, sous le titre de «La Première Civilisation. Le legs de Sumer». L’Anglais L. Woolley, à son tour, ne va pas par quatre chemins pour nous annoncer dans l’Histoire de l’Humanité, édité sous les auspices de l’Unesco chez Laffont en 1967 — l’Unesco réduit, devant le carnage, au silence des cimetières —: «La révolution commença en Mésopotamie et s’étendit rapidement à l’Égypte». L’Allemagne de son côté participe au consensus par la voix d’Harmut Shmokel qui déclare sans ambages que «nous voyons posés à Sumer les fondements de la civilisation au sens le plus large». Il suffira de rappeler aussi à nos amis français que c’est dans les marécages roseliers de la région de Bassorah que «le roseau pensant» de Pascal a été conçu. Au-delà du prétexte officiel fallacieux, c’est en fait un acte de pur vandalisme barbare d’État qui est perpétré envers le patrimoine universel de l’humanité, cette réserve culturelle naturelle de la civilisation dont nous sommes tous issus. Au lieu d’aller y crâcher leurs bombes incendiaires à tout venant, sur le sein qui les a nourris, ils feraient mieux d’aller prier sur les marches du temple antique d’Our (actuellement Abou-Shahrain), si toutefois il est toujours debout. Ils s’éviteront de la sorte la colère des dieux et leurs malédictions. Ils auront beau saccager le haut lieu où a soufflé l’esprit et où s’est incarné le Droit par eux maintenant bafoué, celui-ci finira par l’emporter. Dans peu de temps, le monde entier va commémorer les cinq mille ans de ce nouvel âge de l’Humanité, la civilisation, qui a vu naître aussi Clinton, président des États-Unis d’Amérique et époux de Hillary.
Dans sa dernière déclaration à la presse au sujet de l’agression américaine contre l’Irak, rapportée dans L’Orient-Le Jour du 24 décembre dernier, le Amid du Bloc national, M. Raymond Eddé, est l’un des rares, sinon le seul à ma connaissance (au moins dans la presse locale), à avoir soulevé l’aspect culturel des dommages que les frappes meurtrières sont à même d’occasionner. En y apportant un correctif plus aggravant encore, on peut dire avec le Amid que ces frappes criminelles, si toutefois elles se poursuivent, risquent de détruire non pas «l’un des plus brillants foyers de la civilisation», mais le foyer unique et authentique de la civilisation universelle dans laquelle nous baignons tous à l’heure actuelle. À cette différence près que les Arabes d’aujourd’hui sont les héritiers en ligne...