
Le directeur général des FSI, le général Raed Abdallah, prononçant un discours lors de la cérémonie d'inauguration du premier centre de réhabilitation pour mineurs du Liban, à Baabda, le 28 mai 2025 .Photo : Mohammad Yassine / L'OLJ
Plus de 25 ans après le lancement du projet, le premier centre de réhabilitation pour mineurs du Liban va enfin ouvrir ses portes à Baabda, en banlieue de Beyrouth.
Inauguré mercredi en présence du ministre de l'Intérieur Ahmad Hajjar, cet établissement pourra accueillir plus d'une centaine de mineurs qui étaient jusque-là détenus dans la prison de Roumié (Metn), la plus grande et la plus surpeuplée du Liban. Le transfert de 90 mineurs, âgés entre 16 et 18 ans, devrait avoir lieu « d'ici à deux ou trois semaines », espère une source proche du dossier, contactée par L’Orient-Le Jour.
Projet lancé en 1999
Mis en œuvre par l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC), le projet de doter le Liban d'un centre spécialement dédié aux enfants en conflit avec la loi remonte à 1999, à l'initiative du ministre de la Justice de l'époque, Bahige Tabbara. Mais le projet initial, censé être lancé sur un terrain à Baasir (Chouf), est tombé à l'eau malgré la proposition d'investissement personnel du Premier ministre Rafic Hariri.
Après de longues recherches dans les cadastres pour trouver un bâtiment compatible avec les normes internationales, l'intervention, en 2020, du directeur des Forces de sécurité intérieure (FSI) de l'époque, Imad Osman, a permis de dénicher ce terrain où se trouvait une ancienne caserne des FSI, située dans le lieu-dit de Ouarouar, à Baabda. « L'immeuble existant a été agrandi avec plusieurs annexes et peut désormais accueillir jusqu'à 150 places, reprend la source précitée. Il y a une séparation entre ceux qui sont dans un processus de réhabilitation, avec notamment des salles de classe pour suivre des cours en ligne avec une association Lebanese Alternative Learning, et ceux qui sont à un stade moins avancé et qui ont donc accès à moins de libertés », précise-t-elle.
Au cours des quatre années ayant séparé l'obtention du terrain de l'inauguration de ce mercredi, les travaux ont été successivement retardés par les restrictions liées à la pandémie de Covid-19, puis plus récemment par les 13 mois de guerre au Liban entre le Hezbollah et Israël. Le processus a pu arriver à son terme grâce à des fonds versés par l'Union européenne (UE), qui a financé le projet à hauteur de 4 millions d'euros. « Nous réaffirmons l’engagement fort de l’UE en faveur des droits humains et de la réforme de la justice au Liban. Ce centre, conforme aux standards internationaux, offre un environnement protecteur pour les enfants, favorisant leur bien-être mental, émotionnel et physique. Il s’agit d’un bénéfice non seulement pour eux, mais pour toute la société libanaise », a déclaré Sandra De Waele, ambassadrice de l’Union européenne, présente lors de l'inauguration.
« Chaque jeune mérite une seconde chance »
Pour le ministre Hajjar, « il était indispensable d’adopter une approche réhabilitative plutôt que punitive, fondée sur les principes de la justice réparatrice, en assurant un accompagnement psychologique, éducatif et social à ces jeunes ». Plusieurs membres des FSI ont été spécialement formés pour mener à bien cette surveillance des détenus mineurs. « Nous croyons que chaque jeune mérite une seconde chance », a-t-il affirmé.

Jusqu'ici, les mineurs inculpés pour des actes criminels étaient incarcérés dans une aile spécifique isolée du reste de la prison de Roumié, bien qu'elle soit dans son enceinte. « Ces enfants étaient affectés par le contexte global de la prison : lorsqu'il y avait des problèmes de sécurité, ils subissaient les restrictions de liberté et de droit de visite comme les autres détenus. Cette situation faisait que le Liban était en dessous des standards des Nations unies sur la détention des mineurs », commente la même source, alors que la convention relative aux droits de l'enfant de l'ONU a été ratifiée par le Parlement libanais en 1993.
« Nous ne cachons pas le fait que la situation de la prison de Roumié est devenue très difficile en raison de la surpopulation et des conditions de détention inadaptées aux mineurs, et espérons que ce projet servira de point de départ à un modèle à reproduire pour l’ensemble des détenus dans les prisons libanaises », a de son côté indiqué lors de l'inauguration le général Raed Abdallah, directeur général des FSI.
L'annonce de l'ouverture prochaine de l'établissement intervient alors que la salle d'audience de la prison de Roumié a été officiellement rouverte la semaine dernière dans le but de réduire la surpopulation carcérale et d'accélérer les procès des détenus non jugés.