
Un électeur dépose son bulletin dans l'urne à Tripoli lors des élections municipales du 11 mai 2025. Photo L'OLJ/Mohammad Yassine
L'Agence nationale d'information (ANI, officielle) a publié, mercredi soir, des résultats préliminaires des élections municipales à Tripoli, trois jours après la clôture du vote, dans un climat de grande tension marqué par des soupçons de fraude et des appels à la réorganisation du scrutin.
Selon les informations disponibles à notre publication, rapportées par notre correspondant au Liban-Nord Michel Hallak, la liste « Vision de Tripoli » (Fayçal Karamé, Achraf Rifi, Mohammad Kabbara) a fait élire douze candidats. La liste « le Tissu de Tripoli », soutenue par la société civile, en a fait élire onze, tandis que celle des « Gardiens de la ville » a obtenu un seul siège. Vers 23h locales, le ministère de l'Intérieur n'avait pas encore publié de résultats sur son site officiel.
Mardi soir, le ministère de l’Intérieur avait annoncé les résultats des élections des moukhtars (fonctionnaires administratifs) dans la grande ville du Nord. Dimanche, ce sera au tour des électeurs de Beyrouth et de la Békaa de se rendre aux urnes, avant ceux du Liban-Sud, le samedi 24 mai.
« Félicitations à Tripoli pour son nouveau conseil municipal, et félicitations à tous les candidats, qu’ils aient remporté les élections ou non. Leur mérite est d’avoir mené une bataille démocratique pour la ville », a réagi le député Fayçal Karamé sur X.
Plus tôt en journée, le ministre de l'Intérieur Ahmad Hajjar avait indiqué que « le dépouillement des résultats des élections municipales à Tripoli touche à sa fin », tout en signalant « quelques irrégularités durant le processus » et en balayant les suspicions de fraude. Il a précisé que seule une décision du Conseil d’État, saisi après la publication officielle des résultats, pourrait entraîner un nouveau scrutin.
Le ministre de l'Intérieur s’est rendu à deux reprises au palais de justice de Tripoli pour suivre le processus, marqué par des tensions et des accusations de fraude. L’Association libanaise pour les élections démocratiques (LADE) a demandé l’annulation des élections en raison d’irrégularités graves signalées lors du dépouillement.
« Réorganisation des municipales »
Mercredi, le Conseil des ministres, réuni à Baabda sous la présidence du chef de l’État Joseph Aoun, a décidé de mettre le mohafez du Liban-Nord Ramzi Nohra à la disposition du ministère de l'Intérieur. Une décision qui intervient après un échange tendu dimanche, lors des élections, entre M. Hajjar et le gouverneur. En réponse à des questions sur une possible révocation, le ministre de l'Information, Paul Morcos, a précisé : « Il ne s’agit pas d’un limogeage. Il occupera d’autres fonctions. »
Des personnalités de Tripoli ont réagi à l'annonce du gouvernement. « Nous avions placé beaucoup d’espoir dans les élections, qui ont reflété le choix du peuple pour le changement. Cet espoir grandit aujourd’hui avec la mise à disposition du gouverneur Ramzi Nohra, ce qui équivaut à son limogeage, a écrit le député Ihab Matar. Ainsi, les Tripolitains tournent une page sombre à tous les égards d’une autorité administrative qui a servi les intérêts du courant politique auquel elle était affiliée, sans se soucier des besoins de la population. Nous avions appelé à son renvoi après avoir consulté l’avis des habitants du Nord. Aujourd’hui, nous pouvons dire que le meilleur est à venir pour tout le Nord. »
« La révocation du gouverneur du Nord, qui a failli provoquer une grave discorde à Tripoli, est une décision juste et importante à mettre au crédit du Premier ministre et du ministre de l’Intérieur, a de son côté réagi l'ancien député Misbah Ahdab. Nous espérons que le parquet de cassation ouvrira une enquête sur le gouverneur Nohra et prendra les mesures nécessaires à son encontre ». Il a aussi appelé à la réorganisation des élections municipales « sous la supervision d’un nouveau gouverneur neutre, pour que justice soit pleinement rendue. »