Rechercher
Rechercher

Lifestyle - Entretien

Musique, Liban, sexualité : après « The Voice », les confessions de Vernis Rouge

La chanteuse franco-libanaise, également autrice et compositrice de ses morceaux, dévoile son nouvel EP baptisé « Intro ». Plus qu’une introduction, une confirmation de son talent.

Musique, Liban, sexualité : après « The Voice », les confessions de Vernis Rouge

Vernis Rouge, alias Manon Debs, nouvelle coqueluche des médias français. Photo DR

Certains pensaient que sa prestation il y a un an dans The Voice, était un « coup de bol », un coup de com... Sa surprenante reprise de Bande organisée était pourtant la cerise sur le gâteau d’une carrière qu’elle construisait lentement mais sûrement. Manon Debs souligne un an plus tard un talent et une personnalité musicale faits pour durer.

Dévoilé le 21 février 2025, son dernier album comporte sept titres aux sons pop rock, plus pointus ou plus tendres, accompagnés de textes tout en féminité. Son concert à La Cigale, quelques jours plus tard, était à son image : passionné, décoiffant.

La jeune femme, qui sait très bien ce qu’elle veut, mais surtout ce qu’elle ne veut pas, a les émotions et les mots pour le dire. Entre séduction et sincérité, elle se livre au jeu des questions-réponses de L’Orient- Le Jour, celui de confidences partagées, en soulignant son attachement au Liban et en y insufflant une musicalité qui lui ressemble. Et comme elle l’a si bien chanté en duo avec Allan Védé sur le titre C’est quand même fou, quand elle dit : « Je suis dans la gueule du loup et je crois que ça me plaît », on veut bien la croire…

Autrice, compositrice, interprète, Vernis Rouge ne laisse rien passer. Photo DR


Pourquoi Vernis Rouge ?

C’était un clin d’œil à une féminité que j’ai longtemps eu du mal à assumer, que j’ai appris à découvrir et à embrasser à travers ma musique. J’ai osé être plus douce, parler d’amour, de sensualité… et dépasser une pudeur profondément ancrée en moi. Le vernis rouge, c’est bien plus qu’une couleur : c’est un symbole de féminité, de puissance, de sensualité, mais aussi de rébellion. Il attire l’œil, il marque les esprits. J’aime l’idée que ma musique provoque le même effet : élégante, percutante, inoubliable. Le vernis laisse une trace partout où il passe… et moi aussi.

À quoi ressemblait votre vie avant The Voice ?

Je suis née à Beyrouth, où j’ai vécu toute mon enfance. Mon père est libanais, ma mère française… En 2006, la guerre nous a forcés à tout quitter. Du jour au lendemain, notre vie a basculé : on a laissé derrière nous notre maison, mes amis, nos habitudes… Le petit déjeuner était encore chaud sur la table, le chat toujours dans l’appartement, et nous avons été rapatriés le jour même. Ce départ brutal a marqué un tournant : mes parents ont divorcé, et je n’ai plus jamais vécu au Liban. Pourtant, j’y retourne chaque été, retrouver ma famille paternelle. Le Liban est en moi, dans ma peau. Il est une moitié de ce que je suis.

Parallèlement, la musique a toujours été une évidence. Petite, je rêvais d’être une grande pianiste, et j’ai suivi un parcours strict et classique au conservatoire pendant plus de quinze ans. Mais j’ai compris que les mots étaient trop essentiels pour que je m’en passe. La musique n’a jamais été un choix : elle est vitale, une urgence qui me pousse à avancer chaque jour.

J’ai construit mon projet seule, pierre après pierre, et réuni peu à peu une équipe solide autour de moi. J’ai sorti mes deux premiers EP, rempli des salles mythiques parisiennes comme La Boule Noire et le Café de la Danse… jusqu’à The Voice, qui est arrivé comme la cerise sur le gâteau d’une ascension déjà en marche. Depuis, tout s’accélère. J’ai atteint ce que je cherchais et façonné depuis si longtemps : Vernis Rouge dans toute sa force et son identité.

Qu’est-ce qui a concrètement changé pour vous en un an ?

L'année écoulée a été une véritable accélération, avec une prise de conscience profonde de ce que je cherche à incarner à travers Vernis Rouge. Le projet vibre de cette facette plus affirmée, plus rock, plus directe. Les morceaux ont trouvé leur place, mon public a réagi, et je sens que Vernis Rouge résonne dans les esprits. J'ai également écrit tout mon premier album qui arrivera bientôt, et j’ai sorti mon premier EP INTRO, qui sert d’introduction et d'aperçu de ce qui arrive. J'ai eu la chance de remplir une très belle salle parisienne, La Cigale, avec mon groupe. Après avoir lancé une première tournée en France, nous préparons déjà celle de cette année et celle de 2026, qui promettent de prendre des dimensions encore plus grandes et folles.

Quel est aujourd’hui le son de Vernis Rouge ?

Le son de Vernis Rouge, c’est avant tout une rencontre entre des paroles aiguisées, des textes puissants et une musique pleine d’énergie rock. C’est un mélange de douceur et de force, de sensualité et de brutalité, avec quelque chose de très direct, presque viscéral. C’est un son qui parle aux tripes, qui réveille l’intensité. Vernis Rouge, c’est une expérience qui se vit autant dans les écouteurs que sur scène. En live, il prend toute sa dimension, il faut le ressentir. Le piano y a une place centrale, entouré d’un groupe de musiciens proches, avec qui je partage une véritable complicité. Sur scène, il y a cette énergie rock, cette union du groupe, autour d’un piano qui guide, et de mon rôle de chanteuse qui unit le tout.

La provocation, même douce, même sensuelle, est importante pour vous ?

Oui, la provocation est importante pour moi, mais dans un sens subtil. La musique, c’est avant tout un moyen de bousculer les codes, de questionner, d’interroger… Parfois de déranger. J’aime jouer avec les limites, explorer l’inconnu. La différence, la rébellion bien dosée, c’est ce qui me parle. J’aime tout ce qui laisse une empreinte, ce qui ne s’oublie pas. La provocation est souvent encore plus puissante quand elle est douce, maligne, un peu cachée. Je n’aime pas la brutalité ni la vulgarité. Pour moi, la finesse, la délicatesse, sont des formes de provocation encore plus efficaces. Elles marquent sans écraser, elles séduisent sans imposer.

Combien pour vous le paraître est-il important ?

Le paraître fait partie du jeu, surtout dans la musique et le monde du spectacle. Ce que je défends avant tout, c’est l’idée de rêve. Offrir à mon public un univers dans lequel il peut se plonger, un show pensé dans ses moindres détails pour le transporter. Et je trouve qu’on en manque de plus en plus dans la scène actuelle. Il est essentiel pour moi de faire rêver, de créer un moment grandiose. Le visuel est une dimension-clé pour ça. Mais il y a une condition : tout doit être authentique et sincère. Pour moi, la sincérité d’un artiste est primordiale. C’est la clé pour que le public se connecte véritablement à l’artiste. Ce qui fait qu’un artiste touche son public, c’est quand celui-ci ressent cette sincérité. Je veux que mon image soit un reflet fidèle de qui je suis réellement. Et je pense que l’apparence, loin d’être superficielle, est un outil puissant dans l’art. Il peut renforcer un message, une émotion, et donner encore plus de profondeur à l’univers artistique que l’on crée.

Comme nombre d'artistes de sa génération, l'image joue un rôle central. Photo DR


Quel est votre rapport avec le Liban ?

Le Liban, c’est mon pays de naissance, mon enfance, le lieu de tous mes souvenirs en famille. Il a cette saveur particulière, un goût inaltérable qui restera toujours gravé en moi. Mes plus beaux souvenirs continuent de vivre là-bas, et je ne les oublierai jamais. C’est un pays où je me sens chez moi, en sécurité, malgré tout ce qui se passe. C’est comme un havre de paix, un endroit où je peux me retirer, me retrouver, m’éloigner de tout. Le Liban fait partie de moi, profondément. J’ai une immense tendresse pour ce pays, mais aussi une douleur profonde en voyant ce qu’il traverse. Chaque souffrance qu’il vit me touche personnellement, et pourtant, c’est toujours mon refuge, un lieu où mes racines sont ancrées.

Comment avez-vous vécu, de loin, la « dernière guerre » qu’a traversée le pays ?

Mal… Comme toutes les guerres. J’ai de la famille au Liban, donc c’est une constante inquiétude et tristesse, en voyant ce pays encore et toujours meurtri. On finit tous par se dire qu’au fond, c’est cette dualité, ce mélange de souffrance et de beauté, qui fait la singularité du Liban. Mais même cette conclusion a quelque chose de triste, parce que, oui, le pays pourrait être tout aussi beau, tout aussi riche, sans ces malheurs incessants. J’aime profondément mon pays. À chaque souffrance qu’il endure, c’est un peu de moi qui souffre aussi. C’est un lien indéfectible, impossible à couper.

Vous ne pratiquez pas la « langue de bois », ce qui est rare pour une Libanaise. Vous évoquez votre sexualité en toute liberté et avec beaucoup d’élégance. Quelle a été la réaction du public libanais justement ?

C’est une question intéressante, et je n’avais jamais vraiment réfléchi à ça sous cet angle. Je n’ai pas eu beaucoup de retours spécifiques sur ce sujet de la part de mon public libanais, à part le fait qu’ils adorent mes chansons. Je suppose que ceux qui ne sont pas d’accord avec ma façon d’aborder certains thèmes n’écoutent tout simplement pas ma musique, et ne prennent pas la peine de me le faire savoir (rires).

Je crois profondément que tout peut être abordé à travers la musique, et c’est ce qui la rend si belle et puissante. C’est une question de trouver les bons mots, le bon ton, le bon chemin pour exprimer ce que l’on ressent. La sexualité, tout comme d’autres aspects de l’existence, fait partie de cette liberté d’expression. Chaque artiste a sa manière de la transmettre…. Elle peut aussi être uniquement instrumentale.

À écouter

Quand Vernis Rouge reprend Dalida pour L'Orient-Le Jour

Vous êtes présente sur les plateaux les plus connus de la télé française, comment est venue cette célébrité qui paraît presque facile ?

C’est vrai que l’on me demande souvent comment je vis cette soudaine visibilité, mais, en réalité, lorsque l’on travaille avec autant de passion, on ne prend pas vraiment conscience de la surprise que cela peut susciter. C’est plutôt comme le chemin naturel qui s’accomplit, pas une fin en soi, mais une étape de plus. Je suis incapable de faire autre chose. La musique, ce projet, c’est une question de vie ou de mort pour moi. Ce n’est pas un choix, c’est une nécessité. Ce projet est toute ma vie. Et voir qu’il résonne chez d’autres, qu’il touche les gens, lui donne encore plus de sens et d’importance. Il y a peut-être une forme de facilité dans cette ascension, car c'est comme une fatalité, un chemin tracé que je ne pouvais pas éviter. Je l’ai dans la peau, c’est ce qui me définit.

Comment peut-on qualifier votre nouvel EP ?

C’est un projet profondément personnel et essentiel, car il marque le véritable point de départ de tout mon univers à venir. Un EP intense, à la fois brut et sincère, où l’énergie rock rencontre la sensibilité de la chanson. J’y ai cherché un équilibre : entre des morceaux intimes et d’autres plus légers, plus vibrants. Entre la douceur et l’impact. J’ai aussi tenu à inclure un titre uniquement au piano, un retour à l’essence même de ma musique et de mon parcours. Chaque chanson a une place précise, une nécessité. Je suis auteure et compositrice de tous ces morceaux, ils portent en eux une part de moi, de mon histoire, de cette urgence qui me définit.

Parlez-nous de votre collaboration avec l’artiste Raphaël Zaoui…

Comme des loups est un titre-clé de l’EP, parce que c’est le premier single où j’affirme pleinement cette nouvelle couleur Vernis Rouge, avec une énergie beaucoup plus rock. Dès que je l’ai écrit, j’ai su que ce serait un duo. Et j’ai tout de suite pensé à Raph, que j’aime beaucoup. Le morceau lui a parlé, il a accepté, et je lui ai demandé d’y apporter sa patte.

Comme des loups, à la fois dans la chanson et le clip, marque le début du dévoilement de mon univers. C’est le titre de lancement de mon premier EP INTRO, qui, comme son nom l’indique, introduit tout ce qui définit la signature Vernis Rouge et prépare le terrain pour mon premier album à la rentrée.

Je voulais une image forte, sensuelle, puissante, avec une énergie plus rock, plus directe. Quelque chose qui frappe immédiatement. Cette histoire d’amour façon Bonnie & Clyde, en featuring avec Zaoui, incarne parfaitement cette nouvelle dynamique que je veux transmettre. INTRO vient ancrer cette impulsion et poser les bases de ce qui arrive.

A son dernier concert à La Cigale, à Paris. Photo DR


Les souvenirs de votre concert à La Cigale ?

C’était magique. Une Cigale en ébullition, électrique, vibrante, pleine à craquer… Retrouver mon public, l'entendre chanter, crier, sentir cette énergie pure et brute parcourir la salle… Un instant suspendu, gravé à jamais. J’ai déjà hâte de revivre ces moments, d’en créer de nouveaux. Et plus que tout, j’attends avec impatience le jour où je chanterai enfin devant mon public libanais.

Quelles sont encore aujourd'hui vos inspirations principales ?

J’en ai énormément. J’ai grandi avec les textes ciselés de Barbara, Véronique Sanson, Piaf, Aznavour, Gainsbourg… De véritables puits d’inspiration. À côté de ça, j’ai toujours été fascinée par l’énergie brute de Blondie et de certains groupes rock qui dégagent cette intensité folle. Et puis, il y a mon amour pour la musique classique, notamment Tchaïkovski, qui ajoute une dimension plus profonde à mon univers. Vernis Rouge, c’est la rencontre de toutes ces influences : des textes forts, une musique qui les porte et cette touche de rébellion qui me définit. Une tension entre douceur et puissance. Une énergie résolument rock.

Un morceau en arabe, un jour peut-être ?

J’adorerais chanter un morceau en arabe. D'abord pour mon père, pour qu'il soit fier, et aussi pour m’adresser à mon public libanais et à ce pays que j’aime profondément. L’arabe est une langue magnifique, pleine d’émotions et de poésie. Ce projet doit avoir du sens pour moi, il faudra qu’il soit authentique et qu’il résonne profondément. J’attends donc le bon moment pour le réaliser, mais c’est quelque chose que j’aimerais vraiment faire un jour.

Certains pensaient que sa prestation il y a un an dans The Voice, était un « coup de bol », un coup de com... Sa surprenante reprise de Bande organisée était pourtant la cerise sur le gâteau d’une carrière qu’elle construisait lentement mais sûrement. Manon Debs souligne un an plus tard un talent et une personnalité musicale faits pour durer.Dévoilé le 21 février 2025, son dernier album comporte sept titres aux sons pop rock, plus pointus ou plus tendres, accompagnés de textes tout en féminité. Son concert à La Cigale, quelques jours plus tard, était à son image : passionné, décoiffant.La jeune femme, qui sait très bien ce qu’elle veut, mais surtout ce qu’elle ne veut pas, a les émotions et les mots pour le dire. Entre séduction et sincérité, elle se livre au jeu des questions-réponses de L’Orient- Le...
commentaires (0) Commenter

Commentaires (0)

Retour en haut