
D.R.
La poétesse Alaa Hassanien est née en Arabie saoudite en 1996 de parents égyptiens. À 22 ans, elle s’installe en Égypte où elle obtient un diplôme de l’Institut supérieur d’art dramatique. Sa poésie arpente les décors quotidiens, la prévisibilité du corps, l’amour et le désir. En 2015, elle remporte le prix de l’UNESCO pour la poésie classique. Ses recueils de poésie comprennent Il émerge tremblant de ses profondeurs (Méditerranée, 2018), Le Tout Nouveau Testament (Takween, 2019), L’Amour qui double la solitude (Waziz, 2019), et un recueil de nouvelles intitulé Contes de l’ennui (2021).
Alaa Hassanien est également journaliste et réalisatrice de films. Elle réside actuellement en France.
Ce n’est que du sang
D’une manière ou d’une autre
Ce sang sur les tissus blancs
Le sang qui a coulé amplement entre mes cuisses
Formant des taches sur le carrelage ;
Il devait être un enfant.
Je me suis dit : Ce n’est que du sang
Une chose simple,
Comme une coupure de papier.
J’ai imaginé un enfant aux sourcils épais
Émergeant d’une tache sur le carrelage
Et trébuchant dans le couloir.
Je ne pense pas au monde
Et je ne me soucie pas des enfants.
Quand ils rient fort
J’aimerais qu’ils se taisent.
Quand ils se promènent en demandant de l’argent
J’aimerais qu’ils s’en aillent
Et que j’arrête enfin de me voir
Dans chaque enfant déprimé.
J’ai bu pendant de nombreuses années
Pour fuir rapidement mon enfance
Je buvais presque tous les jours
Pour pouvoir rire
J’ai accueilli la main qui demandait une danse
Car l’amour est beau
Et heureux
L’amour est un enfant.
(…)
Je suis sortie et j’ai erré au milieu des voitures
Le monde à l’extérieur de moi est au-delà de moi
Le monde à l’intérieur de moi me dépasse.
Mes amis sont venus me chercher
Ils ont dit que je me déprimais moi-même.
Alors que je plongeais ma main dans la poche de mon manteau
Un enfant dans un sac en plastique.
Ils ont aussi dit que la vie est belle
Et que je suis jeune
Quelqu’un a marmonné quelque chose à propos d’un bon thérapeute
Et m’a tenu le bras
En pleurant
En plongeant mon autre main dans ma poche
Serrant la main d’un petit enfant
J’ai décidé qu’il viendrait mort.
Traduit de l’arabe par Salma Moustafa Khalil