Manifestation de soutien à Gisèle Pelicot à Mazan, dans le sud de la France, le 20 décembre 2024. Photo REUTERS/Manon Cruz
Dominique Pelicot, condamné à 20 ans de réclusion en France pour avoir drogué sa femme Gisèle afin de la violer et la livrer à des dizaines d'inconnus, ne fait pas appel, mais un nouveau procès aura pourtant lieu, plusieurs coaccusés contestant eux ce verdict au retentissement international.
Dominique Pelicot, 72 ans, a pris la décision de ne pas frapper d'appel le verdict rendu par la cour criminelle de Vaucluse » (sud-est de la France) le 19 décembre, a expliqué son avocate Béatrice Zavarro, lundi à l'AFP et Franceinfo, au dernier jour possible pour le dépôt d'un appel par la défense. Le verdict avait été couvert par environ 180 médias dont 86 basés hors de France.
Un appel « contraindrait Gisèle à une nouvelle épreuve, à de nouveaux affrontements, ce que Dominique Pelicot refuse », a-t-elle ajouté.
Dans leur arrêt, consulté par l'AFP, les juges avaient souligné que Gisèle Pelicot, était « victime d'avoir été droguée, au mépris de sa santé, (...) et victime d’avoir été abusée sexuellement, souillée et humiliée pendant près de dix années pour alimenter un fantasme, celui de Dominique Pelicot, (…) lequel prenait plaisir à la violer et à la voir être abusée par d'autres hommes, ce qu'il assume ». Les faits se sont produits à Mazan dans le sud-est de la France.
Condamné pour viols aggravés sur sa femme et celle d'un coaccusé, également sous soumission chimique, mais aussi entre autres pour enregistrement d'images à caractère sexuel sur sa fille Caroline et ses deux belles-filles, Dominique Pelicot accepte donc la peine de 20 ans de réclusion - le maximum prévu par la loi française- assortie d'une mesure de sûreté des deux tiers (environ 14 ans) qui lui a été infligée.
Son avocate a estimé que plutôt que « de courir un risque inutile en appel », une éventuelle sanction plus lourde, il valait mieux « se préoccuper de Dominique Pelicot et de son état de santé, de son âge » et éventuellement « essayer d'obtenir de la justice un aménagement de peine ». Un nouveau procès aura cependant lieu, cette fois devant une cour d'assises composée d’un jury populaire, plusieurs des 50 coaccusés ayant eux interjeté appel.
Gisèle Pelicot « n'a pas peur »
Devenue une icône féministe, notamment pour avoir refusé que ce procès hors norme se tienne à huis clos afin que la « honte change de camp » et ne pèse plus sur les épaules des victimes, Gisèle Pelicot, 72 ans également, n'a « pas peur » d'un nouveau procès, en cas d'appel, avait déclaré la semaine dernière l'un de ses avocats, Stéphane Babonneau.
Le 19 décembre, à Avignon (sud-est), la cour criminelle de Vaucluse, composée de cinq magistrats professionnels, avait reconnu coupables les 51 accusés, des hommes de 27 à 74 ans jugés pour la plupart pour viols aggravés sur Gisèle Pelicot, entre 2011 et 2020. Au terme de près de quatre mois d'un procès symbole de la lutte contre les violences sexuelles faites aux femmes, ils avaient infligé des peines allant de 20 ans de réclusion criminelle à Dominique Pelicot à trois ans dont deux avec sursis pour un retraité seulement jugé pour agression sexuelle.
Dans la foulée du verdict, la classe politique française mais aussi la presse internationale et des dirigeants comme le chancelier allemand Olaf Scholz ou le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez, avaient salué et remercié Gisèle Pelicot.
Dominique Pelicot a certes pu influencer ses coaccusés, avait reconnu la cour. Mais ceux-ci, auxquels il livrait sa femme, assommée d'anxiolytiques et inconsciente, pouvaient tous comprendre qu'il s'agissait d'un viol, avait-elle ajouté.
Vendredi, 17 accusés avaient déjà interjeté appel, ont indiqué deux avocats à l'AFP, mais d'autres pourraient encore le faire lundi, dixième et dernier jour possible pour cette démarche. Les avocats d'une quinzaine d'autres accusés ont précisé à l'AFP que leurs clients renonçaient à contester le verdict. Le parquet général n'a pas encore indiqué à ce stade s'il fera appel. Il dispose de cinq jours supplémentaires pour déposer des appels.
Dominique Pelicot est par ailleurs inculpé dans d'autres affaires. Il pourrait être jugé pour une tentative de viol en 1999 en région parisienne, mais surtout un viol suivi de meurtre en 1991 à Paris, celui d'une jeune agente immobilière de 23 ans.