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Culture - Exclusif

Yousra à « L'OLJ » : Le monde doit regarder en face l’horreur de la guerre

On l’appelle « la dernière des Pharaons ». Célébrée aux quatre coins décousus du monde arabe, elle est aujourd’hui encore, à presque 70 ans, l’actrice la plus rentable comme la plus influente d’Égypte. Au Liban pour moins de 48 heures, l'icône du 7e art oriental s’est livrée à « L'Orient-Le Jour » dès son atterrissage.  

Yousra à « L'OLJ » : Le monde doit regarder en face l’horreur de la guerre

Yousra à son arrivée à L’aéroport international Rafic Hariri le 13 avril 2024. Photo Mohammad Yassine/L’OLJ

Cet entretien a été réalisé le samedi 13 avril 2024 à l'aéroport international Rafic Hariri de Beyrouth, quelques instants après l’arrivée de Yousra sur le territoire libanais et à peine une heure avant l’attaque iranienne de drones contre Israël. Présente au pays du Cèdre à l’occasion de la cérémonie d’ouverture du Festival international des Femmes du cinéma de Beyrouth qui lui sera dédiée, la chanteuse et prima donna du 7e art - qui fêtera l’année prochaine son demi-siècle sous le feu des projecteurs - s’est volontiers pliée au jeu de l’entretien vérité, lunettes de soleil sur le nez.

Vous revenez au Liban alors que le pays se remémore un triste anniversaire : 49 ans aujourd’hui depuis le début de la guerre civile. Peut-être est-ce un signe naïf indiquant un avenir plus lumineux ?

Vous me l’apprenez. Que dire ? Je l'espère bien sûr. On se remémore une guerre en espérant qu’elle ne se reproduise plus, en espérant que l’ombre d’un autre conflit tout aussi noir ne nous explose pas en pleine figure.

Il fut un temps où je me rendais tous les week-ends au Liban, tous les week-ends je vous dis ! J’aime ce pays, sa résilience, ses humains et son soleil. Je suis heureuse de revenir vous revoir et parler de cinéma et d’art. Vous m’avez tellement manqué !

Vous avez marqué l’industrie de l’ « entertainment » arabe en devenant la voix des minorités silencieuses et en vous attaquant à des sujets tabous comme le sida. N’avez-vous jamais eu peur des réactions que ces prises de position pouvaient susciter ?

Je n’ai jamais eu peur. Jamais eu peur de rien. Quand je crois en une cause, je ne m’inquiète pas de ses retombées. J’en parle de tout mon cœur parce que je ne mens pas. Je ne cache rien aux gens. J’ai des convictions et je les transforme en combats. Ne soyons pas peureux face à nos croyances. Battons-nous pour.

Vos croyances et votre liberté se dessinent justement sur grand écran au travers de rôles poussés, puissants, audacieux et finalement féministes. Le sentiment d’hésitation vous a-t-il jamais visité ?

Vous savez, on m’a longtemps proposée des personnages qu’aucune autre actrice ne voulait incarner. Parce que trop scandaleux ou trop ambitieux pour une femme. Pour ma part, c’est très simple. Si je suis convaincue par un rôle, par un scénario, je le prends sans hésiter. Si je ne le sens pas dès le départ, je dis non. Et le non devient plus facile avec l’âge.

Si vous deviez choisir entre être une comédienne anonyme ou une célébrité, quel serait votre choix ?

Dans notre région, être une comédienne qui travaille, c’est être une célébrité. L'un ne va pas sans l'autre.

Quels rôles doivent avoir les artistes arabes de votre calibre en temps de guerre ? En dites-vous assez face aux horreurs à Gaza par exemple ?

Nous devons nous tenir debout. Et ce n’est pas juste notre rôle à nous artistes. C’est le rôle du monde entier ! Le monde entier se doit de voir et de se lever ! Et je pense que tous les peuples le font aujourd’hui sans exception aucune. Tous les citoyens de cette planète s’expriment désormais d’une façon ou d’une autre face au chaos ambiant.

Ce n’est pas une question politique, en tout cas ça ne l’est plus. C’est une question d’humanité. Ce que l'on voit sur nos écrans est terrible et terrifiant. C’est grave, c’est monstrueux, c’est inhumain et il faut le dire. Les mots sont importants.

La star égyptienne a longuement posé devant les caméras. Photo Mohammad Yassine/L’OLJ

Plus légèrement, vous célébrerez bientôt vos 50 ans de carrière. De quelle manière est-ce que le cinéma égyptien a évolué depuis vos débuts ? Est-il plus conservateur ?

Je ne sais pas si notre époque est plus traditionaliste mais je crois que nous avons moins de libertés qu’autrefois. Ce qu’on pouvait dire avant ne peut plus être répété de nos jours. Ce qu’on pouvait jouer aussi. Ce n’est plus si simple. Et cela en raison notamment des réseaux sociaux qui font que l’on doit faire attention a chaque petite sortie, chaque minuscule idée.

Je peux dire quelque chose de tout à fait innocent et cela peut être repris et totalement transformé en fonction de l’humeur de chacun. On n’utilise plus les réseaux comme un moyen de s’informer, mais comme des plateformes qui se spécialisent de plus en plus en chasse aux sorcières.

Le Liban jouit dans la région d’une réputation plus libérale au cinéma et dans les arts. Êtes-vous d’accord avec ce constat ?

Bien sûr. Le Liban est plus libéral en tout. Au cinéma, dans les arts et en dehors. Le peuple libanais vit constamment entre deux crises mais vit quand même. Car vivre est un art. Le Libanais, la Libanaise, savent affronter. Vous êtes nés ainsi, vous avez cette philosophie dans vos gènes, dans vos veines. 

Cet entretien a été réalisé le samedi 13 avril 2024 à l'aéroport international Rafic Hariri de Beyrouth, quelques instants après l’arrivée de Yousra sur le territoire libanais et à peine une heure avant l’attaque iranienne de drones contre Israël. Présente au pays du Cèdre à l’occasion de la cérémonie d’ouverture du Festival international des Femmes du cinéma de Beyrouth...

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